Madame la présidente, mes chers collègues, je tiens tout d’abord à remercier M. le ministre de la défense et ses services du dossier extrêmement précis qu’ils nous ont fait parvenir il y a déjà quelques semaines. Cela aide à y voir plus clair ceux d’entre nous qui ne sont pas membres de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.
Sur le fond du débat, à la lumière des tragiques événements qui ont touché, qui touchent et qui – il faut le craindre – toucheront notre pays, il semblerait que les plus hautes autorités de l’État aient enfin pris conscience de l’urgence de la situation pour notre politique de défense.
Bien sûr, monsieur le ministre, vous n’avez pas attendu la survenance de ces odieux attentats islamistes pour proposer un renforcement de nos capacités ou, plus exactement, la fin de la diminution engagée par vos prédécesseurs sous la pression budgétaire imposée par l’Union européenne.
Nous connaissons tous ici votre souci pour nos forces armées. Pourtant, jusque récemment, vos propositions s’étaient fracassées sur le mur de la rigueur budgétaire. Il est triste qu’il faille des événements dramatiques pour faire bouger les lignes, alors que tous les indicateurs sont depuis longtemps dans le rouge ! Il convient de noter que, lors des travaux sur le Livre blanc qui ont abouti à la loi de programmation militaire dont vous nous proposez la réactualisation, les militaires avaient déjà fait part non seulement du besoin urgent de modernisation des équipements, mais surtout de la dangerosité pour notre outil de défense de la diminution drastique des effectifs. Ils n’ont pas été écoutés et l’on s’aperçoit aujourd’hui qu’ils avaient raison.
Fort de cette prise de conscience, vous proposez de diminuer la baisse des effectifs ; mais une baisse de la baisse, ce n’est pas malheureusement pas une hausse !
Le dernier front, et non le moindre, sur lequel nos forces armées sont engagées est l’opération Sentinelle. Je tiens ici à rendre hommage à toutes les unités qui remplissent cette mission, certes importante, mais, il faut le reconnaître, peu exaltante pour nos soldats.
Pour ce qui est des finances, qui restent le nerf de la guerre, vous nous proposez une augmentation du budget programmé de 3, 8 milliards d’euros sur la période 2015-2019. Toutefois, malgré l’urgence de la situation actuelle, 2, 5 milliards d’euros ne sont programmés que pour après 2017 : en fait, vous reportez l’effort sur la future majorité.
Je n’ai malheureusement pas le temps d’entrer dans le détail des équipements à remplacer, à moderniser et à acquérir pour nos trois armées. En un mot, malgré quelques garanties, nous sommes extrêmement inquiets sur le niveau d’équipement de nos forces. Or, comme le soulignait le général de Villiers devant nos collègues de l’Assemblée nationale, 20 % des équipements terrestres de retour du Sahel sont irrécupérables. Ce fait ne semble pas être pris en compte dans ce texte. Il ne faudrait pas que le coefficient « vraie vie » utilisé dans une partie de nos armées devienne une clé de lecture incontournable pour comprendre les lois de programmation militaire.
Certes, l’armée française fait l’admiration de nos alliés par sa force de débrouillardise, mais ce n’est pas digne d’une grande puissance !
Je voudrais évoquer brièvement la création des associations professionnelles de miliaires. Outre le fait que je doute de la pertinence de telles associations, les différents conseils de la fonction militaire permettaient déjà aux chefs d’avoir un accès libre et direct à tous les échelons de la hiérarchie.
De fait, cette mesure est un nouveau signe de notre soumission à des instances clairement supranationales. Quand donc la France retrouvera-t-elle sa pleine et entière souveraineté ? Là est la vraie question, surtout lorsque ses armées, qui relèvent d’une fonction régalienne par excellence, en sont victimes !
J’imagine que ma conclusion ne vous surprendra pas, monsieur le ministre. Cette actualisation va dans le bon sens, mais nous sommes encore très loin du compte s’agissant tant des équipements que des effectifs. Nous préconisons, pour notre part, de garantir dans la Constitution que 2 % du PIB sont affectés à notre défense.
Nous comptons sur votre pugnacité pour veiller à ce que les crédits promis dans cette loi soient effectivement inscrits, et non pas soumis à des aléas, comme ce fut le cas dans le budget de 2015. Nous espérons surtout que vous continuerez à faire montre de pédagogie auprès de vos collègues, afin qu’ils comprennent enfin l’importance qu’il y a à doter nos armées des moyens nécessaires à leurs missions de protection de la France, de ses intérêts et de nos concitoyens !