Intervention de Sylvia Pinel

Commission de l'aménagement du territoire et du développement durable — Réunion du 22 octobre 2015 à 11h30
Loi de finances pour 2016 — Audition de Mme Sylvia Pinel ministre du logement de l'égalité des territoires et de la ruralité

Sylvia Pinel, ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité :

C'est avec plaisir que je vous présente les grandes orientations relevant de mes attributions en matière d'égalité des territoires et de ruralité. L'intense activité de mon ministère ces derniers mois trouve sa traduction budgétaire dans le projet de loi de finances.

Deux comités interministériels aux ruralités se sont tenus cette année, le 13 mars à Laon et le 14 septembre à Vesoul, sous l'égide du président de la République et du Premier ministre. La plupart des contrats de plan État-Région (CPER) ont été signés au cours de l'année. Ils illustrent l'investissement de l'État, à moyen et long terme, aux côtés des collectivités locales, pour l'emploi, la croissance et l'innovation. Enfin, nous avons réuni le Conseil national de la montagne, le 24 septembre à Chamonix.

Les crédits du programme 112, dit « d'impulsion et de coordination de la politique d'aménagement du territoire », se répartissent ainsi : 60 % pour les CPER, 13 % pour la prime d'aménagement du territoire (PAT), 12 % pour la section générale du Fonds national d'aménagement et de développement du territoire (FNADT), et 14 % pour les dépenses de fonctionnement, dont le soutien au Commissariat général à l'égalité des territoires (CGET), à Business France et les fonctions support. Ces crédits s'élèvent à environ 192 millions d'euros, soit un montant stable en matière de capacités d'engagement et une baisse de 4 % en crédits de paiement par rapport à la loi de finances initiale pour 2015.

Dans un contexte budgétaire contraint, la signature des CPER constitue un engagement important de l'État, levier essentiel de la croissance et de l'emploi. Une enveloppe de 12 milliards d'euros sera mobilisée d'ici 2020. En 2016, les crédits CPER représentent 60% du programme 112, soit un effort de 115 millions d'euros.

Le volet territorial accompagne les zones rurales par le soutien aux initiatives en matière d'accès aux services ou encore de projets numériques.

Les crédits de la prime d'aménagement du territoire (PAT) sont stabilisés à 25 millions d'euros. Dernier régime autorisé d'aide directe de l'État aux entreprises, elle est strictement encadrée par les directives européennes et son éligibilité limitée aux seules zones prioritaires dites zones d'aide à finalité régionale. Pour 2016, les crédits s'établissent à un niveau comparable à 2015, compte tenu des annulations intervenues en gestion pour financer la lutte contre le terrorisme. L'abaissement des seuils d'éligibilité que j'ai mis en oeuvre l'année dernière a favorisé l'accès des PME à cette aide. À ce stade, 25 dossiers ont été subventionnés pour près de 14 millions d'euros et 1 733 créations d'emplois prévues. Malgré une montée en puissance tardive, nous arriverons à épuiser ces crédits.

Le FNADT contribue, lui aussi, au développement solidaire et harmonieux des territoires. Il assure notamment le financement des pôles d'excellence ruraux, des maisons de santé pluridisciplinaires ou encore de l'expérimentation du projet de revitalisation des 54 centres-bourgs sélectionnés en 2014.

Enfin, le CGET, créé l'année dernière, apporte désormais son expertise à la politique que je mène en faveur de l'égalité des territoires.

Le programme budgétaire ne porte pas, à lui seul, les crédits de l'État en faveur de l'aménagement du territoire et des ruralités : les mesures contribuant à cette politique qui s'inscrivent dans les documents de politique transversale s'élèvent à 5,5 milliards d'euros, sans compter les aides fiscales. C'est notamment le cas de dispositions adoptées lors des deux comités interministériels aux ruralités, sur le logement, le numérique, la santé, l'éducation ou encore l'agriculture : le premier comité interministériel aux ruralités en a adopté 46, pour plus de 1 milliard d'euros ; le second les a évaluées et a proposé 21 mesures supplémentaires représentant 580 millions d'euros. Certaines de ces dispositions sont déjà opérationnelles.

La philosophie de ces deux comités interministériels s'articule autour de trois principes : garantir l'accès aux services, améliorer les capacités de développement des territoires ruraux - enjeu primordial en termes d'attractivité et de dynamisme économique - et assurer la mise en réseau des territoires pour dépasser les logiques de concurrence et favoriser la coopération entre les différents échelons.

Quelques actions majeures, en guise d'illustration. Pour garantir à tous l'accès aux services, nous souhaitons créer mille maisons de services au public. Un objectif qui sera atteint fin 2016 grâce à la sécurisation du financement de ces structures, notamment par la mise à contribution des opérateurs et le partenariat engagé avec La Poste. Entre 2015 et 2017, l'État finance ces maisons à hauteur de 21,5 millions d'euros, soit 25 % du total, via le FNADT. Un montant équivalent est apporté par les opérateurs - La Poste, la SNCF, ERDF, Pôle emploi, l'assurance maladie, la MSA - à travers un fonds spécifique. La part des collectivités s'élève à 43 millions d'euros, c'est-à-dire les 50% restants, soit par un financement direct, soit via le fonds de péréquation postal.

