Beaucoup de choses contradictoires ont été dites sur la question de la garantie illimitée de l'État liée au statut d'EPIC d'EDF et de GDF, notamment lors de leur changement de statut en sociétés anonymes.
Les commissaires européens chargés, d'une part, du droit de la concurrence et, d'autre part, du secteur énergétique, se sont eux-mêmes contredits.
Nous proposons donc au Gouvernement de saisir la Cour de justice des Communautés européennes afin qu'elle détermine si l'interprétation du droit communautaire par la Commission est effectivement fondée.
Le traité sur l'Union européenne ne préjuge pas du régime de la propriété des entreprises dans les États membres. Il est ainsi tout à fait défendable, même si la direction d'EDF le conteste, que les deux tiers du chiffre d'affaires de l'entreprise soient réalisés sur notre territoire national, en conformité donc avec les exigences européennes concernant les abus de position dominante.
Ce que pourrait contester la Commission, c'est la garantie illimitée de l'État que lui conférerait son statut d'EPIC, mais l'État pourrait prendre des engagements solennels en la matière.
Surtout, l'État pourrait contester cette interprétation auprès des institutions européennes, d'autant que la Commission, qui, théoriquement, n'accepte pas la garantie de l'État, la reconnaît bien souvent dans les faits quand celui-ci vient au secours de grands groupes qu'il n'est évidemment pas question de laisser sans soutien.
Tel est le cas d'Alstom, entreprise pour laquelle le Gouvernement n'a pas accepté d'emblée - et à juste titre - les demandes de la Commission. Celle-ci n'a pas non plus contesté l'intervention de l'État en Grande-Bretagne quand il s'est agi de sauver British Energy ou les chemins de fer.
Si la Commission accepte que l'État français intervienne financièrement dans le cas d'Alstom, ce qui - je le répète - nous apparaît pleinement justifié, elle manquerait singulièrement de cohérence en remettant en cause aujourd'hui le statut d'EDF.
De plus, elle contreviendrait aux dispositions qu'elle a elle-même adoptées et qui ne contraignent pas le régime de la propriété dans les États membres.
Si tel était le cas, le Gouvernement ferait preuve de volonté politique en s'engageant à s'opposer à cette analyse de la Commission et à agir énergiquement, comme il a prétendu le faire s'agissant d'Alstom.
La saisine de la Cour de justice des Communautés européennes nous paraît donc tout à fait justifiée.