Intervention de Isabelle Falque-Pierrotin

Commission d'enquête Autorités administratives indépendantes — Réunion du 29 juillet 2015 : 1ère réunion
Audition de Mme Isabelle Falque-pierrotin présidente de la commission nationale de l'informatique et des libertés cnil et de M. Edouard Geffray secrétaire général de la cnil

Isabelle Falque-Pierrotin, présidente de la Commission nationale de l'informatique et des libertés :

Il ne me paraît pas souhaitable que les différentes autorités administratives indépendantes s'hybrident mutuellement en désignant des représentants les unes dans les autres, notamment parce que cette pratique rend assez difficile l'identification des responsabilités de chacun. À titre personnel, j'ai toujours été très réservée à ce sujet, à tel point que, lorsqu'il a été question, au cours du débat parlementaire sur le projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte, qu'un représentant de la CNIL siège au sein d'une autre autorité, j'ai considéré que cette idée n'était guère compatible avec l'existence de deux institutions disposant chacune d'un territoire clair. Comme vous, donc, je pense que là n'est pas la bonne réponse.

Les différentes autorités administratives indépendantes sont-elles constituées des mêmes gens, en tout cas de personnes puisées dans le même vivier, en sorte qu'il y régnerait une endogamie excessive ? L'entre-soi est un mal français. Nous avons besoin de sang neuf, dans tous les secteurs. Par ailleurs, compte tenu de la complexité croissante de tous les sujets qu'elles traitent, les différentes institutions doivent absolument ouvrir leurs horizons pour faire appel à de nouveaux talents.

Reste qu'en ce qui concerne les magistrats - puisque c'est d'eux que vous avez parlé, monsieur le rapporteur, en mentionnant le Conseil d'État, la Cour des comptes et la Cour de cassation -, le cas de la CNIL appelle une réponse un peu plus nuancée. De fait, les conseillers d'État sont tout de même de bons juristes, si vous me permettez cet auto-satisfecit qui n'en est d'ailleurs pas un, puisque cela fait un certain temps que j'ai quitté le Conseil d'État. En outre, les membres des trois institutions que vous avez mentionnées ont une expérience concrète et réelle de l'indépendance, une expérience qui à mes yeux n'a pas de prix, car l'indépendance et la collégialité sont notre quotidien.

Il ne me semble donc pas excessif que, dans une institution comportant dix-sept membres, six d'entre eux correspondent à cette école de pensée et à ce mode de fonctionnement.

Dernier élément : on critique les membres des hautes cours, mais on est bien content de les avoir, dans un certain nombre de cas, pour exercer des fonctions nécessitant une compétence de magistrat. Par exemple, la loi dispose que le droit d'accès indirect, ou DAI, aux fichiers de police, doit être mis en oeuvre par un magistrat de la CNIL. Chaque année, nous recevons environ 6 000 plaintes au titre du DAI, qui s'ajoutent aux plaintes du tout-venant. Nous ne pourrions pas remplir cette mission sans les six magistrats de la CNIL.

Autre exemple : pour la compétence confiée à la CNIL en matière de contrôle du blocage administratif des sites faisant l'apologie du terrorisme ou à caractère pédopornographique, tout le monde s'est félicité que la CNIL ait pu désigner un magistrat au sein du collège pour assumer le contrôle démocratique du filtrage par le ministère de l'intérieur.

Il y a un équilibre à trouver ; c'est un peu une réponse de Normand. Une certaine idéologie conduit à ne pas vouloir de ce type de populations, mais je crois que, dans un certain nombre de cas, nous avons besoin de leurs compétences, qui sont utiles. Il faut trouver un équilibre entre ce type de composition et des compositions plus ouvertes, avec d'autres talents, et notamment des talents techniques, économiques, qui correspondent réellement à des besoins de la CNIL.

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