Dans la même logique, le gouvernement s'est engagé à atteindre le nombre de mille maisons pluridisciplinaires de santé d'ici 2017 : 708 sont en service, contre 170 en 2012, et une centaine sont en construction.

Sur le numérique et la téléphonie mobile, premières préoccupations de nos concitoyens et des élus locaux en matière d'infrastructures, le Gouvernement articule son action autour de quatre priorités. La première est le raccordement au très haut débit des territoires ruraux, avec 87 départements engagés dans le plan France Très haut débit (THD). La deuxième vise à améliorer le réseau mobile par la résorption des zones blanches en 2G d'ici fin 2016 et par la couverture des 3 600 centres-bourgs non couverts en 3G d'ici la mi-2017. Afin que les opérateurs remplissent leurs obligations, la loi a renforcé le pouvoir de sanction de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (Arcep). La troisième est l'ouverture d'un guichet unique pour accompagner les projets en dehors des centres-villes. Enfin, la couverture mobile à l'intérieur des logements sera améliorée grâce aux solutions nouvelles apportées par les opérateurs.

L'article 41 du projet de loi de finances élargit à 30 000 communes le bénéfice du prêt à taux zéro pour l'achat de logements anciens à réhabiliter, expérimenté en 2015 dans 6 000 communes rurales. Sa généralisation à toute la zone C en améliorera la visibilité, la lisibilité, la simplicité et surtout l'efficacité. Il s'agit d'encourager l'accession à la propriété, la réhabilitation des centres anciens et de lutter contre l'étalement urbain. La durée d'occupation obligatoire du logement en tant que résidence principale sera réduite de 25 à 6 ans, afin de rendre encore plus attractif un dispositif qui devrait créer environ 15 000 emplois dans le bâtiment, notamment pour les TPE et les artisans.

Plus globalement, le Gouvernement souhaite donner aux centres-bourgs, qui jouent un rôle indispensable dans le maillage de nos territoires, les moyens de leur dynamisme. Nous avons lancé, en 2014, une première expérimentation consistant à octroyer à 54 communes de moins de 10 000 habitants des crédits d'ingénierie spécifiques du FNADT et de l'Agence nationale de l'habitat (Anah). Afin d'amplifier cette politique, nous avons annoncé, lors du dernier comité interministériel, une enveloppe de 300 millions d'euros dédiée à la revitalisation des centres-bourgs et des villes de moins de 50 000 habitants. Elle constitue une partie du fonds de soutien à l'investissement local, doté de 1 milliard d'euros, dont la moitié bénéficiera aux ruralités. En outre, la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR) est réévaluée de 200 millions d'euros.

J'ai appuyé le développement de l'ingénierie publique en réponse à une demande exprimée par les élus locaux lors des Assises de la ruralité et de mes nombreux déplacements. Nous élaborons une directive nationale d'orientation qui fait suite au dispositif Aider (Appui interministériel au développement et à l'expertise en espace rural) : destiné aux collectivités en fort déficit d'ingénierie, il est constitué d'agents des corps d'inspection de l'État mis à disposition des préfets pour des missions pouvant aller jusqu'à deux ans.

Enfin, le dispositif expérimental des contrats de réciprocité traduit notre objectif de valorisation des liens et des complémentarités entre territoires. Il s'agit de faire émerger des intérêts partagés entre le rural et l'urbain, que l'on oppose trop souvent.

La réforme des zones de revitalisation rurale (ZRR) répond à la nécessité de rendre plus simple et plus juste ce classement qui ne correspond plus à la réalité de nos campagnes et peut être contesté juridiquement, l'arrêté de 2013 n'ayant pas été actualisé. Trois principes guident cette réforme : l'efficacité, la simplification et la justice. Le classement sera établi à l'échelle intercommunale selon un double critère de densité de population et de revenu par habitant. Les avantages liés à celui-ci seront également simplifiés et rapprochés du dispositif de la politique de la ville.

La montagne, enfin, fait l'objet de la feuille de route annoncée par le Premier ministre lors du Conseil national du 25 septembre, qui reprend les propositions formulées dans le rapport des députées Annie Genevard et Bernadette Laclais et s'articule autour de trois axes : l'amélioration de la qualité de vie dans ces territoires, leur développement à l'aune de la transition énergétique et la modernisation de l'organisation et de la gouvernance.

Tous les territoires méritent l'attention de la puissance publique : zones rurales, mais aussi périurbaines. J'ai confié à Frédéric Bonnet, grand prix de l'urbanisme 2014, la mission de repenser le développement de ces zones pour répondre concrètement aux enjeux.

Notre politique en faveur de l'aménagement des territoires est, par essence, partenariale, transversale et interministérielle. Mon ministère assure la mise en cohérence de l'ensemble de ces actions, dont certaines s'inscrivent hors du cadre du programme 112.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion