Intervention de Thomas Groh

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 6 mai 2015 à 9h02
Enjeux de l'assurance vie — Stabilité financière financement de l'économie concurrence réglementaire et fiscale en europe - Audition de M. Thomas Groh sous-directeur des assurances de la direction générale du trésor Mme Sandrine Lemery secrétaire générale adjointe de l'autorité de contrôle prudentiel et de résolution M. Bastien Llorca sous-directeur du contrôle fiscal de la direction générale des finances publiques et M. Pierre de Villeneuve président-directeur général de bnp paribas cardif

Thomas Groh, sous-directeur des assurances de la direction générale du Trésor :

Le démarrage de l'euro-croissance est progressif. Les textes réglementaires ont seulement été pris à l'automne dernier. Ce produit étant complexe, il n'est pas encore commercialisé partout. Cela prend du temps, compte tenu également du contexte des taux d'intérêt. L'objectif affiché au moment de la loi de finances rectificative de 2013 consistait en une réallocation de 50 milliards d'euros, soit environ 5 % de l'encours en cinq ans des fonds en euros vers l'euro-croissance. Cette feuille de route est toujours la nôtre.

S'agissant de la baisse des taux et des risques de remontée brutale, il est important de rappeler que cette baisse affecte les assureurs et impose des évolutions stratégiques, comme l'a rappelé Pierre de Villeneuve. Cela étant, le marché français n'est pas le plus exposé - loin s'en faut. Certains pays européens, comme l'Allemagne ou les Pays-Bas, connaissent des situations bien plus dégradées, du fait de l'existence en portefeuille de contrats comportant des taux de garantie élevés, alors que dans le cas français, grâce aux règles prudentielles spécifiques, le taux garanti moyen est inférieur à 1 %. Cela laisse beaucoup plus de marges de manoeuvre aux compagnies d'assurance.

Le risque demeure en cas de remontée brutale des taux. Je ne suis pas sûr que ce soit aujourd'hui le scénario central, étant donné la politique monétaire qui est conduite, mais il existe des règles prudentielles spécifiques au marché français qui pourront perdurer. Elles interdisent par exemple aux assureurs de vendre une obligation avant échéance, de réaliser une plus-value et de la distribuer immédiatement aux assurés, ce qui n'est pas le cas de tous les pays européens. Cela appelle une gestion financière particulièrement prudente, qui limite la fragilité financière des assureurs. Nous suivons cela de très près, en lien avec l'ACPR, et réfléchissons à des évolutions réglementaires pour consolider le système.

En matière d'innovation, nous conservons une très grande prudence et demeurons très attentifs. Il faut garder à l'esprit que la libéralisation des investissements des assureurs, qui a été décidée et qui se poursuivra avec Solvabilité 2, a grandement renforcé les règles de gouvernance et de publicité. Le rôle du conseil d'administration est accru. L'ACPR détiendra de nouveaux pouvoirs. Les assurances devront respecter un principe de prudence. L'idée est de ne pas faire n'importe quoi ; les assureurs en sont tout à fait conscients.

La politique proposée par le Gouvernement a consisté jusqu'ici à ne pas alourdir la fiscalité de certains types de contrats d'assurance vie, et de jouer plutôt sur d'autres leviers - réglementaires, prudentiels -, de capitaliser sur l'intérêt bien compris de chacun de faire émerger de nouveaux produits, en diversifiant et en renforçant l'économie.

Enfin, nous portons aux retraites complémentaires une grande attention, comme le Premier ministre l'a bien expliqué il y a quelques semaines en présentant les mesures destinées à relancer l'investissement.

Les activités de retraite supplémentaire spécifiques peuvent être exemptées des règles de Solvabilité 2 jusqu'à 2019 - et sans doute 2022 dans l'état actuel de la négociation - ce qui recouvre, en France, tous les contrats collectifs à prestations définies : articles 39, article 83, contrats Madelin, etc. Il s'agit donc d'une règle temporaire globale.

Il existe en outre dans Solvabilité 2 des règles prudentielles spécifiques, au-delà de cette échéance, qui s'appliquent à des régimes cantonnés, avec de moindres charges prudentielles.

Au-delà, la France pousse pour que les conditions de concurrence et les règles prudentielles entre les fonds de pension et les assureurs puissent converger au maximum, même si certains de nos partenaires européens sont prudents en la matière.

On dispose aussi de leviers nationaux, sur lesquels nous travaillons aujourd'hui, pour améliorer l'encadrement réglementaire de certains régimes - retraite par points, etc. - dont le cadre spécifique français doit être modernisé et mis en cohérence avec Solvabilité 2. Rien n'est décidé, mais nous y réfléchissons.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion