Intervention de Patrick Bloche

Commission mixte paritaire — Réunion du 15 septembre 2015 à 17h45
Proposition de loi n° 140 2014-2015 relative au deuxième dividende numérique et à la poursuite de la modernisation de la télévision numérique terrestre

Patrick Bloche, président et rapporteur pour l'Assemblée nationale :

Je remercie la présidente Morin-Desailly pour sa présentation qui nous a permis d'entrer dans le vif du sujet et de bien comprendre les points encore en discussion.

Je me félicite du travail réalisé par la CMDA qui a permis d'aboutir à cette proposition de loi. Je tiens à rappeler que ce sont les parlementaires, tant sénateurs que députés, qui sont à l'origine de cette commission, créée par la loi du 15 novembre 2013 relative à l'indépendance de l'audiovisuel public.

L'objet de cette proposition de loi, s'il peut paraître au premier abord essentiellement technique, est en réalité particulièrement sensible et important puisqu'il concerne la façon dont les Français vont pouvoir continuer à recevoir la télévision hertzienne dès le printemps 2016. La quasi-totalité de nos concitoyens est donc concernée.

Conscientes de ces enjeux, nos deux assemblées se sont avant tout attachées, en première lecture, à ce que le texte prévoie les meilleures conditions possibles de mise en oeuvre de la mutation technologique que représente pour la TNT la libération de la bande de fréquences des 700 MHz.

L'adoption de ce texte est urgente car la généralisation de la norme MPEG-4 à compter d'avril 2016 doit rapidement donner lieu à une large campagne de communication pour que l'ensemble de nos concitoyens comprenne bien la portée de ce changement et soient accompagnés, pour les plus fragiles d'entre eux, dans cette transition.

Il ne faut pas non plus occulter les enjeux budgétaires de ce changement. L'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP) a d'ores et déjà lancé la procédure de mise aux enchères des fréquences libérées sur la bande des 700 MHz, qui seront ainsi réaffectées aux opérateurs mobiles. Les recettes attendues de cette transaction démontrent aisément l'importance d'une adoption rapidement de cette proposition de loi.

À l'issue des travaux du Sénat, 10 articles sont encore en discussion. Plusieurs apportent des avancées positives sur lesquels notre commission mixte paritaire devrait pouvoir s'accorder sans difficulté. Je tiens d'ailleurs à féliciter le Sénat pour sa contribution sur ce texte car il a toujours gardé à l'esprit les exigences d'aménagement du territoire et s'est efforcé de garantir une couverture maximale sur l'ensemble des régions.

Quelques modifications opérées sur le texte adopté par l'Assemblée me paraissent en revanche moins satisfaisantes : nous les évoquerons au fur et à mesure de la discussion. Je citerai simplement dès maintenant les deux points qui me paraissent les plus sensibles :

- à l'article 2, la question de l'information de la CMDA sur le déroulement du calendrier de transfert de la bande des 700 MHz,

- et à l'article 8 bis A, le problème de l'éventuelle indemnisation des opérateurs techniques de diffusion à la suite de la fermeture de deux multiplexes de la TNT.

Au sujet de l'éventuel préjudice supporté par les chaînes et les diffuseurs, les parlementaires se sont heurtés à la contrainte de l'article 40 qui rendait impossible l'adoption d'un amendement fixant des modalités d'indemnisation par l'État car cela conduisait à augmenter les dépenses publiques. Comme vous l'a indiqué Mme Morin-Desailly, nous ne pouvons pas vous diffuser l'intégralité des conclusions du rapport de l'IGF sur cette question de l'indemnisation. Je peux toutefois vous indiquer qu'il paraît très complexe de régler cette question par voie législative car la réalité du préjudice est très variable selon les acteurs économiques concernés. Parmi les trois diffuseurs TDF, Tower Cast et Itas Tim, c'est surtout ce dernier qui subira les conséquences les plus dommageables. En revanche pour les éditeurs de chaînes de télévision, l'IGF estime que le texte en discussion aura un faible impact car cette réforme entrainera de fait des économies, notamment en réduisant les frais de diffusion.

En tout état de cause, l'État devrait faire le nécessaire pour que la question de l'indemnisation des diffuseurs soit réglée de la façon la mieux adaptée dans les prochains mois.

Le Sénat a par ailleurs ajouté un article 6 bis visant à limiter les possibilités de « reventes » de fréquences TNT. L'agrément donné par le CSA à une modification du contrôle direct ou indirect de la société titulaire de l'autorisation devra ainsi « prendre en compte » le respect des obligations de programmation par l'éditeur du service durant les deux années précédentes. Il s'agit bien ici d'assurer une gestion optimale de la ressource publique rare que constituent les fréquences et de favoriser la modernisation de la télévision numérique terrestre. Je vous proposerai de conserver cet article introduit par le Sénat en le complétant par un II reprenant l'article 264 de la loi Macron, annulé par le Conseil constitutionnel, sur la taxation des plus-values réalisées lors de la session de chaînes TNT.

Au total, il me semble que notre CMP devrait parvenir à s'accorder sur un texte commun pour cette proposition de loi, dont l'adoption rapide est attendue par tous les acteurs concernés.

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