Lorsque nous devons réaliser des développements et compte tenu du contexte international, nous avons à prendre des décisions. À titre d'exemple, nous avons ouvert des centres de recherche en Chine en 2005, en Inde en 2012 et nous sommes en train d'en ouvrir un au Brésil en 2015, pour répondre à un besoin d'innovation dans les pays émergents dont les économies sont en croissance. Nous avons eu la chance, à Saint-Gobain, de le faire dans un contexte global de croissance de la recherche : nous avons augmenté nos budgets de recherche, si bien que la création de ces centres de recherche à l'étranger n'a pas pénalisé une augmentation en France, en Europe et aux États-Unis.
Le CIR ne joue pas sur la stratégie globale de la recherche. Il n'influe pas sur ma décision d'ouvrir un centre de recherche dans un pays émergent où j'ai clairement identifié un besoin. En revanche, nous recherchons, dans un centre de recherche, deux qualités importantes : la première, servir nos marchés, c'est-à-dire qu'un centre de recherche sera ouvert là où l'innovation doit répondre à un marché en croissance ; la deuxième, les talents, c'est-à-dire que l'ouverture d'un centre de recherche est subordonnée à la présence de personnes de haut niveau, d'autant plus que Saint-Gobain a la tradition de recruter des chercheurs qui sont destinés à faire carrière dans ses autres départements (production, marketing, management...).
Là encore, l'élément déterminant, c'est l'évolution de notre production industrielle et de nos marchés. Pour autant, à la marge, aux côtés des deux critères précités, un troisième est examiné : le coût. Un directeur de la recherche d'un groupe comme Saint-Gobain n'appréhende pas la France en tant que pays mais plutôt l'Europe en tant que région, au même titre que les États-Unis, l'Asie et l'Amérique du Sud.
Prenons l'exemple de notre centre de recherche en Allemagne à Herzogenrath. Lorsqu'il s'agit d'affecter des moyens ou d'abonder les projets, se pose la question du marché, des talents et du coût. Le marché et les talents, c'est à peu près la même chose en France et en Allemagne : les gens sont bien formés, les marchés sont intéressants. Le coût devient alors un critère, en troisième position certes, à examiner. J'ai constaté vers la fin des années 2000, puisque j'ai pris ma position à Saint-Gobain en 2005, que le coût « environné » d'un chercheur (son salaire plus le coût réuni de tout ce qu'il dépense) était de l'ordre de 10 % plus cher en Allemagne. Aujourd'hui, sans le CIR, c'est l'inverse : un centre en France coûterait 10 % plus cher qu'en Allemagne. Les personnes que je recrute à Cavaillon ou à Aubervilliers coûtent, tous frais compris, 10 % plus cher que les personnes que j'embauche à Herzogenrath. Au cours de ces dix dernières années, le différentiel de coût du chercheur s'est donc inversé entre l'Allemagne et la France. Et, vous le verrez dans les réponses écrites que nous communiquerons à votre questionnaire, c'est essentiellement ce critère là que nous retenons. Toutes choses égales par ailleurs, s'il s'agit de renforcer des moyens de recherche et si c'est équivalent de le faire en Allemagne ou en France du point de vue des talents et du marché, dans ces conditions, le coût devient un argument.