Je constate que les thèses manquent. Je passe ma HDR et j'espère pouvoir en diriger. Il en manque également sur les partenariats public-privé et sur de nombreux autres domaines qui m'intéressent particulièrement. Je suis d'accord sur le constat.
J'ai fait ma thèse en stratégie à HEC. Elle portait sur l'innovation. Je suis étonnée de constater que dans la plupart des études et rapports publics qui ont été rédigés, on considère comme une performance l'investissement dans l'innovation. Or il s'agit, au départ, d'un coût fixe, sans certitude de retour sur cet investissement. Les investisseurs ne s'y trompent pas puisqu'ils n'aiment pas les dépenses en R&D, considérant que les retours sur investissement sont trop aléatoires et trop éloignés dans le temps. Ils préfèrent le rachat d'une start-up ou des développements extérieurs. On peut voir, dans le cas de Kodak et Sanofi, que de nombreux investissements en innovation n'ont pas apporté les résultats attendus. L'Etat investit en innovation mais ce concept est flou. Il se limite d'ailleurs à la technologie alors que les rapports de l'OCDE et de l'Union européenne plaident pour de l'innovation ouverte, ne reposant pas sur des brevets (innovation de processus, innovation organisationnelle), qui semble totalement exclue de la vision française de l'innovation. Ce concept, tel qu'il est compris la plupart du temps, nous paraît à la fois trop étroit et trop flou. Là aussi, nous manquons de réflexions et de travaux.
Le laboratoire Regards d'économie et de gestion, que je représente, propose une posture alternative au regard des laboratoires « mainstream ». Les deux articles qui font référence (Cahu d'une part, Mulkay et Mairesse d'autre part) et les nombreux articles déposés comme des « working papers » (ce qui veut dire qu'ils n'ont pas été validés, ce qui pose d'ailleurs un problème de légitimité) relèvent du point de vue « mainstream » et d'une logique de marché. De mon point de vue comme de celui de collègues qui appartiennent à d'autres disciplines, les hypothèses de départ et les postulats sont à revoir. Une plus grande pluralité serait utile dans l'analyse économique et gestionnaire.