Nous sommes tous citoyens de notre grand pays, lequel a été jadis un empire bordant tous les océans et côtoyant des langues et des cultures nombreuses et diverses. Par leur comportement, les premiers Français ont essayé de les faire taire. Moi aussi, à l'école, on m'accrochait une ardoise dans le dos lorsque je parlais le créole. Mes parents considéraient qu'il fallait habituer très tôt leurs onze enfants à parler le français à la maison pour mieux les intégrer ; je suis le seul à ne l'avoir jamais accepté et à avoir continué à parler ma langue maternelle, le créole.
Si la Charte avait pour but l'intégration des nouveaux membres du Conseil de l'Europe, elle peut servir à la France, diverse de par ses langues et ses cultures. Les enseignants, dont j'ai été, ont longtemps considéré que l'usage d'une langue régionale - le patois, comme on disait - gênait l'apprentissage du français. Des expériences ont montré que c'était tout le contraire. Cette Charte concerne donc la France. Les difficultés d'ordre juridique peuvent être levées, la Constitution peut être changée. La Charte a été signée à juste titre. En Guadeloupe, à l'école comme dans la vie quotidienne, sur les panneaux de signalisation, le créole est bien présent. Je ne voudrais pas que le refus de ratifier cette Charte soit interprété comme une interdiction de continuer sur cette voie.