Il est clair, monsieur le rapporteur Leleux, que la sanction prononcée ouvre la perspective d'un appel à candidature. Le collège n'en a pas débattu à ce stade. Il me semble, à titre personnel, qu'il serait raisonnable d'attendre d'éventuels recours gracieux ou contentieux avant de prendre des décisions engageant la présentation du dossier de candidature. Il serait malheureux de reproduire la situation que nous avons connue pour la bande des 700 MHz, où manquaient aux dossiers présentés certaines données d'appréciation utiles.
Le Gouvernement pourrait-il user, dans la perspective d'un appel à candidature, du droit de réserve que lui reconnaît l'article 26 de la loi du 30 septembre 1986 ? Je ne puis préjuger de ses intentions, mais il est clair que l'exercice de ce droit n'est subordonné, aux termes de l'article 26, à aucune condition tenant à l'état antérieur de la fréquence.
Ne pourrait-on envisager, me demandez-vous encore, une automaticité du retrait en cas de fraude avérée ? La fraude, en jurisprudence, comporte dissolution du lien juridique. Fraus omnia corrumpit, la fraude corrompt tout, dit l'adage. Nul besoin de disposition légale supplémentaire pour étayer ce principe jurisprudentiel qui s'impose en toute circonstance à tout acte réglementaire ou contractuel, qu'il émane de l'Etat ou d'une autorité indépendante. Si la fraude avait été d'emblée caractérisée, nous en aurions tiré immédiatement les conséquences. Mais dès lors que l'intention frauduleuse que nous avons dégagée résulte, ainsi que je le disais, de la prise en compte simultanée d'une séquence d'événements successifs, ce n'est qu'au moment où le processus a été bouclé par la demande de revente que la fraude a émergé à la réalité juridique.
Avons-nous connaissance d'autres cas de fraude du même type ? Tel n'est pas le cas. Mais soit dit sans botter en touche, la fraude cherche, par définition, à se dissimuler. D'où la question des pouvoirs d'investigation du CSA dans son action de régulation économique, qui nous a conduits à demander, hors toute volonté inquisitoriale, de disposer de la possibilité, quand un cas nous semble douteux, de procéder à des investigations sur pièces et sur place, avec mise en demeure, si nécessaire.
Vous avez indiqué, monsieur Assouline, que le Parlement a voté, sur initiative de votre présidente, une procédure de taxation qui figure désormais à l'article 7 de la loi du 14 octobre 2015. Mais cette taxation suppose que l'opération soit réalisée, et le soit légalement.
D'autres moyens peuvent être employés. J'ai évoqué la question du délai de revente. Vous avez vous-mêmes, toujours sur initiative de Mme Morin-Desailly, introduit une disposition, figurant à l'article 4 de la loi, selon laquelle il doit être tenu compte, en cas de projet de transaction, de l'accomplissement des obligations programmatiques de la chaîne. C'est sur quoi vous avez, me semble-t-il, centré votre question. J'y répondrai par deux observations. Force est de constater, tout d'abord, que la convention signée en mars 2012 est de formulation singulièrement large. Si la société demanderesse s'est réclamée, ainsi que le rappelait le sénateur Grosperrin, de la diversité, le cadre fixé à son activité est tellement... divers, que les termes mêmes de la convention s'en ressentent, au point qu'il est très difficile d'en sanctionner le non-respect. Cela est d'autant plus regrettable que l'article 3-1 de la loi de 1986 modifiée a confié mission au CSA de veiller à ce que les programmes rendent un tableau fidèle de la diversité et contribuent à la cohérence du lien social, ce qui doit pousser le Conseil, comme il l'a montré lors d'un colloque organisé en juillet, à être particulièrement vigilant à l'égard des engagements des sociétés. Il ne peut le faire, en l'état actuel de la loi, que sous forme incitative, en application de sa délibération de 2009. Le Conseil d'Etat a en effet conclu qu'il ne pouvait tirer un pouvoir réglementaire de sa mission de « veiller à ». Bien entendu, si le législateur souhaite nous conférer un tel pouvoir, nous l'assurerons.