Intervention de Olivier Cadic

Délégation sénatoriale aux entreprises — Réunion du 18 juin 2015 : 1ère réunion
Examen du rapport de m. olivier cadic et mme elisabeth lamure relatif aux environnements britanniques et français du point de vue des entreprises rencontrées à londres par la délégation aux entreprises

Photo de Olivier CadicOlivier Cadic :

Madame la Présidente, Mes Chers Collègues, vous l'avez tous dit à plusieurs reprises, il est de notre devoir, en tant que membres de la Délégation aux entreprises, de peser sur le débat et de contribuer aux réflexions qui permettront de définir les réformes utiles aux entreprises, pour enfin libérer leur croissance.

Lors de la question orale avec débat du 10 juin dernier, nous avons demandé au Gouvernement un bilan de l'application de la circulaire du 17 juillet 2013 relative à la mise en oeuvre du gel de la réglementation en ce qui concerne les entreprises.

Madame la Présidente, vous avez interrogé le secrétaire d'État chargé de la réforme de l'État et de la simplification en rappelant les exemples de nos voisins, comme le Normenkontrollrat en Allemagne, organe indépendant créé en 2006 pour réduire la bureaucratie. Ou encore le Regulatory Policy Committee, créé en 2009 au Royaume-Uni et chargé de vérifier les estimations des coûts et bénéfices de chaque norme envisagée, en termes économiques, sociaux et environnementaux.

J'ai moi-même fait référence à l'Office of Tax Simplification en en rappelant le succès Outre-manche, au regard des économies réalisées pour les entreprises installées au Royaume-Uni.

Je crois que nous avons tout intérêt à rappeler ce que font nos partenaires européens qui réussissent à soutenir les entreprises et connaissent le plein emploi. C'est la raison pour laquelle ce matin nous voulons vous proposer de publier un rapport d'information reprenant les enseignements tirés de notre déplacement au Royaume-Uni. Avec Mme Lamure, nous y reprenons tous les éléments évoqués au cours des échanges et visites organisés à Londres le 13 avril dernier, en apportant des analyses et statistiques permettant d'étayer les arguments développés par les entrepreneurs rencontrés.

En première partie, nous rappelons les chiffres caractérisant l'économie britannique en les comparant à ceux de la France et d'autres membres de l'Union européenne. Nous y proposons une analyse sans tabou, en nous interrogeant sur la précarité régulièrement dénoncée Outre-manche. Pourtant les études menées sur les personnes bénéficiant d'un contrat « zéro heure », tout comme les indices de la Banque mondiale ou de l'OCDE montrent que non seulement les inégalités n'ont pas cru avec les réformes de David Cameron, mais que le revenu moyen ajusté net des ménages est proche de celui de la France.

Nous rappelons également que la culture économique britannique a été qualifiée par nos interlocuteurs de « relativement récente », car elle est née avec Margaret Thatcher, au début des années 1980. La « révolution » opérée ensuite par Tony Blair en 1995 a été déterminante, notamment pour que l'administration accompagne la stratégie du Gouvernement. Il est d'ailleurs intéressant de comparer la portée du mot « révolution » dans les analyses relatives au Royaume-Uni et en France. En effet, lors du débat du 10 juin, le secrétaire d'État nous a répondu, en parlant du Conseil de la simplification, que « la procédure collaborative représente une mini-révolution. En France, culturellement, les normes sont produites par l'administration pour répondre à une orientation politique, mais on ne se soucie pas des modalités d'application...(...) ». Évidemment, lorsqu'on entend cela, on réalise que nous sommes encore loin de la révolution du parti travailliste de 1995. Mais si nous rappelons régulièrement ce qui marche chez nos voisins, alors nous finirons certainement par aider les entreprises françaises. D'ailleurs le secrétaire d'État lui-même a expliqué avoir fait un « tour d'Europe des exemples qui ont donné plus ou moins de résultats » et en avoir « retenu quelques principes d'action ».

La seconde partie du rapport détaille le pragmatisme britannique qui inspire tant les entrepreneurs français.

Nous y évoquons la simplicité fiscale - avec un coût du travail beaucoup moins élevé qu'en France, et la simplicité administrative avec la règle du « One in, One out » devenue « One in, Two out » : elle a permis aux entreprises de réaliser des économies s'élevant à 2,2 milliards de livres, soit plus de 3 milliards d'euros.

La flexibilité y est également abordée, avec l'utilisation du temps de travail lors de la crise comme outil de dialogue social pour éviter les licenciements. La question des indemnités montre également les différences de coûts pour des employeurs en France et Royaume-Uni. Il est intéressant d'avoir ces exemples en tête alors que le Premier ministre vient d'annoncer le plafonnement des indemnités en cas de licenciement injustifié.

Enfin nous abordons le pragmatisme sous l'angle de la confiance : confiance dans les entreprises appelées à se développer, avec des mesures attirant les investissements ; confiance à l'égard des entrepreneurs que l'administration fiscale n'empêche pas de travailler ; mais aussi confiance dans la relation contractuelle entre employeur et employé. Le rapport d'Alain Lacabarats sur la justice prud'homale est saisissant : la France a été condamnée 58 fois en 2012, et 51 fois en 2013 avec un montant de 1,4 million d'euros. Avec des dysfonctionnements aussi graves, peut-on réellement affirmer que le droit du travail protège les salariés en France ?

Voici, mes chers collègues, la structure du rapport que nous vous proposons de publier, afin que notre déplacement au Royaume-Uni laisse une trace et puisse contribuer au débat qui nous préoccupe tous.

Je vous remercie.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion