Intervention de Jean Bizet

Réunion du 8 juillet 2015 à 14h30
Situation de la grèce et enjeux européens — Déclaration du gouvernement suivie d'un débat

Photo de Jean BizetJean Bizet :

Monsieur le président, monsieur le ministre des affaires étrangères et du développement international, mesdames, messieurs les ministres, monsieur le rapporteur général de la commission des finances, mes chers collègues, la situation de la Grèce nous préoccupe depuis de longs mois déjà.

Désormais, nous en sommes à un point que je qualifierai de crucial, voire de non-retour. Le peuple grec avait accompli des efforts considérables avant les dernières élections législatives. Les premiers résultats étaient là. Les perspectives de croissance étaient nettement meilleures. Le pays enregistrait un excédent budgétaire primaire, modeste certes, mais réel.

L’arrivée d’une nouvelle majorité, animée d’un esprit de confrontation avec l’Union européenne, a changé la donne. Des discussions interminables se sont engagées. Permettez-moi de vous le rappeler : à ce jour, on dénombre presque six sommets et douze séances de l’Eurogroupe. Ces négociations ont été marquées par un manque de volonté flagrant du nouveau gouvernement grec de s’engager sur la voie des indispensables réformes structurelles.

Avant même l’annonce du référendum, notre collègue Simon Sutour s’est rendu à Athènes au nom de la commission des affaires européennes. Il nous a communiqué des informations précises, mais non rassurantes, quant à la situation dans ce pays. Contrairement aux autres États qui, comme l’Irlande ou le Portugal, sont placés sous programme d’assistance financière, la Grèce semble dans l’incapacité de sortir du cercle vicieux né de l’absence de réformes.

Le référendum du 5 juillet est une expression claire de la volonté du peuple grec dont nous respectons le vote. Cependant, en se prononçant ainsi, les Grecs ont fait un grand saut dans l’inconnu. Depuis, leur pays est plongé dans l’incertitude quant à son maintien dans la zone euro. Or la volonté d’un pays, fût-il la patrie de Platon, ne saurait s’imposer à l’ensemble de l’Europe. La Grèce ne peut solliciter indéfiniment ses partenaires pour pallier son inorganisation, son absence de volonté d’instituer un État structuré qui collecte l’impôt et qui, tout simplement, équilibre ses dépenses et ses recettes.

Dès lors, nous devons refuser ces postures populistes imputant la situation de la Grèce à une dictature de la finance, alors même – plusieurs orateurs l’ont déjà souligné – que le pays n’a pas adopté les dispositions élémentaires pour assurer un équilibre fiscal.

Les premiers créanciers de la Grèce sont tout simplement les contribuables européens, qui n’ont jamais failli dans leur solidarité vis-à-vis des Grecs. Gardons-nous d’encourager les courants populistes qui se font jour partout en Europe, notamment dans des pays qui, comme l’Espagne ou le Portugal, ont accompli des efforts considérables pour redresser leur situation.

Soyons clairs : le gouvernement grec n’a d’autre choix que de revenir à la table des négociations. Cela étant, il doit impérativement présenter des propositions concrètes pour empêcher la banqueroute annoncée du pays.

Nous aimons la Grèce et nous ne sommes pas opposés à une énième main tendue, mais la France et l’Europe doivent faire preuve de fermeté. Il ne peut être question d’imposer aux Français une nouvelle pression fiscale – le niveau d’imposition actuel est déjà insupportable – pour faire face aux inconséquences d’un gouvernement européen. Quoi qu’il en soit, toute nouvelle concession devra recevoir l’approbation de quatre Parlements nationaux, ceux de l’Allemagne, de la Finlande, des Pays-Bas et de l’Autriche. Or cet accord est loin d’être acquis !

De son côté, le couple franco-allemand doit jouer tout son rôle pour travailler à un règlement, mais la conclusion d’un nouvel accord doit être subordonnée à la mise en œuvre de réformes d’envergure, visant l’organisation de l’État et la fiscalité.

Si ces conditions sont réunies, la restructuration de la dette grecque ne sera pas un tabou. Cette solution est prévue par l’Eurogroupe depuis novembre 2012. Il serait même possible d’aller plus loin que la simple réduction des taux d’intérêt ou l’allongement de la maturité des prêts. La crise grecque peut être l’occasion, pour l’Europe, d’inventer un nouveau modèle de solidarité responsable. Nous avons précisément évoqué cette perspective au sein de la commission des affaires européennes.

Monsieur le ministre, l’une des solutions consisterait, pour les États créanciers qui le souhaitent, à convertir une partie de la dette grecque dont ils disposent en certificats d’investissement permettant de développer l’économie grecque.

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