Monsieur le président, mes chers collègues, la date de présentation du rapport qui m'a été confié par la Mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale (Mecss) n'est pas le fruit du hasard. Le 15 juillet, lendemain de la fête nationale, est en effet la date limite à laquelle le Comité de suivi des retraites, instauré par la loi du 20 janvier 2014 garantissant l'avenir et la justice du système de retraites, doit émettre son avis annuel sur la situation des retraites, en se basant sur le rapport publié par le Conseil d'orientation des retraites (COR) avant le 15 juin. Or, cet avis a été rendu le 13 juillet. J'y reviendrai...
Celui-ci doit lui permettre de se prononcer à la fois sur la soutenabilité financière du système de retraite et sur son caractère équitable. Sa compétence est toutefois très encadrée, car en cas de déséquilibre financier, les mesures qu'il peut proposer, hausse du taux des cotisations d'assurance vieillesse ou de durées d'assurance, ne peuvent s'écarter de certaines limites fixées par décret par le Gouvernement.
Fort heureusement, la commission des affaires sociales du Sénat est, pour sa part, entièrement libre de se prononcer sur ce sujet d'une importance capitale pour l'avenir de notre pays.
Alors que, selon un récent sondage, 92 % des Français se disent inquiets pour l'avenir du système français de retraite, le rapport que je vous présente aujourd'hui a pour objectif d'analyser en toute lucidité sa situation financière sans évacuer aucun sujet, y compris celui des retraites complémentaires, dont la gestion relève des partenaires sociaux mais dont les pouvoirs publics ne sauraient se désintéresser tant ils représentent un enjeu essentiel pour nos finances publiques.
Avant toute chose, permettez-moi de vous rappeler quelques chiffres qui permettent de saisir l'ampleur des enjeux. Les dépenses de notre système de retraite représentent chaque année 14 % de notre richesse nationale et constituent plus de 45 % des dépenses de notre système de protection sociale. Les dépenses des régimes de retraite de base devraient être à elles seules de 224 milliards d'euros en 2015, dont 121 milliards d'euros pour le régime général.
Dès 1991, le Livre blanc sur les retraites préfacé par Michel Rocard nous avait avertis que notre système de retraite devrait encaisser un véritable choc démographique à partir du milieu des années 2000 en raison de l'arrivée à l'âge de la retraite des générations nombreuses du « baby-boom ». Les effets considérables de ce « papy-boom » devraient se faire sentir jusqu'en 2035 environ.
Dans le même temps, l'espérance de vie continue à s'allonger grâce aux progrès de l'alimentation, de l'hygiène et de la médecine. Entre 1994 et 2009, l'espérance de vie à la naissance est ainsi passée de 73,6 ans à 77,7 ans pour les hommes et de 81,8 ans à 84,4 ans pour les femmes, soit un gain de près d'un trimestre par an. Sur la même période, les hommes ont gagné deux ans et demi d'espérance de vie à 60 ans et les femmes deux ans : elle atteint 22 ans pour les premiers et 27 ans pour les secondes.
L'âge effectif de départ à la retraite a jusqu'ici très peu évolué par rapport à ces bouleversements démographiques pourtant prévisibles de longues dates. Au cours des années 2000, cet âge s'est en effet maintenu entre 60 ans et demi et 61 ans. Il a même légèrement diminué à partir de 2004 avec la mise en place du dispositif de retraite anticipée pour carrière longue, avant d'augmenter à partir de 2009 et, plus encore, à partir de 2011, suite à l'adoption de la réforme des retraites de 2010. Entre 2013 et 2018, l'âge effectif de départ à la retraite devrait continuer à augmenter pour passer de 61 ans à 62,1 ans, toujours sous l'effet de la réforme de 2010.
Le principe de la répartition est celui d'une solidarité entre les générations : les actifs d'une année donnée payent les pensions qui sont versées aux retraités la même année. Un régime par répartition suppose donc pour fonctionner que le rapport entre cotisations prélevées et pensions versées - et donc entre actifs et retraités - demeure favorable.
Or, les conséquences des deux phénomènes du « papy-boom » et de l'allongement de la durée de la vie, qui n'ont jusqu'ici pas été suffisamment compensés par un recul de l'âge effectif de départ à la retraite, ont conduit à une forte dégradation du ratio entre cotisants et retraités.
