Voici quelques informations rapides sur le programme 178 « Préparation et emploi des forces ».
Alors que le maintien en condition opérationnelle (MCO) et l'entretien programmé des matériels (EPM) avaient beaucoup souffert dans les LPM précédentes et que nous avions atteint un palier inquiétant, la loi de 2013 a marqué un revirement sensible. Il y est inscrit que l'EPM progressera de 4,3 % par an en moyenne entre 2014 et 2019, afin de stabiliser l'activité et la préparation.
Ce projet prévoit un double mouvement dont nous nous félicitons, mais sur lequel nous devrons rester vigilants. Sur les 3,8 milliards d'euros de crédits supplémentaires pour la défense, 500 millions seront consacrés entre 2016 et 2019 à la régénération des matériels. Les armées ne nous ont pas encore fourni un calendrier et une répartition précise de ces crédits mais il est encore tôt. Dans le même temps, l'évolution favorable de différents facteurs économiques permet une sous-exécution des crédits à hauteur d'un milliard d'euros pour l'ensemble de la mission « Défense ». Sans que cela soit précisé, le programme 178 abonde certainement de manière importante cette enveloppe d'économies. Or il serait paradoxal de sous-exécuter les crédits budgétés, de transférer cette « économie » vers un autre programme et d'abonder en même temps le programme 178 de 500 millions d'euros.
Nous devrons rester vigilants sur l'exécution effective des crédits de MCO et d'EPM, d'autant que cette enveloppe supplémentaire de 500 millions est essentielle pour rattraper le retard accumulé les années passées et faire face aux conséquences du niveau élevé d'engagement de nos armées. Selon le général de Villiers, « c'est un minimum, car actuellement, nous consommons plus vite que nous sommes capables de régénérer ». Les matériels sont aujourd'hui mis à rude épreuve, notamment avec l'opération Barkhane dans le Sahel. Certains ne sont pas récupérables.
La révision de la LPM supprime la phrase où les crédits d'EPM progressent de 4,3 % par an en moyenne ; elle conserve toutefois un montant en valeur absolue de 3,5 milliards d'euros par an en moyenne contre 3,4 milliards dans la LPM de 2013.
Le niveau actuel d'engagement, extérieur et intérieur, sollicite les matériels, mais d'abord les hommes de façon intensive. De nombreux congés ont été annulés, des militaires repartent plus fréquemment en Opex, la préparation a été réduite, ce qui n'est pas satisfaisant car elle est indispensable à l'efficacité mais surtout à la sécurité de nos soldats.
La perspective de mobiliser dans la durée 7 000 hommes sur le territoire national pour une opération intérieure doit nous amener à réfléchir à la doctrine d'emploi de ces forces. Comment adapter la formation et la préparation à ces missions nouvelles dans de telles circonstances ? Quels sont les sites à protéger ? Comment le faire au mieux ? Quel est le cadre juridique de ces interventions ? Les procédures actuelles de légitime défense sont-elles adaptées ? Quelle chaine de commandement mettre en place ? Ces questions sont importantes et relativement inédites dans la culture française où les militaires, hormis les gendarmes, ne sont pas appelés à intervenir intensément sur le territoire national.
Le Président de la République a demandé au Premier ministre d'engager une réflexion sur ce sujet : nous souhaitons que le Gouvernement transmette au Parlement le résultat de ses travaux et que le rapport fasse l'objet d'un débat.
Il existe d'autres préoccupations liées à la préparation et à l'emploi des forces mais je ne souhaite laisser la place au débat.