N'y a-t-il de compétences que chez les personnalités issues de la finance privée ? Non, évidemment. Il se trouve que trois anciens Gouverneurs de la Banque de France, Jean-Claude Trichet, Michel Camdessus et Jacques de Larosière, sont issus du service public. Ils ont affirmé que mon parcours mixte leur paraissait compatible avec l'indépendance requise par l'exercice de ces fonctions. D'ailleurs, j'ai effectué les deux tiers de ma vie professionnelle dans le service public. Ceux qui me connaissent savent que la fibre du service public est bien ancrée en moi, et je ne crois pas, en travaillant dans la banque de détail en France et en Europe, m'en être tellement éloigné. Je ne ferai aucun commentaire sur la décision du tribunal relative à François Pérol, mais je souligne qu'il s'agit du cas d'une personne passant du public à une responsabilité bancaire. Pour moi, il s'agit de quitter la banque et tous les liens que je pouvais y avoir pour me remettre au service de mon pays. Cela représente un certain nombre de renoncements : c'est normal, mais pas si fréquent.
La lettre d'engagement que je vous ai envoyée résulte d'une étude assez précise que j'ai faite, avec des juristes, de l'ensemble des dispositions en droit français relatives à ma situation. J'en ai fait la réunion, au sens mathématique du terme. Personne ne m'a proposé d'engagement supplémentaire que je puisse prendre. Ces engagements gêneront-ils l'exercice de mes fonctions ? Je ne le crois pas. Le collège de l'ACPR est certes présidé par le Gouverneur, mais il ne traite que de questions transversales. Les décisions individuelles relèvent de trois collèges : un collège bancaire, présidé par un sous-gouverneur nommé pour six ans par décret en conseil des ministres ; le collège des assurances, présidé par un vice-président ad hoc de l'ACPR ; et une commission des sanctions, présidée par un conseiller d'État, et dans laquelle le Gouverneur ne siège pas. Celui-ci n'est donc pas, sauf circonstances exceptionnelles, en situation de prendre des décisions individuelles concernant une banque. Je me suis appliqué la règle des deux ans à titre de précaution supplémentaire car l'article L. 612-10 du code monétaire et financier la prévoit pour l'ACPR.
Quid si une crise grave devait frapper BNP Paribas d'ici au 1er mai 2017 ? Il s'agirait de circonstances absolument exceptionnelles : même lors de la pire crise financière que nous avons connue depuis des décennies, cela ne s'est pas produit. Si nous en étions à une situation de résolution de BNP Paribas, il y aurait des problèmes beaucoup plus graves que mon éventuel conflit d'intérêts ! Dans ce cas, je reviendrais, si vous le souhaitez, devant chacune des deux commissions pour prendre vos instructions. S'il devait se produire un contentieux américain similaire à celui que vous avez évoqué, je ne m'en occuperais pas.
Je me méfie des débats trop simplifiés opposant l'offre et la demande. Le bon sens indique qu'il faut à la fois une politique d'offre et une politique de demande. Actuellement, la demande est soutenue par la faiblesse du prix du pétrole et par celle de l'inflation, qui favorise le pouvoir d'achat - qui augmente à un rythme annuel de 1 % en France -, tout comme les taux d'intérêts très bas. Ces circonstances favorables entraînent une amélioration conjoncturelle mais ne suffisent pas à enclencher une franche reprise. Comment transformer l'essai ? Par l'investissement, qui a le mérite de réunir les partisans de l'offre et de la demande ! Ce qui stimule l'investissement, outre la demande anticipée, c'est la confiance des entrepreneurs, qui nécessite un travail de simplification et de stabilisation des règles et des normes, et les perspectives de rentabilité, surtout pour les PME. À cet égard, le pacte de responsabilité et le CICE vont dans le bon sens, pour le financement des PME et donc la consolidation de la croissance.