Celui-ci est en effet passé de 2,01 en 2005 à 1,76 en 2013. Selon les projections du rapport annuel du COR de juin 2015, ce ratio atteindrait 1,7 en 2018 et devrait continuer à diminuer pour atteindre 1,4 à partir de la fin des années 2040. Il se stabiliserait ensuite à ce niveau jusqu'en 2060.
La dégradation de ce ratio entre cotisants et retraités explique en grande partie pourquoi, en dépit des réformes des retraites adoptées en 1993 puis en 2003, notre système des retraites a vu sa situation financière se dégrader inexorablement. Le régime général a enregistré son premier déficit en 2005 et le système de retraites dans son ensemble est devenu déficitaire à partir de 2008.
La crise économique et financière de 2008-2009 a creusé ces déficits dans des proportions sans précédent puisqu'en 2010, la branche vieillesse de la sécurité sociale enregistrait un besoin de financement de près de 15 milliards d'euros.
En dépit d'une croissance très ralentie, les pouvoirs publics - il faut s'en féliciter - sont parvenus à réduire progressivement ce déficit, qui est passé de - 15 milliards d'euros en 2010 à - 11,3 milliards d'euros en 2011 puis - 10,2 milliards d'euros en 2012, - 6,5 milliards d'euros en 2013 et - 5,4 milliards d'euros en 2014.
Cette amélioration s'explique d'abord par l'apport de recettes nouvelles : 7 milliards d'euros ont été affectés à la Cnav depuis 2010 et 4 milliards d'euros de recettes supplémentaires sont programmés pour la période 2015-2017.
Elle s'explique ensuite par le recul progressif de l'âge légal de départ à la retraite de 60 à 62 ans prévu par la loi de 2010, qui permettrait de dégager pour le seul régime général une économie de 3,3 milliards d'euros en 2014, de 4 milliards d'euros en 2015 et poursuivra sa montée en charge dans les années à venir.
Les effets positifs de cette réforme ont toutefois été atténués par la forte hausse des dépenses au titre de la retraite anticipée pour carrières longues. L'assouplissement de ces conditions d'accès opéré en 2010, puis, de manière beaucoup plus considérable, par le décret du 2 juillet 2012, générerait 2,1 milliards d'euros de dépenses en 2015, après avoir représenté une dépense de 2 milliards d'euros en 2014
Le Gouvernement prévoit le retour à l'équilibre des régimes de base de la branche vieillesse de la sécurité sociale pour 2016.
Si ce retour à l'équilibre ne paraît pas hors de portée, il ne sera qu'un faux-semblant, dans la mesure où le Fonds de solidarité vieillesse (FSV), qui finance les avantages non contributifs d'assurance vieillesse, resterait, pour sa part, en déséquilibre à hauteur de 3,5 milliards d'euros.
Déficitaire depuis 2009, le FSV, qui vient alimenter année après année la dette portée par la Caisse d'amortissement de la dette sociale (CADES), apparaît en réalité comme un outil commode qui permet aux pouvoirs publics de présenter des comptes qui sous-estiment artificiellement la gravité de la situation.
De ce fait, en se basant sur les prévisions économiques du Gouvernement, le COR estime que le système de retraite dans son ensemble - FSV, Agirc et Arrco compris demeurera en permanence en déficit entre 2015 et 2020. Ce déficit s'établira suivant les années entre - 0,3 % et - 0,5 % du PIB, soit entre 7 milliards d'euros et 10 milliards d'euros.
En outre, comme l'a relevé M. Yves Guégano, secrétaire général du COR, devant la MECSS, si le régime des retraites des fonctionnaires, qui relève du compte d'affectation spéciale (CAS) « pensions » est toujours présenté à l'équilibre, l'Etat devra consentir un effort estimé à 2 milliards d'euros pour l'équilibrer en 2018.
Dans son avis en date du 13 juillet, le Comité de suivi des retraites ne cache pas son inquiétude et souligne que la révision à la baisse des hypothèses économiques du Gouvernement pour 2015-2018 conduit désormais à prévoir un déficit de 2,9 milliards d'euros en 2018 pour les régimes obligatoires de base et le Fonds de solidarité vieillesse.
