Monsieur le ministre, permettez-moi de revenir, à la suite du rapporteur et du rapporteur pour avis, sur les incertitudes relatives au budget et au financement que ce projet de loi ne lève pas entièrement.
L’abandon de l’option des sociétés de projet est une bonne décision, que le groupe UDI-UC soutient. Reste néanmoins à trouver une autre source de financement.
Vous semblez désormais compter sur la vente de fréquences hertziennes à très haut débit aux opérateurs de téléphonie mobile. Or, si les fruits de cette vente reviennent bel et bien à la défense, il ne s’agira de toute façon que d’une solution de court terme, car la somme obtenue, estimée à plus de 2 milliards d’euros, sera insuffisante, même si elle est importante, pour financer de manière pérenne les besoins supplémentaires de notre défense.
En l’absence de l’élaboration d’une loi de finances rectificative cette année, l’incertitude financière demeure, notamment concernant le financement des OPEX, qui doit répondre à une logique de besoins, et non à une logique de moyens.
Dans ce domaine, le travail accompli par la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat et par son président, Jean-Pierre Raffarin, a permis d’introduire des clauses de sauvegarde nécessaires pour sécuriser la trajectoire financière prévue par le projet de loi.
Ces amendements de clarification ont vocation à améliorer la mise en œuvre du texte, et non à faire échouer le nécessaire dialogue entre nos deux assemblées sur ce projet de loi. À chaque jour suffit sa peine.
Ainsi, loin d’être un « luxe » accordé à la défense, l’augmentation du budget était strictement requise et nécessitera une gestion financière précise pour produire les effets recherchés et donner à nos armées des moyens à la hauteur de la mission qui leur est confiée.
Ce contexte économique difficile ne touche cependant pas exclusivement la France et, alors que les menaces sont de plus en plus transnationales, il apparaît nécessaire de développer nos partenariats, en premier lieu avec l’Europe, qui devrait être davantage concernée. Je sais à quel point ce sujet, véritable serpent de mer, est difficile, parfois désespérant, mais il faut en parler.
Le Conseil européen qui s’est tenu à Bruxelles les 25 et 26 juin a été l’occasion, pour les États membres, d’évaluer les progrès accomplis en matière de politique de sécurité et de défense commune depuis décembre 2013. Si cette démarche est positive, ce Conseil européen a une nouvelle fois été marqué par le manque de vision stratégique commune de l’Union européenne.
Pourtant, les restrictions budgétaires que nous mentionnons aujourd’hui et qui limitent largement notre marge de manœuvre concernent également nos partenaires européens. Il est donc temps de faire preuve de plus d’ambition et de travailler ensemble à l’émergence d’une véritable Europe de la défense et au développement d’une base industrielle et technique de défense européenne. Le contexte économique et géopolitique l’exige. Les Européens sont aujourd’hui confrontés aux mêmes limites et aux mêmes menaces. Tout ce qui a jusqu’à présent freiné cette démarche européenne doit être aujourd’hui remis sur la table. En effet, les circonstances actuelles sont tout à fait exceptionnelles.
Comme cela a été dit avant moi, nécessité fait loi ! Je suis aussi conscient que tout un chacun de la difficulté de cet exercice. Nous sommes néanmoins nombreux à penser, tout en étant attachés à la souveraineté de la France dans bien des domaines, que nous avons un avenir européen, y compris en matière de défense.
Contrairement à ce que certains pourraient craindre, ce partenariat européen n’est pas en concurrence ou redondant avec notre engagement au sein de l’OTAN : il en est complémentaire. Les États-Unis ne manquent d’ailleurs pas de rappeler, lors de chaque sommet entre alliés, l’importance d’une prise de responsabilités européenne en matière de défense, y compris en termes budgétaires pour les États.
La France à un rôle à jouer en vue de trouver cette voie européenne vers une défense continentale commune, car sur ces questions au moins, notre pays est aujourd'hui – pourquoi ne pas le dire ? – le plus crédible. Eu égard à la menace que ressentent tous les citoyens européens, cela nous donne un véritable poids.
Ainsi, monsieur le ministre, la majorité des membres du groupe UDI-UC soutiendra l’adoption du projet de loi actualisant la programmation militaire pour les années 2015 à 2019, dans la mesure où il renforce les moyens de notre défense. Néanmoins, des incertitudes financières demeurent, alors même que la diversité et l’intensité des menaces auxquelles nous sommes aujourd’hui confrontés nous imposent de faire preuve de rigueur et d’anticipation. Ce débat trouvera donc son nécessaire prolongement lors de l’examen du prochain projet de loi de finances. Pour l’heure, le présent texte marque un progrès, or il faut avancer. Nous vivons aujourd'hui un moment important pour notre défense.