Je vous remercie, madame la présidente, de nous permettre d'évoquer ces questions. La candidature française à l'organisation des Jeux olympiques de 2024 est le fruit d'un engagement qui a nécessité un travail important. Cette candidature traduit une ambition responsable et mesurée, mais une ambition tout de même, car pour vaincre il faut être convaincu que l'on porte les bonnes propositions.
Nous sommes confrontés au défi de convaincre du bien-fondé de notre candidature les 102 membres du Comité international olympique (CIO), qui sont issus de tous les horizons et de tous les pays, et qui constituent un public qui n'est pas habituellement le nôtre.
Pour ce faire, il nous a fallu établir une nouvelle stratégie initiale, s'inspirant notamment des échecs passés. Sachez qu'un bilan extrêmement détaillé et précis de la candidature de Paris pour les Jeux de 2012 a été établi et diffusé auprès des ministères concernés. Je regrette qu'il n'ait pas été porté à votre connaissance. Ce rapport a mis en évidence les atouts de cette candidature, mais surtout ses failles et ses erreurs.
Nous avons choisi de rester proches du schéma établi par la candidature victorieuse de Londres pour les Jeux olympiques de 2012. Cette organisation, qui a montré la voie, s'est d'ailleurs beaucoup inspirée de la candidature parisienne. Tout d'abord, avec son slogan « inspire a generation », la candidature de Londres a transformé la façon d'aborder les Jeux. Ensuite, Paris et Londres sont deux capitales européennes qui partagent beaucoup de caractéristiques communes.
Le parallèle avec les Jeux de Londres nous a permis d'établir l'opportunité d'une telle candidature. Ces Jeux ont d'abord été un événement attractif et universel, de portée mondiale - puisque 204 nations ont été représentées par près de 15 000 athlètes - et au fort retentissement médiatique, puisqu'ils ont donné lieu à 100 000 heures de diffusion télévisée suivies par 3,7 milliards de téléspectateurs. Il s'agit également un événement populaire et mobilisateur, attirant 70 000 volontaires dont 40 % s'engageaient pour la première fois et 98 % se disaient prêts à poursuivre leur engagement bénévole. On le voit bien, l'amplitude des Jeux dépasse celle d'un simple événement sportif.
Le précédent des Jeux de Londres nous enseigne que ses retombées ne se limiteront pas à Paris et aux Franciliens, mais que les Jeux profiteront à l'ensemble de la population française. Les Jeux constituent en effet un événement pour tous les publics et les territoires, notamment par la vente de 2,5 millions de billets à bas prix et la distribution de 340 000 autres à des oeuvres caritatives. Les Jeux de Londres ont eu une portée nationale grâce à l'installation de « live sites », soixante-dix sites permettant de suivre sur grand écran les compétitions et qui ont attiré 8 millions de personnes. Un important effort a été réalisé en matière d'éducation, via le programme « Get set » auquel 85 % des écoles britanniques ont participé et qui a permis de sensibiliser 6,5 millions d'élèves aux valeurs du sport : le respect des règles et de l'arbitre, le respect de l'autre, l'effort. Ce programme d'éducation n'est pas limité à la durée des Jeux et se poursuit. Voilà ce qui fait la force des Jeux.
Quelles seront les retombées des Jeux olympiques à Paris ? Les Jeux constituent un événement rassembleur et générateur d'énergie, notamment par la mobilisation de volontaires - pour lesquels il existe en France un véritable savoir-faire, ainsi que j'ai pu le constater à l'occasion de la Coupe du monde de rugby de 2007. Outre leur contribution directe à l'organisation des événements, ces volontariats permettent aux bénévoles d'apprendre des métiers et de mettre en oeuvre de véritables stratégies professionnelles. Les Jeux olympiques de Londres ont été l'occasion d'une promotion des savoir-faire britanniques, via l'initiative « Britain is great » qui a permis d'accueillir 4 000 dirigeants économiques issus de 63 pays. Ils ont permis la rénovation urbaine de certains quartiers de l'Est de Londres, notamment par la création d'un quartier high-tech réunissant trois cents sociétés qui emploient 10 000 personnes. Au total, on estime à quatorze milliards de livres sterling d'activité économique en deux années les retombées économiques des Jeux de Londres. Tout laisse à penser que l'organisation des Jeux de 2024 à Paris générerait à des retombées d'une ampleur comparable.
J'insiste sur le fait que les Jeux olympiques sont un projet global ; ils ne se limitent pas aux seuls événements sportifs : l'organisation des Jeux de Londres de 2012 a débuté en 2008 et certaines retombées de l'événement perdurent en 2015.
Nous avons instauré douze groupes de travail, 250 personnes de tous horizons, des responsables politiques, des représentants de l'État, des territoires, des entreprises, des associations, des fédérations syndicales, du Medef, des athlètes représentés dans chaque groupe de travail.
Il est important de développer l'engagement citoyen, de trouver des motivations pour que les Français se mobilisent. En tant que sportifs, nous ressentons un manque d'adhésion, y compris dans nos associations. Le doute s'installe, la morosité est présente. Il y a un besoin de développer des éléments du « vivre ensemble », de cohésion, de dépasser ses propres limites ou l'environnement dans lequel on vit. La réussite du grand Paris des Jeux passe par l'animation des territoires. Ne nous contentons pas de l'environnement de proximité. Appelons à une mobilisation afin de créer une unité derrière un projet, d'éviter les divisions, pour travailler sur un concept qui rende les choses possibles et l'attractivité de la France, à l'international, beaucoup plus forte. Pour nous, c'est une considération majeure. Au CIO, face à des personnes qui ont des responsabilités dans leur pays, montrons que la France a de l'ambition, de l'ordre, de la méthode et sait réussir.
S'agissant des capacités techniques et financières, des coûts importants sont apparus dans certaines candidatures en raison du manque d'équipements. Nous avons une chance extraordinaire dans ce domaine, pour deux raisons.
Premièrement, la transposition des équipements existants pour l'organisation des Jeux ne représente pas un coût supplémentaire. 95 % des équipements sportifs, disponibles, accessibles et de bonne référence, sont déjà en place. Pour les sports où les structures font défaut, nous allons combler le manque. Le stade de France aura sans doute en partie besoin d'une rénovation. Les plus grands nageurs du monde étant tous basés à Marseille, pour améliorer encore les performances de nos nageurs, nous allons faire en sorte que Paris et l'Ile-de-France disposent d'une piscine olympique qui pourra s'appuyer sur une structure modulable pour en amortir les coûts d'entretien au-delà de la période des Jeux, à l'instar des Londoniens qui ont su tirer parti de leur piscine olympique après les Jeux de 2012.
Deuxièmement, nous avons besoin de valoriser notre patrimoine. Le Grand Palais, par exemple, accueille régulièrement des compétitions d'escrime de niveau international. Un schéma d'aménagement s'impose pour organiser les transports et l'accueil. À l'occasion des Jeux olympiques de Sotchi, Vladimir Poutine a souhaité que les nouvelles infrastructures profitent à cette ville pour en faire une plateforme touristique. À Paris, l'enjeu en matière d'investissements dépend des stratégies politiques souhaitées par les représentants de l'État. Il faut considérer que les Jeux paient les Jeux. Sur quatre milliards d'euros investis pour les Jeux olympiques, deux milliards sont financés par le CIO, un milliard par la billetterie et un milliard par les entreprises par le biais des partenariats. En dehors du financement des Jeux paralympiques, les investissements publics n'interviennent pas. L'Ile-de-France n'est pas très bien pourvue en matière d'équipements sportifs pour les handicapés. La question doit se poser dès à présent, de savoir si l'on veut rentrer dans les normes européennes. La tenue des Jeux ne pourrait que favoriser la reconnaissance des besoins des personnes handicapées.
L'attractivité très forte de Paris à l'international, constitue une autre raison en faveur de la candidature française. Nous devons en jouer, à condition de bien mesurer les limites à ne pas dépasser dans la promotion du projet, en évitant une arrogance qui friserait le ridicule. Il faut convaincre et faire du lobbying.
Pour conclure je dirai que la France est en mesure de concevoir un projet olympique responsable et ambitieux avec des investissements raisonnables. Elle dispose de réels atouts pour faire la différence dans cette compétition internationale.