Intervention de Oliver Schrameck

Commission de la culture, de l'éducation et de la communication — Réunion du 6 mai 2015 à 9h00
Rapport d'activité du csa pour l'année 2014 — Audition de M. Olivier Schrameck président du conseil supérieur de l'audiovisuel csa

Oliver Schrameck :

J'ai énuméré les sujets de préoccupation qui sont les nôtres sur la bande des 700 MHz. Nous les avons communiqués au Gouvernement. Nous savons qu'un débat a eu lieu entre M. Macron et vous-même, madame la présidente, sur la traduction législative de la cession de ces fréquences aux opérateurs de télécommunication. Nous sommes très attachés, quel que soit le choix du véhicule, à voir ces dispositions soumises au plus tôt à l'examen du Parlement. Nous avons dû reporter nos décisions sur les multiplexes en cause, soit le R8 et le R5, à l'automne, dans l'attente du dispositif que le législateur aura adopté. Il est souhaitable, pour la sécurité économique des opérateurs, qu'un vote intervienne au plus tôt, ce qui évitera de surcroît à l'Etat de devoir faire face à des demandes en indemnisation.

La musique est pour nous une préoccupation importante. Nous avons conscience que le développement de la musique en ligne rend la situation des éditeurs phonographiques de plus en plus difficile. Nous avons été saisis, à plusieurs reprises, de demandes du groupe M6 à propos de la chaîne W9. Le dossier est en cours d'instruction, si bien que, comme le veut l'article 5 de la loi de 1986, je suis tenu à la réserve. Sur la problématique générale, je vous suis lorsque vous dites, madame la sénatrice Mélot, qu'il ne faut pas s'en tenir à une approche quantitative, car la question des plages d'audience compte aussi beaucoup. Et cela vaut aussi pour la télévision publique ; présenter un programme au milieu de la nuit est très différent que de le diffuser sur une plage de grande écoute. C'est autour de cette idée que, dans le respect de la loi et de la convention, nous orientons nos réflexions. Sachant que nous sommes également saisis d'une demande du groupe Canal+ concernant la chaîne D17, nous devons être attentifs à préserver l'équilibre.

Je remercie David Assouline de ses appréciations. Face aux polémiques dont elle peut être l'objet, une autorité indépendante se doit de rester équanime et sereine.

En ce qui concerne Numéro 23, je vous rassure. Si l'étude d'impact doit revêtir, en vertu de la loi, un caractère économique, ce qui nous importe au premier chef est le service rendu au téléspectateur. La loi de 1986, d'ailleurs, nous y invite. Le pouvoir d'agrément qu'elle nous a confié nous appelle à prendre en compte l'ensemble des critères inscrits aux articles 29 et 30-1. Nous serons, dans le respect intégral du droit, attentifs au contexte de cette affaire dont le Parlement s'est déjà saisi à travers un mécanisme de passation qui ne relève pas de notre compétence.

J'en viens à l'INA. Nous sommes convaincus qu'il est au coeur de la sphère de l'audiovisuel. Nous appelons d'ailleurs à ce que se multiplient les accords avec les grandes sociétés de l'audiovisuel public, alors qu'il a jusqu'à présent plutôt contracté avec de grandes plates-formes comme Google. Il y a là une capacité de synergie des ressources et des compétences sur laquelle la présidente de France Télévisions a insisté dans son projet stratégique. La décision relève bien sûr du législateur, mais je tenais à vous dire que tel est notre état d'esprit.

