Intervention de Christian Eckert

Commission d'enquête coût économique et financier de la pollution de l'air — Réunion du 23 juin 2015 à 16h30
Audition de M. Christian Eckert secrétaire d'état chargé du budget au ministère des finances et des comptes publics

Christian Eckert, Secrétaire d'État chargé du Budget au Ministère des Finances et des Comptes publics :

Monsieur le Président, Madame la Rapporteure, Mesdames et messieurs les Sénateurs, vous avez souhaité m'interroger sur le coût économique et financier de la pollution de l'air dans le cadre de votre commission d'enquête. Je répondrai à toutes vos questions mais permettez-moi, en introduction, de rappeler l'engagement du ministère des finances et des comptes publics sur cette question qui nous concerne tous.

Aujourd'hui, le coût économique et financier de la pollution de l'air est mesuré et connu. En France, il a ainsi été évalué que la hausse de la mortalité, mesurable en nombre de décès prématurés et de la morbidité, comme des nouveaux cas de bronchite chronique ou des journées d'activité restreinte dues à la pollution atmosphérique représentent un coût entre 20 et 30 milliards d'euros par an, d'après une étude conduite en 2013 par le Commissariat général au développement durable. C'est un chiffre qu'il n'est pas aisé d'interpréter car il représente, en grande partie, une perte de bien-être pour les individus, qui est converti en valeur monétaire. C'est toutefois un signal qui ne peut pas être ignoré et que nous n'ignorons pas.

Le ministère des finances et des comptes publics agit, en effet, à tous les niveaux. Le Gouvernement a engagé une politique novatrice, réaliste et volontaire pour faire évoluer la fiscalité environnementale. Nous avons, en effet, concrétisé une réforme importante et, je crois, structurante, au travers de la mise en oeuvre de la contribution climat/énergie, votée fin 2013. Alors que le précédent gouvernement avait échoué à mettre en place une taxe carbone, nous sommes parvenus à prendre en compte le coût du carbone dans la consommation des énergies. Cette réforme introduit une évolution des tarifs de taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) qui tient compte, pour chaque produit énergétique, de ses émissions en carbone, selon une trajectoire intégrant une valeur de la tonne de carbone. Celle-ci a été fixée à 7 euros par tonne en 2014, à 14,5 euros par tonne en 2015 et à 22 euros en 2016. Le Gouvernement a également fait significativement évoluer la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) depuis 2012, en particulier pour sa composante « émissions polluantes ». Aujourd'hui, l'émission de 18 substances est taxée avec des taux compris entre 5 euros par kilogrammes pour le zinc et le cuivre et 510 euros par kilogramme pour l'arsenic.

Nous contribuons aussi au financement de la transition énergétique. Le projet de loi relatif à la transition énergétique est en cours de discussion et sera accompagné par la mise en place d'un fonds exceptionnel de 1,5 milliard d'euros sur trois ans pour financer des actions d'accompagnement, notamment au travers d'appels à projet en faveur des territoires. En 2014, environ 700 millions d'euros ont été consacrés au financement des énergies renouvelables. Ces exemples d'initiatives ne sont pas directement liés à l'amélioration de la qualité de l'air, mais y contribuent indirectement, car il est nécessaire de consacrer des moyens à l'innovation pour permettre d'imaginer des solutions acceptables par tous. Enfin, la lutte contre le changement climatique est un enjeu mondial. En tant qu'hôte de la COP21, la France a pour objectif de parvenir à un accord ambitieux en décembre en ce qui concerne la lutte contre le changement climatique. A cet égard, la question du financement climatique est tout à fait centrale et fera partie de l'Accord et des décisions qui l'accompagneront. La stratégie définie conjointement par Michel Sapin avec son collègue péruvien Alonso Segura s'appuie sur deux piliers : le premier concerne la crédibilisation des engagements passés, et plus particulièrement le respect de ceux pris à Copenhague d'atteindre la cible de 100 milliards de dollars USD par an d'ici 2020 de financements climat, publics et privés, des pays développés vers les pays en développement ; le deuxième pilier concerne la réorientation de l'ensemble des flux financiers pour le financement d'économies bas-carbone et résilientes, ce qui passe notamment par une prise en compte des risques climatiques par l'ensemble du système financier mondial.

Enfin, nous faisons en sorte que le cadrage budgétaire puisse tenir compte des enjeux liés à la pollution de l'air, et permette de préparer l'avenir. Une prime de 10 000 euros a, par exemple, été mise en place en avril de cette année pour inciter au remplacement des vieux véhicules diesel par des véhicules électriques et ainsi moderniser la composition de notre parc automobile. Par ailleurs, le CICE et le pacte de responsabilité et de solidarité représentent en tout 40 milliards d'euros redistribués aux entreprises d'ici 2017, afin que celles-ci puissent restaurer leurs marges. Cet effort sans précédent doit permettre aux entreprises des secteurs concernés d'investir pour préparer la transition écologique.

Le Gouvernement mène donc des actions ambitieuses et résolues sur ces questions depuis 2012, et, je le dis comme je le pense, le ministère des finances et des comptes publics fait tout pour accompagner ce mouvement. C'est d'ailleurs moi-même qui suis venu devant votre assemblée pour soutenir la proposition de loi issue du groupe écologiste visant à instaurer des indicateurs de qualité de vie pour compléter le Produit intérieur brut (PIB). Cette proposition a été adoptée à l'unanimité et c'est, je pense, un signal positif. La communication et la pédagogie autour de ces questions me semble en effet essentielle, car ce sujet ne peut avancer que progressivement, et par le consensus.

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