Selon le Comité - je le cite - le retour à l'équilibre financier en 2018 ne paraît pas possible, sauf mesures nouvelles ; ce solde négatif pourrait augmenter entre 2018 et 2020, en raison notamment de l'arrêt des hausses de cotisations d'assurance vieillesse et de la fin progressive du relèvement de l'âge légal.
L'objectif de la loi de janvier 2014 de quasi-retour à l'équilibre d'ici à 2020 des régimes de base et du FSV nécessiterait donc une amélioration de la conjoncture et/ou des mesures nouvelles.
Nos régimes de retraite ne seront donc pas à l'équilibre dans les cinq ans qui viennent, c'est une certitude.
J'en viens à présent à l'analyse des dernières projections de moyen et long termes du COR, telles qu'elles figurent dans son rapport de juin 2015.
Ces projections se fondent sur les hypothèses démographiques de l'INSEE. Elles sont réalisées à droit constant et intègrent les mesures adoptées dans le cadre de la loi du 20 janvier 2014. Cinq scénarios économiques sont envisagés, en fonction d'un taux de productivité variant de 1 % à 2 % et d'un taux de chômage s'établissant à 4, 5, 7 ou 10 %.
Si les scénarios A et A' étudiés par le COR venaient à se réaliser, le système de retraite pourrait revenir à l'équilibre dès le milieu des années 2020 puis dégager des excédents importants, mais ces scénarios apparaissent fondés sur des hypothèses très peu réalistes, voire utopiques, puisqu'ils s'appuient sur un taux de chômage de 4,5 % que la France n'a plus connu depuis plus de quarante ans et une productivité très élevée au regard des performances atteintes par notre pays ces dernières années.
Le scénario central du COR - le scénario B, qui table sur une croissance annuelle de la productivité du travail de 1,5 % et sur un taux de chômage de 4,5 % - prévoit pour sa part que le système de retraite pourrait retourner à l'équilibre au début des années 2030. Il s'agit là d'une prévision moins favorable que celle que le COR nous avait présentée en janvier : le scénario B évoquait alors la possibilité d'un retour à l'équilibre du système de retraite au milieu des années 2020.
Ce scénario, pourtant lui aussi très optimiste, table donc sur une permanence des déficits pendant encore quinze ans, soit quinze ans de dettes supplémentaires accumulées au détriment des jeunes générations !
A l'inverse, le système de retraite demeurerait durablement en besoin de financement en cas de croissance des revenus d'activité inférieure à 1,5 % par an à long terme.
Dans le scénario C, qui table sur une croissance annuelle de la productivité de 1,3 % et un chômage de 7 %, le déficit du système se stabiliserait à environ 0,5 % du PIB à partir du milieu des années 2030, soit un niveau assez proche de celui enregistré actuellement.
Dans le scénario C', qui envisage une croissance annuelle de la productivité de 1 % et un chômage compris entre 7 % et 10 %, les besoins de financement atteindraient un peu plus de 1 % du PIB en 2040 et un peu plus de 1,5 % du PIB en 2060, soit un niveau de déficit sans précédent qui ne pourrait que conduire à une profonde remise en question de notre système de retraite.
Quelles leçons tirer de ces projections ?
En dépit de ce qu'avançait le Gouvernement à l'époque, la réforme de 2014 s'avère insuffisante et n'a pas résolu le problème de soutenabilité de notre système de retraite.
Notre pays ne peut pas se permettre d'accumuler les déficits de son système de retraite pendant des décennies au détriment des jeunes générations.
Une nouvelle réforme est donc indispensable, ainsi que nous l'avions déjà dit, et ainsi que le Comité le prévoit dans le document qu'il nous a remis il y a quarante-huit heures.
Il devient très difficile d'utiliser le levier des prélèvements obligatoires. Alors que les entreprises de notre pays sont confrontées depuis des années à un coût du travail trop élevé qui pénalise leur compétitivité et l'emploi, il serait totalement déraisonnable d'augmenter encore le taux des cotisations vieillesse, qui s'élève déjà aujourd'hui à 27,5 %, soit un niveau très proche du seuil maximal de 28 % défini implicitement par les pouvoirs publics.
Le montant relatif des pensions par rapport aux revenus des actifs, pour sa part, va d'ores et déjà mécaniquement baisser dans les années à venir en raison de l'indexation des pensions sur les prix et non plus sur les salaires. En outre, les retraités ont déjà dû accepter le report de la date de revalorisation de leurs pensions du 1er avril au 1er octobre et un gel des pensions supérieures à 1 200 euros en 2014.
Le levier de l'âge légal de départ à la retraite est de loin celui qui offre à la France les plus importantes marges de manoeuvre.
Pour ces différentes raisons, j'appelle de nouveau de mes voeux des mesures de relèvement des bornes d'âge, dont l'effet très favorable sur les finances de la branche vieillesse, surtout à moyen et long terme, est considérable, comme le démontre déjà et va le démontrer encore plus à l'avenir la réforme de 2010.
En vertu de cette réforme, l'âge légal est actuellement repoussé chaque année de cinq mois jusqu'au 1er janvier 2017, où il sera de 62 ans pour la génération née en 1955.
Dès lors, il serait possible d'envisager de poursuivre ce relèvement progressif au-delà de cette date en prévoyant que l'âge légal passerait à 62 ans et 5 mois en 2018, puis 62 ans et 10 mois en 2019, avec l'ambition de parvenir à 64 ans en 2024. En vertu des dispositions de l'article L. 351-8 du code de la sécurité sociale, la poursuite du relèvement de l'âge légal entraînera mécaniquement celle de l'âge du taux plein sans décote, qui lui est supérieur de cinq ans. L'âge du taux plein, qui atteindra 67 ans au 1er janvier 2017, serait donc de 69 ans au 1er janvier 2024.
Il s'agit là d'une mesure courageuse, que le Sénat avait adoptée lors de l'examen du PLFSS pour 2015.
Je me souviens du débat prolongé et très dur qui avait eu lieu à l'époque lors d'une séance de nuit. J'avais insisté sur le fait que cette proposition qui, socialement, peut paraître difficile, avait été rendue possible grâce à la création du compte personnel de prévention de la pénibilité, contre laquelle le Sénat s'était élevé la nuit précédente.
Je l'avais pour ma part défendu, à condition qu'on en simplifie le fonctionnement, afin de ne pas alourdir la charge administrative des entreprises. Il permettra aux personnes effectuant des travaux pénibles d'échapper au report progressif de deux ans de l'âge de départ à la retraite que je préconise.
Permettez-moi d'aborder à présent la délicate question des régimes complémentaires de retraite Agirc et Arrco. Si je suis bien conscient que leur gestion relève des partenaires sociaux, les pouvoirs publics ne sauraient s'en désintéresser, dans la mesure où ces régimes font partie des administrations de sécurité sociale au sens du traité de Maastricht et ont un impact considérable sur nos finances publiques.
Lors d'une réunion du COR, où je représente le Sénat avec Georges Labazée, j'ai voulu faire une allusion au système de retraite complémentaire. Les partenaires sociaux ont réagi en disant que ce n'était pas aux parlementaires de s'occuper de ces questions, mais à eux de régler leurs problèmes !
Depuis leur création, les régimes complémentaires - qui, contrairement aux régimes de base, n'ont pas le droit de recourir à l'endettement - ont fait l'objet d'une gestion rigoureuse par les partenaires sociaux. Suite à la récession de 1993, ceux-ci ont su adopter des mesures exigeantes qui ont permis à l'Agirc et à l'Arrco d'enregistrer onze années d'excédents entre 1998 et 2008 et de se constituer des réserves de près de 60 milliards d'euros à la fin de cette période.
Toutefois, à partir de 2009, l'Agirc et l'Arrco ont été confrontés à l'apparition de déficits provoqués par le ralentissement de la masse salariale.
Les perspectives financières de ces régimes sont très inquiétantes. Dans les scénarios économiques considérés par la Cour des comptes comme réalistes, les déficits cumulés des deux régimes dépasseraient chaque année, et de façon de plus en plus importante, les 5 milliards d'euros, ce qui conduirait à un épuisement des réserves avant 2023 pour l'ensemble Agirc et Arrco et, au plus tard, au début de 2018 pour l'Agirc seule.
Dans son rapport, la Cour des comptes conseille aux partenaires sociaux d'adopter dès 2015 des mesures susceptibles de produire à partir de 2018 un impact annuel de plus de 5 milliards d'euros, ce qui permettrait de repousser l'épuisement des réserves globales de l'Agirc et de l'Arrco au-delà de 2030.
Comme pour tout système de retraite par répartition, les partenaires sociaux disposent de trois leviers pour procéder au redressement de la situation financière de l'Agirc et de l'Arrco : le taux de cotisation, le niveau des pensions et les bornes d'âge.
Constatant, pour les mêmes raisons que j'ai évoquées plus haut à propos des régimes de base, que tant le taux de cotisation, qui pèse sur le coût du travail, que le niveau des pensions, dont la diminution pénaliserait durement le pouvoir d'achat des retraités, seront difficiles à mobiliser de manière importante, la Cour estime que le levier des bornes d'âge devra être utilisé.
Elle considère par exemple que le financement des pensions complémentaires pourrait être assuré jusqu'en 2035 soit en conjuguant un report d'un an de l'âge moyen de départ avec une hausse de 0,125 point par an des cotisations et une sous-indexation des pensions de 1 point sous l'inflation pendant cinq ans, soit en conjuguant un report de deux ans de l'âge de départ avec des mesures identiques pendant seulement trois ans.
Les négociations entre les partenaires sociaux pour parvenir à un redressement de la situation financière de l'Agirc et de l'Arrco ont commencé le 17 février 2015. La cinquième séance de négociation qui s'est tenue le 22 juin n'a pu aboutir, et une nouvelle séance a été programmée en septembre.
Lors de la séance de négociation du 22 juin 2015, le Medef a formulé des propositions de nature à décaler l'âge effectif de départ à la retraite en instaurant des « abattements temporaires et dégressifs ».
Ainsi, ceux qui partent à 62 ans verraient leur pension complémentaire amputée de 30 % la première année, de 20 % la deuxième, de 10 % la troisième, avant de recouvrer la plénitude de leurs droits à 65 ans.
Si les décisions relatives à la gestion des régimes complémentaires Agirc et Arrco relèvent exclusivement des partenaires sociaux, je veux dire ici combien la mobilisation de l'outil des bornes d'âge est indispensable et appeler les syndicats de salariés à accepter des concessions sur ce point.
Pour conclure mon intervention sur une notre positive, j'aimerais souligner qu'en dépit des critiques qui lui sont adressées, notre système de retraite est devenu plus juste au fur et à mesure des années, sous l'impact des différentes réformes qui se sont succédé. Permettez-moi ici d'éclairer trois facettes - elles sont très nombreuses - de la question de l'équité de notre système de retraites.
Tout d'abord, le niveau de vie moyen des retraités est légèrement supérieur à celui de l'ensemble de la population, le ratio entre les deux étant de 103 %, 100 % pour les femmes et 105 % pour les hommes. Ce rapport est resté stable entre 1996 et 2012, en rupture par rapport à la tendance observée de 1970 jusqu'au milieu des années 1990, période durant laquelle le niveau de vie des retraités avait rattrapé celui des actifs.
Le taux de pauvreté des retraités se situe, depuis les années 1980, sensiblement en deçà de celui de l'ensemble de la population - 13,9 % en 2012 - et a atteint un niveau historiquement bas de 8,3 % en 2012. Ceci est valable pour les femmes comme pour les hommes, bien que, parmi les retraités, le taux de pauvreté des femmes se maintienne environ deux points de pourcentage au-dessus de celui des hommes.
Enfin, les écarts de niveaux de pension entre les hommes et les femmes, s'il demeurent beaucoup trop important, se sont malgré tout réduits ces dernières années, dans la mesure où de plus en plus de femmes ont pu mener une carrière complète. Le rapport moyen entre les pensions moyennes de droit direct - hors majorations pour trois enfants - des femmes et des hommes est ainsi passé de 55 % en 2004 à 60 % en 2013. Si on y ajoute les pensions de réversion, qui bénéficient principalement aux femmes, ce ratio, qui était de 70 % en 2004, est passé à 75 % en 2013. Selon les projections du COR, ce rapport devrait continuer à augmenter, atteignant 80 % vers 2030 et 85 % au cours des années 2050.
Il est certain que ce rapport est très angoissant pour l'avenir...