Vous vous interrogez sur la publicité des auditions dans le processus de candidature à la présidence des sociétés nationales de programmes. J'observe que lorsque la nomination relevait du Président de la République, les audiences n'étaient pas publiques. Cela étant, je n'ai pas le culte du précédent. Mais j'ai, en revanche, la préoccupation constante de la légalité des décisions prises par le CSA. Et ces décisions doivent être conformes à la loi telle qu'interprétée par la jurisprudence du Conseil constitutionnel qui, dans sa décision du 27 juillet 2000, juge que la publicité des auditions et débats serait contraire à la Constitution, car « ne serait plus assurée en pareil cas l'entière liberté de parole tant des candidats que des membres du Conseil eux-mêmes, condition nécessaire à l'élaboration d'une décision collégiale éclairée, fondée sur la seule prise en compte de l'intérêt général et du bon fonctionnement du secteur public de l'audiovisuel dans le respect de son indépendance », ajoutant qu'en outre, « la publication intégrale de ces auditions et débats pourrait porter atteinte à la nécessaire sauvegarde du respect de la vie privée des personnes concernées ». Si nous menions des audiences publiques et qu'une décision était contestée par un candidat, il suffirait qu'il invoque cela pour que la légalité de la décision soit mise en danger. La jurisprudence du Conseil constitutionnel est certes susceptible d'évoluer, mais nous ne pouvons pas le postuler.

Cela étant, nous avons clairement informé, par quatre communiqués, sur les étapes de la procédure, et lorsque nous avons décidé, parce que les membres du collège restaient partagés dans leur appréciation, de procéder à des auditions supplémentaires, nous l'avons clairement annoncé, par communiqué du 23 avril 2015. Après 17 heures d'auditions, le Conseil a pris sa décision sous trois jours, dès le 23 avril. Nous avons donc procédé dans la clarté, et selon l'approche la plus rigoureuse de la loi, qui exige une majorité de cinq voix, afin que le partage des voix ne puisse aboutir à une mise en cause de la décision.

Par rapport à la nomination à la présidence de Radio France, le collège a acté deux différences. Pour préserver la situation professionnelle de candidats qui sinon ne se seraient pas présentés, ainsi qu'ils nous l'ont précisé, nous avons permis qu'ils gardent leur candidature confidentielle. Trois candidats sur sept nous l'avaient explicitement demandé, sauf à renoncer à se porter candidats. En revanche, nous avons cette fois publié intégralement le projet stratégique et non, comme auparavant, une synthèse. Le fait est que le Parlement nous demande d'élaborer notre rapport à quatre ans au regard du projet stratégique, il était donc logique que celui-ci soit rendu public dès l'origine.

Nous attachons une extrême importance, madame Duchêne, à l'audiovisuel extérieur. Nous animons un réseau méditerranéen, un réseau francophone, et je me rendrai le mois prochain au sommet du Réseau francophone des régulateurs des médias (REFRAM), en Côte d'Ivoire, avec un certain nombre de groupes français, publics, comme France 24, ou privés, comme Canal+, pour faire valoir notre savoir-faire, comme il importe tout particulièrement au moment où l'Afrique noire bascule de la télévision analogique à la télévision numérique.

Vous m'interrogez, madame Gillot, sur la question sensible de la langue des signes et du sous-titrage. J'en profite pour rendre hommage à Nicolas About, ici présent, qui a contribué, année après année, à porter l'accent sur cette exigence, à laquelle nous consacrons beaucoup d'efforts. Il n'est pas de rapport annuel qui ne donne lieu, s'agissant des groupes soumis à notre régulation, à des questions sur ce sujet. Croyez bien, sans trahir le secret de nos délibérations, que notre souci s'est porté par anticipation sur des candidatures susceptibles de nous être présentées pour des postes vacants. Vous avez raison de souligner qu'il existe un vrai problème de qualité et il nous incombe d'engager les groupes privés à ne pas faire d'économies pour assurer le respect de l'accessibilité aux programmes des personnes souffrant d'un handicap sensoriel.

Nous sommes très sensibles à la question de la langue française, comme en témoigne le programme que nous avons mis sur pied au mois de mars, et qui faisait écho à un colloque organisé le 9 décembre au Collège de France sur ce sujet.

Pour assurer la réactivité que j'ai voulu insuffler dans le fonctionnement du CSA, nos rapports d'exécution seront établis autant que possible en cours d'année, pour éviter tout décalage fâcheux. La durée du mandat de président de France Télévisions ? Vous aurez remarqué que l'âge de la candidate désignée lui laisse la faculté de se présenter à un second mandat, même s'il n'y a pas, il est vrai, de précédent. Si je ne puis dire ce que serait la réaction du CSA dans une telle hypothèse, il reste que la possibilité en est, pour la première fois, ouverte.

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