Intervention de Laurent Leveneur

Commission d'enquête Autorités administratives indépendantes — Réunion du 16 septembre 2015 à 17h00
Audition de M. Laurent Leveneur président du bureau central des tarifications bct

Laurent Leveneur, président du Bureau central des tarifications :

C'est un mécanisme assez intelligent qui a été mis en place par la loi de février 1958. L'obligation d'assurance en matière de responsabilité civile automobile repose sur les assujettis, automobilistes ou motocyclistes. Or en France, la liberté contractuelle a valeur constitutionnelle. Il fallait combiner l'obligation d'assurance avec ce qui restait de liberté contractuelle. L'assujetti garde le libre choix de l'assureur, parmi les 300 entreprises agréées dans notre pays, sans compter celles de l'Union européenne. Quant à l'assureur, il a la liberté de contracter ou non avec tel assujetti, le refus d'assurance pouvant être légitimement opposé par des compagnies d'assurance à des personnes qui souhaitent souscrire des contrats. Le législateur a donc prévu le cas des personnes qui ne trouveraient pas d'assureur. C'est ainsi qu'est né le BCT, avec pour seul rôle de fixer la prime moyennant laquelle un assureur à qui la souscription du contrat a été demandée sera tenu de le souscrire. Le Bureau fixe donc dans un dossier individuel une prime individuelle pour un contrat individuel.

Le système a fonctionné pendant des années de manière satisfaisante, si bien qu'il a été reproduit en 1978 en matière d'assurance sur les constructions, lorsque la fameuse responsabilité civile décennale a été rendue obligatoire, puis en 1982, lorsque le législateur a généralisé l'obligation d'assurance en matière de catastrophe naturelle, en 2002, lorsqu'il a imposé aux médecins l'obligation de s'assurer, et l'an dernier, quand ont été créées de nouvelles obligations d'assurance en matière d'habitation : responsabilité des copropriétaires, responsabilité civile des syndicats de copropriétaires, responsabilité civile des locataires.

L'organisation du Bureau a été remodelée en 1992. Jusque-là, l'administration du ministère des Finances assurait le secrétariat et l'instruction des dossiers ; depuis, le monde de l'assurance (Fédération française des sociétés d'assurance et le Groupement des entreprises mutuelles d'assurance) fournit les moyens, locaux ou secrétariat. Les membres du Bureau sont nommés par arrêté ministériel et ne sont pas rémunérés. Il n'y aucun argent public dans cet organisme, pas de sanctions, ni de primes. Le Bureau se contente de rendre des décisions individuelles pour des assujettis qui n'arrivent pas à trouver d'assureur à cause d'un profil de risque élevé. Pourquoi avoir créé cet organisme ? Sans doute parce qu'il évite à l'administration de s'impliquer dans des décisions parfois difficiles, préservant ainsi la hiérarchie qui remonte jusqu'au Premier Ministre.

Le Bureau a très bien fonctionné jusqu'en septembre 2014, moment où a été mise en application la loi du 11 octobre 2013 sur la transparence de la vie publique, et notamment son article 11 qui fait obligation aux membres des AAI de présenter une double déclaration de patrimoine et d'intérêts, à l'instar de ce que font les élus. Le BCT n'est qualifié d'AAI par aucun texte législatif, mais par le rapport du Conseil d'État de 2001. Face à l'obligation de rendre leur double déclaration au 1er octobre 2014, nos membres, tous bénévoles, ont estimé que la mesure était disproportionnée. Ils ont surtout considéré qu'ils n'entraient pas dans la catégorie des représentants de la vie publique, car ils traitaient de dossiers individuels de manière confidentielle, et 77 des 82 membres du Bureau ont préféré démissionner. Depuis...

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