Intervention de Stéphane Israël

Commission des affaires économiques — Réunion du 21 octobre 2015 à 9h30
Audition de M. Stéphane Israël président-directeur général d'arianespace

Stéphane Israël, président-directeur-général d'Arianespace :

Notre site de Kourou est en effet un gage de performance ! La proximité de l'Équateur est une source de performance pour le lancement. Nous pouvons également procéder plus facilement à des lancements dans toutes les conditions de sauvegarde du fait de la proximité avec la mer et, troisième avantage climatique, l'absence d'ouragan nous garantit une disponibilité tout au long de l'année. A ces avantages hérités de la géographie s'ajoutent les 1 700 salariés de cette base qui y travaillent avec passion.

Le partenariat avec l'Argentine démontre que lancer une fusée Ariane va bien au-delà de placer un satellite sur orbite ! On offre le meilleur de nous-mêmes à des nations. Le dernier lancement en fait foi puisque nous avons à la fois satisfait nos clients australiens et argentins, qui étaient tous les deux des clients publics, en particulier ARSAT, dont la fierté était de lancer un satellite argentin dans l'espace ! Le discours de Madame la Présidente Kirchner, à l'occasion de notre dernier lancement, en témoigne. Nos succès sont une vitrine technologique exemplaire. À cet égard, nous avons passé un accord de coopération entre la France et l'Argentine qui vise à renforcer les liens dans le domaine des lanceurs et des satellites. Les Argentins nous ont confié dans la foulée le lancement du satellite ARSAT 3 et deux options supplémentaires, pour les satellites ARSAT 4 et 5. Nous avons su enclencher un cercle vertueux. En outre, le CNES a su développer les relations avec d'autres États, dans le cadre de la diplomatie économique. Arianespace a deux types de clients, soit des opérateurs majoritairement privés pour lesquels la dimension étatique est moindre, ou des opérateurs institutionnels, pour lesquels les liens tissés avec les États peuvent compter !

A ce stade de notre développement et du fait de notre très forte activité, nous pouvons absorber nos gains de productivité dans la filière. La cession des parts du CNES n'aura pas d'incidence sur notre politique de prix et notre objectif de coûts, pour les lanceurs Ariane 62 et 64, doit être partagé par l'ensemble de nos partenaires. Ce point est capital pour que nous puissions maintenir nos parts de marché.

Nous avons besoin que le public rêve d'espace, que les meilleurs ingénieurs viennent chez nous et que les gouvernements aient envie d'investir dans la filière. S'agissant des réticences en matière d'évolution de gouvernance, personne ne peut penser que les États sont voués à disparaître dans le système ! Les décisions d'investir jusqu'à 800 millions d'euros par an dans la filière témoignent du soutien des États vis-à-vis d'Arianespace. Il n'y a jamais eu un engagement aussi fort des Etats. Je pense que le modèle est en train de se reconfigurer. Les États vont continuer à investir, tandis que les industriels devront s'engager davantage. Il y aura des coûts à venir et il faudra assurer un partage des risques équitable entre le secteur public et le privé pour assurer la transition entre Ariane 5 et Ariane 6, qui devrait être assurée en trois ans cette fois, contre 7 ans entre Ariane 4 et Ariane 5. Certes, de tels moments sont toujours très sensibles ! Qui aura la charge des échecs ? Je pense qu'à ce jour, rien n'est figé comme en témoignent les discussions en cours entre l'Agence spatiale européenne et Airbus Safran Launchers. Mais rien ne coûte plus cher qu'un échec et il importe de préciser les engagements des uns et des autres.

La compétitivité ne se fera pas au détriment de la fiabilité ! La fiabilité de la Maison Ariane est notre atout différenciant sur le marché. Nous continuerons à avoir la charge de lancement sur le marché et ce, quelle que soit l'évolution de sa gouvernance et l'accent porté sur sa compétitivité! Arianespace demeure l'autorité de lancement et nos partenaires industriels ne remettront jamais en cause un tel rôle, clé de la fiabilité du système. Il y a encore quelques années de cela, la préparation des lancements d'Ariane 5 se heurtait à des problèmes de qualité. Ce n'est plus le cas aujourd'hui, grâce à notre industrie qui a atteint un très fort degré de maturité, que je tiens à saluer. Les économies seront réalisées par nos industriels partenaires, Airbus Safran Launchers notamment, et des synergies seront dégagées. Dans ce contexte, la place du reporting aux agences, qui demeure très chronophage, est appelée à diminuer. Mais le principe de fiabilité, qui est notre marque de fabrique, ne sera jamais remis en cause !

Enfin, s'agissant du financement du programme Ariane 6 auquel la France contribuera à hauteur de 52 %, les autres États européens se sont également engagés. Outre l'Allemagne, l'Italie, la Suisse et la Belgique, qui sont les 5 premières nations Ariane, ces États se sont engagés, à Luxembourg, à fournir un effort significatif, dans un contexte budgétaire contraint. Dans le soutien que nous recevons de l'Agence spatiale européenne, chaque nation fait des efforts à raison de sa présence industrielle. Le centre spatial guyanais, quant à lui, demeure essentiellement financé par la France qui contribue pour moitié au programme spécifique de l'Agence spatiale européenne. Nous sommes nombreux à penser que la Commission européenne, qui va devenir le premier client institutionnel du centre avec les programmes Galileo et Copernicus, pourrait apporter son financement. Kourou représente indéniablement une infrastructure stratégique de souveraineté située dans une région périphérique. L'Europe souhaitant également investir dans des programmes dont elle maîtrise les risques technologiques, il serait normal qu'elle contribue à son financement à l'instar de ce qui se passe aux États-Unis où les bases de lancement bénéficient de financements publics conséquents !

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