Intervention de Abdennour Bidar

Commission d'enquête sur le service public de l'éducation, les repères républicains et les difficultés des enseignants — Réunion du 21 mai 2015 à 9h00
Audition de M. Abdennour Bidar philosophe écrivain auteur de pour une pédagogie de la laïcité à l'école 2012

Abdennour Bidar, philosophe :

Les enseignants ne demandent pas tant des circulaires plus claires que le soutien d'une équipe, d'une concertation. Si dans chaque établissement, l'équipe enseignante se réunissait régulièrement pour déterminer une attitude commune, les professeurs se sentiraient davantage engagés et soutenus. Nous invitons les équipes de direction à ouvrir des espaces de concertation. La réponse ne passe pas par une inflation réglementaire, mais par une réflexion sur la culture et les pratiques pédagogiques.

J'ai été peu sollicité par le Conseil supérieur des programmes, même si j'ai eu l'occasion de travailler avec Pierre Kahn. En revanche, le cabinet de la ministre m'a invité à intervenir sur la question de l'enseignement moral et civique. Quelle morale enseigner ? Comment l'enseigner de manière laïque ? Un enseignement doctrinal, ex cathedra, ne fonctionne pas. Il est urgent de former les enseignants à la conduite d'ateliers à visée philosophique fondés sur la discussion et la participation : les élèves seraient ainsi appelés à construire les valeurs auxquelles ils adhéreraient. On ne peut pas transmettre de morale en s'en tenant à la seule théorie. Chaque année, chaque élève doit participer, au sein d'une équipe, à une tâche morale d'intérêt général, être investi d'une responsabilité pour laquelle il sera valorisé. La réflexion sur le service civique portée par le chef de l'État s'inscrit dans le prolongement de celle sur l'école, car le jeune adulte doit comprendre dès son entrée dans le monde professionnel que l'enjeu n'est pas seulement sa réussite personnelle, mais l'intérêt général qu'il est appelé à servir.

Vous avez mentionné ma tribune dans Le Monde. J'ai conscience de la compétence limitée du philosophe, qui est une force de proposition, de réflexion, mise à la disposition du responsable politique. Certaines de mes propositions ont un caractère de prime abord très théorique, comme celle de créer un ministère de la fraternité. Je suis prêt à discuter de la meilleure façon d'incarner de telles idées dans les politiques publiques.

J'ai voulu témoigner de la bienveillance de l'institution scolaire. Ayons confiance dans notre école, dans ces personnels compétents qui prennent leur métier à coeur, qui ont le souci de transmettre des valeurs et des savoirs et de réduire les inégalités. L'école « ouverte aux parents » - c'est ainsi que nous en parlons - dit bien la nécessité d'impliquer les parents dans l'institution, à travers un dialogue permanent. Dans certains milieux, la relation de confiance n'est pas établie, comme l'a montré la fameuse « journée de retrait ». C'est à l'école de leur faire comprendre le bénéfice que les valeurs républicaines représentent pour leurs enfants, qui ont tout à y gagner.

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