Intervention de Daniel Keller

Commission d'enquête sur le service public de l'éducation, les repères républicains et les difficultés des enseignants — Réunion du 19 mars 2015 à 9h00
Audition de M. Daniel Keller grand maître du grand orient de france

Daniel Keller, Grand maître du Grand Orient de France :

L'idée d'un enseignement laïque du fait religieux me laisse sceptique : il est normal que les religions soient enseignées à l'école, mais dans les cours d'histoire ! Il me semble d'ailleurs que c'est le cas. Promouvoir un enseignement laïc du fait religieux contrevient à la nécessité de restaurer les valeurs républicaines à l'école. Au contraire, il faut mettre à distance ces religions qui monopolisent le débat public, comme si les questions qui leur sont propres étaient devenues l'horizon de toute réflexion, et enseigner l'histoire et le sens des valeurs républicaines.

La charte de la laïcité en milieu scolaire est bienvenue. Pour être appliquée, il faut que chacun se l'approprie, ce qui réclame un enseignement adapté. Déjà, l'école célèbre la laïcité chaque 9 décembre. J'espère que l'Assemblée nationale finira par voter, comme l'a fait le Sénat, une résolution parlementaire consacrant cette date journée nationale de la laïcité - non fériée. Cela ne changera pas le droit, mais aurait une valeur symbolique importante, comparable à la commémoration des quarante ans de la loi Veil sur l'interruption volontaire de grossesse.

L'argent public doit aller prioritairement, et même exclusivement, à l'école publique, qui en a bien besoin pour accomplir son dur métier. Avons-nous bien fait de mettre l'élève au coeur du projet pédagogique ? L'autorité est une valeur républicaine qui doit revenir à l'école. Nous devons recréer une relation de transmission entre le maître et l'élève. L'enseignant n'est pas un prestataire de services : il s'agit d'un métier de vocation. La communauté enseignante, sentinelle de la République, doit donc se sentir soutenue et retrouver le prestige qu'elle n'aurait jamais dû perdre.

La laïcité n'est pas plurielle : c'est un principe d'organisation, qui nous distingue de théocraties comme il en existe ailleurs dans le monde. Chez nous, la religion est une affaire privée, parfaitement respectable du reste. C'est cette rupture entre le politique et le religieux que nous devons faire comprendre à toutes les familles. La laïcité ne doit pas être la rançon de l'échec économique et social des populations les plus fragiles. Elle ne règlera pas tout !

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