Intervention de Raffaele Russo

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 1er juillet 2015 à 9h03
Diplomatie fiscale de la france en faveur de ses entreprises — Auditions de Mme Catherine Henton directeur fiscal de sanofi-aventis Mm. édouard Marcus sous-directeur de la prospective et des relations internationales à la direction de la législation fiscale dlf et raffaele russo chef du projet beps centre de politique et d'administration fiscales de l'ocde

Raffaele Russo, chef du projet BEPS au centre de politique et d'administration fiscales de l'OCDE :

BEPS n'est pas né uniquement du scandale des GAFA mais d'une période de crise, de hausse des impôts et d'austérité ; des journalistes, des commissions d'enquête ou tout simplement la société civile ont dénoncé les montages légaux par lesquels des entreprises déplacent leurs bénéfices dans des pays où elles n'ont aucune activité. Très vite, certains pays ont réagi unilatéralement et sans coordination. Par exemple, la Mongolie a dénoncé ses conventions fiscales, au motif qu'elle ne parvenait plus à collecter suffisamment d'impôts.

Le problème ne vient pas des entreprises, il vient des règles. Or ces règles n'ont pas changé depuis un siècle. Il faut donc tout réexaminer, le faire ensemble, tous en même temps. Tout est mis sur la table : les prix de transferts, les conventions bilatérales contre la double imposition, les dispositions de loi interne ayant un impact direct sur la fiscalité internationale, la déductibilité des intérêts... Un de vos concurrents, un groupe pharmaceutique, a une dette extérieure de 800 millions d'euros et une dette interne de 10 milliards d'euros ! Les pays du G20, ceux de l'OCDE et certains pays en voie de développement travaillent donc de concert à réformer ces règles ; ces pays représentent environ 90 % du PIB mondial.

Nous avons beaucoup écouté les parties prenantes : en un an et demi, nous avons reçu plus de 12 000 pages de commentaires et tenu 21 consultations publiques. Nous présenterons les résultats de nos travaux en novembre. Certes, il n'y a pas de consensus. Peut-être en avons-nous donné à tort l'impression en publiant des versions provisoires de nos textes, qui intégraient toutes les propositions. En novembre 2015, soit il y aura un consensus, soit il n'y aura rien.

Nous avons beaucoup avancé sur les prix de transferts. Une lecture formaliste des règles actuelles aboutit à ce que 2 000 milliards de dollars soient stockés aux Bermudes. Mais respecte-t-elle l'esprit des contrats ? Dans l'application d'un contrat, il faut se tenir à égale distance de l'interprétation littérale et de la méconnaissance. Nous sommes déjà parvenus à un accord sur la manière de taxer les bénéfices tirés de la présence sur un marché où des synergies internes à un grand groupe. Notre but principal est de prévenir les doubles impositions, mais aussi les doubles non-impositions !

La concurrence fiscale doit être encadrée. Les patent boxes, par exemple, doivent être réprimées si elles visent uniquement à attirer artificiellement des bénéfices. Si elles attirent des activités de R&D, aucun problème ! Certes, la complexité des normes n'arrange rien. Chacun veille à ne pas être le premier à les appliquer. Comme disent les Anglais, il faut se jeter tous ensemble dans la piscine.

Après novembre 2015, il faudra aider chaque pays à mettre en oeuvre les nouvelles mesures et surveiller leur application, tout en menant à leur terme les discussions techniques sur une nouvelle convention multilatérale et en modifiant les conventions bilatérales en cours. Des changements fondamentaux sont à l'oeuvre, malgré les divergences entre les pays associés aux discussions, qui sont plus de quarante. Les nouvelles mesures qui seront arrêtées auront un impact sur la fiscalité des entreprises. Ainsi, les États pourront baisser les impôts et favoriser l'investissement de façon transparente.

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