Intervention de Régis Debray

Commission d'enquête sur le service public de l'éducation, les repères républicains et les difficultés des enseignants — Réunion du 7 mai 2015 à 9h00
Audition de M. Régis deBray philosophe auteur du rapport l'enseignement du fait religieux dans les écoles laïques février 2002

Régis Debray :

Je note que l'uniforme scolaire n'est pas ressenti par les élève comme une brimade, mais qu'il engendre un sentiment d'appartenance pouvant même aller jusqu'à une certaine fierté. S'agissant de verticalité, nous pourrions rétablir l'estrade. Ceci n'est qu'une demi-boutade, car je pense que l'estrade favorise la transmission à l'élève par le maître qui doit être respecté, ce qui malheureusement n'est pas toujours le cas aujourd'hui. L'enseignant n'est pas respecté par son administration. Il l'est de plus en plus difficilement par ses élèves, dont les critères de prestige sont moins liés au savoir qu'à l'argent et à la notoriété.

L'école aussi devrait être plus respectée, car elle ne délivre pas un service public ou une prestation comme, par exemple, la RATP et les élèves ne sont ni des usagers, ni des clients. L'école doit rester une institution, caractérisée notamment par une enceinte et un règlement. En cela est comparable à l'armée, l'école et l'armée étant deux piliers de la République dont les sorts sont liés.

Le recul du sentiment national est un immense sujet. L'économie semblant tout gouverner, d'aucuns se sont interrogés sur l'avenir des nations. Le recul des nations devait céder le pas à la gouvernance mondiale, or ce sont les tribus qui semblent émerger, les soubassements culturels et psychologiques d'individus en perte des repères favorisant la résurgence des archaïsmes. Sur le sentiment national, permettez-moi de vous renvoyer aux excellentes réflexions de Kamel Daoud.

La guerre constitue une situation renforçant le sentiment national. Le « nous » s'affirme alors face à un « eux ». Mais quelle guerre entreprendre ?

L'illusion européenne disait que les nations allaient devenir centrées dans le domaine des folklores, mais ce n'est pas ce qui se passe. La question du sentiment national est capitale, d'abord parce que c'est l'unique cadre démocratique. Ensuite, plus on perd ses anciens ancrages, plus on a besoin de s'identifier. Le problème, c'est que le sentiment national ne se décrète pas, il se sécrète, comme les religions et les langues. On peut le favoriser, c'est tout.

Il faudrait d'abord que les pouvoirs publics montrent l'exemple, en faisant apprendre l'histoire de France - un gros mot ! Aujourd'hui on apprend l'histoire de l'alimentation, des transports, mais la chronologie c'est ringard, alors la France... C'est difficile, mais c'est pourtant vital.

1 commentaire :

Le 23/09/2023 à 12:09, aristide a dit :

Avatar par défaut

"Je note que l'uniforme scolaire n'est pas ressenti par les élève comme une brimade, mais qu'il engendre un sentiment d'appartenance pouvant même aller jusqu'à une certaine fierté."

C'est en effet une très bonne idée pour dissimuler son islamophobie, son racisme et son antisémitisme.

Vous trouvez ce commentaire constructif : non neutre oui

Inscription
ou
Connexion