Intervention de Guy le Bras

Commission d'enquête coût économique et financier de la pollution de l'air — Réunion du 28 mai 2015 : 1ère réunion
Audition de M. Guy Le bras directeur général du groupement des autorités responsables de transport

Guy le Bras, directeur général du groupement des autorités responsables de transport :

Nous vous remercions de cette audition même si, au départ, votre invitation nous a laissés un peu perplexes car le nom de votre commission d'enquête « le coût économique et financier de la pollution de l'air », n'est pas le coeur de l'expertise du Groupement des autorités responsables de transport (Gart). Nous comprenons mieux au regard de vos questions. Le président Louis Nègre aurait été particulièrement indiqué pour venir vous parler de ce sujet mais il est malheureusement retenu par une autre obligation. Nous avons été entendus à l'Assemblée nationale sur le rapport de la Cour des comptes concernant le plan énergie climat. Le rapport de François De Rugy qui en est issu recoupe plusieurs de vos préoccupations.

Dans le partage de compétences entre les autorités de transport et les opérateurs, les autorités sont responsables de la tarification, du niveau de l'offre, de l'organisation du report modal. Les opérateurs sont chargés de déployer des moyens techniques pour mettre en oeuvre ces politiques. Sur le sujet qui nous intéresse, les responsabilités sont donc partagées et nous travaillons ensemble comme, par exemple, sur l'obligation inscrite dans le projet de loi de transition énergétique de mise en place de parcs de véhicules propres.

Les transports sont responsables de 25 % des émissions de CO2 nous ne pouvons donc nous désintéresser de ce sujet. Mais les transports publics, donc aussi les bus diesels qui circulent dans nos villes, ne sont responsables que de 1,5 % de ces 25 %. La première priorité pour nous est donc de mettre les gens qui sont dans leur voiture dans des bus car la pollution, par les transports publics, est nettement inférieure à celle qui résulte de l'usage des véhicules individuels.

Cependant, pour augmenter le rapport modal de 10 %, il faut augmenter l'offre de transports publics de 50 %. On a donc des investissements importants à réaliser pour un impact modeste et un effet ciseau qui est important. Le financement des transports publics est sous contrainte car le versement transport baisse en raison de la crise et la capacité d'investissement des collectivités baisse mécaniquement de 20 % par an. Or, face à cette contrainte budgétaire il est important pour la qualité de l'air et pour la qualité de vie dans nos villes, d'augmenter l'offre de transports.

C'est la raison pour laquelle nous avons monté, avec nos collègues de l'UTP, un tour de France de l'offre de transports publics pour promouvoir l'optimisation des moyens et montrer que l'on peut faire mieux malgré ces contraintes.

Les collectivités peuvent nous aider dans ce combat. Un certain nombre de mesures qui contribuent à la mobilité durable comme l'autopartage sont prises par les grandes villes et le Gart les soutient. Nous avons, depuis dix ans, soutenu la dépénalisation et la décentralisation du stationnement ; plusieurs sénateurs l'ont finalement obtenu avec l'adoption de l'article 63 de la loi de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles (Maptam). Il y aura une meilleure rotation des véhicules et le produit du forfait de stationnement, qui remplacera l'amende, servira à l'amélioration de la mobilité durable dans les agglomérations. Il est très important de lutter contre les avantages exclusifs donnés au véhicule individuel.

Le Gart n'est pas anti-voiture mais pour la mobilité durable, ce qui implique le bon usage de la voiture. Contrairement à plusieurs pays européens où beaucoup de grandes agglomérations ont introduit un péage urbain (il y a Londres mais aussi Milan ou Rome), en France, cette mesure est politiquement difficile à mettre en oeuvre mais devrait être mieux promue.

Il est aussi important de faire la part entre la responsabilité de l'Etat et celle des collectivités locales. Dans une version initiale de la loi Maptam, figurait la possibilité pour l'Etat de mettre en oeuvre une action récursoire contre les collectivités locales en cas de condamnation de la France pour non-respect de ses obligations en matière de la qualité de l'air. Cette mesure était incompréhensible à nos yeux. L'Etat ne donne pas complémentent les moyens aux collectivités locales de répondre aux obligations qu'il fixe en matière de pollution de l'air mais si la France était condamnée, alors il pourrait se retourner contre les collectivités qui, elles-mêmes, manquent de moyens ! L'Etat a une responsabilité majeure car il transcrit dans le droit français les directives européennes et contrôle le respect des normes. Les normes sont très importantes. Le Gart est pour que l'on fixe des objectifs ambitieux comme dans le cadre de la loi sur l'accessibilité car en dix ans beaucoup de choses ont été faites. Mais il y a une condition sine qua non. D'une part, il faut que ces objectifs soient cohérents avec les capacités de financement des collectivités locales et, d'autre part, en matière de politique industrielle, il faut qu'il y ait une offre nationale et européenne. Nous ne nous sommes pas associés à la contestation de la mesure tendant à mettre en place des parcs de véhicules propres pour les transports publics mais nous insistons sur le fait que cela doit être à coût constant pour les collectivités. Les autobus électriques coûtent 83 % de plus à l'exploitation et 10 000 euros de plus à l'achat, donc les conditions ne sont pas encore réunies. Nous espérons que nous allons pouvoir avancer. Mais le fond de l'affaire est que le responsable de la pollution de l'air, c'est le transport individuel, en dehors du transport public qui est vertueux et peu polluant.

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