Intervention de Nicolas Revel

Commission des affaires sociales — Réunion du 14 octobre 2015 à 9h00
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 — Audition de M. Nicolas Revel directeur général de la caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés

Nicolas Revel, directeur général de la Cnam :

Comme vous m'y invitez, j'aborderai successivement le contenu du PLFSS 2016 et l'actualité conventionnelle.

Le PLFSS 2016, tout d'abord, s'inscrit dans la trajectoire budgétaire et financière prévue et comporte une réforme importante, la protection universelle maladie (Puma).

L'Objectif national des dépenses d'assurance maladie (Ondam) est fixé à 1,75 % conformément au programme de stabilité arrêté ce printemps et aux travaux triennaux menés par les ministères sociaux et la Cnam pour freiner la progression des dépenses d'assurance maladie. Je rappelle que l'Ondam 2015 était fixé à 2,05 % et que le tendanciel des dépenses est évalué à 3,6 %.

Si l'on regarde les sous-objectifs prévus pour 2016, les établissements de santé ont un taux de progression de 1,75 %, le medico-social de 1,9 % et la médecine de ville de 1,7 %.

Jusqu'à présent, l'objectif de ville a toujours été supérieur de 0,2 point à celui des établissements de santé. En fait, le PLFSS comporte une mesure d'économie de 270 millions d'euros, liée à l'abaissement du taux des cotisations des professionnels de santé affiliés au régime des praticiens et auxiliaires médicaux conventionnés dont l'assurance maladie assume en quasi-totalité la prise en charge (9,7 sur 9,8 %). Ce taux est réduit en deux ans à 6,5 % dont 6,4 % pris en charge par l'assurance maladie. Cette économie ne retire rien à la couverture des professionnels concernés. Elle vient cependant minorer l'Ondam de ville qui, corrigé de cette mesure, atteint un taux d'évolution de 2 % pour 2016. Il y aura donc bien une évolution plus rapide des dépenses de ville, liée, notamment, au virage ambulatoire.

Au total, l'Ondam représente un effort de maîtrise de 3,4 milliards d'euros. Pour y parvenir le PLFSS détaille quatre blocs de mesures qui correspondent au plan triennal Ondam 2015-2017 :

- une action sur le coeur de la dépense hospitalière portant sur la masse salariale, les achats, les établissements en difficulté et la liste en sus. Une économie de 690 millions d'euros en est attendue ;

- la poursuite des actions en faveur du virage ambulatoire et de la pertinence des soins hospitaliers pour 465 millions ;

- la limitation des dépenses liées aux produits de santé avec une action sur les prix et sur la rémunération des pharmaciens au titre de la substitution des génériques ;

- l'amélioration de la pertinence et du bon usage des soins grâce à laquelle 1,2 milliard d'économie sont attendues. Des actions sont prévues spécifiquement pour certaines professions : la biologie au travers d'accords prix/volume et la radiologie pour laquelle un accord a été conclu. D'autres le sont sur les prescriptions médicales afin de contrôler le nombre des arrêts maladie et l'iatrogénie médicamenteuse. Des actions sont également envisagées dans le cadre du contrat d'accès aux soins.

S'agissant de l'année 2015 nous ne disposons pour le moment que d'une vision sur les huit premiers mois de l'année car l'Ondam est construit non sur les remboursements mais sur les soins délivrés. Le comité d'alerte a toutefois validé le fait que l'objectif de 2,05 % sera tenu. On constate en effet une décélération des dépenses. 2014 a été marqué par l'impact des nouveaux traitements contre l'hépatite C en matière de rétrocession hospitalière. Leur coût s'est élevé à 700 millions en 2014. Leur impact, encore sensible au premier semestre 2015, est désormais stabilisé avec un nombre de patients d'environ 14 000 par an. Il n'y a, par ailleurs, pas encore sur le marché de traitements innovants d'un coût comparable à celui de l'hépatite C.

La mise en place de la protection maladie universelle découle du constat que toute personne a droit aux prestations en nature mais que les règles actuelles de contrôle mobilisent beaucoup d'effectifs des caisses et peuvent conduire à mettre les assurés en situation de « droits à justifier », ce qui peut conduire à l'impossibilité de remettre à jour leur carte Vitale.

Il s'agit donc d'une mesure de simplification pour les assurés et pour les professionnels de santé qui leurs délivrent des soins mais aussi d'une possibilité, pour les caisses, d'utiliser autrement les ressources affectées au contrôle.

La réforme implique la mise en place d'une affiliation directe de toutes les personnes majeures en situation de résidence stable et régulière sur le territoire. Elle implique la disparition de la notion d'ayant droit majeur. Celle-ci ne peut cependant se faire que progressivement. Dès 2016, le flux sera géré mais le stock d'ayants droit majeurs étant de 4 millions de personnes, il ne pourra être traité que progressivement.

La réforme devrait permettre la fluidification des opérations de mutation à l'intérieur d'un régime, notamment pour cause de déménagement et entre régimes. Le temps nécessaire à la mutation passera de 20-30 jours à 10 jours. L'assuré, lui, pourra changer instantanément les informations qui le concernent mais le traitement nécessaire en « back office » prend un temps nécessairement plus long.

J'en viens maintenant aux perspectives conventionnelles. La première est la renégociation de la rémunération sur objectif de santé publique des pharmaciens qui a été mise en place par une convention de 2012. Le seuil de déclenchement de cette rémunération, dite communément tiers-payant contre générique, a été fixé en 2011 et il a vieilli puisqu'il est établi à 71 % de taux de substitution alors que nous en sommes aujourd'hui à 83,3 %. Je rappelle que les ROSP constituent 142 millions d'euros par an. Notre objectif est de diversifier les éléments de cette rémunération tout en maintenant son périmètre et nous espérons pouvoir conclure un nouvel accord d'ici la fin de l'année.

2016 sera une année importante puisque la convention médicale arrive à échéance en septembre. Notre objectif est donc d'ouvrir les négociations le plus rapidement possible en février et d'aboutir à l'été.

Le contenu de cette négociation portera notamment sur la démographie médicale mais aussi sur la revalorisation des actes. Il y a des enjeux qualité des pratiques, d'organisation des professionnels et de soutien à des territoires en pénurie d'offre. Il va sans dire que nous appliquerons scrupuleusement les dispositions de la loi de santé une fois qu'elle sera définitivement adoptée.

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