Intervention de Patricia Morhet-Richaud

Réunion du 22 octobre 2015 à 14h30
Contrats territoriaux de développement rural — Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Patricia Morhet-RichaudPatricia Morhet-Richaud :

Monsieur le président, madame la ministre, madame la rapporteur, monsieur le président de la commission, mes chers collègues, bien que 80 % de notre territoire métropolitain corresponde à des zones rurales, la France n’est pas un « pays rural ». C’est un pays qui définit depuis longtemps ses politiques publiques sur la base de critères démographiques. En effet, depuis longtemps, nos gouvernants ont le souci « des villes », afin d’aider les quartiers en situation de décrochage, afin de revaloriser les zones urbaines en difficulté, afin de réduire les inégalités et d’enrayer la dégradation des conditions de vie.

Il est vrai que les incidences de la crise économique et sociale dans certains quartiers représentent un réel danger pour la stabilité de notre pays et pour la cohésion nationale. La puissance publique doit y répondre en mobilisant des moyens financiers et humains.

Cependant, la crise n’a pas épargné les campagnes : même si ses effets y sont moins visibles, on souffre aussi dans nos campagnes et ses habitants sont eux aussi en situation de grande détresse.

Je ne pense pas qu’il soit judicieux de retenir le seul critère démographique pour mettre en place des politiques publiques justes et efficaces. Je suis convaincue que la notion de « territoire » doit aussi être prise en compte.

La réalité, dans nos zones rurales, c’est la population qui vieillit, c’est le nombre d’exploitations agricoles qui diminue, ce sont les services publics qui ferment, c’est l’offre de santé qui se raréfie et le tissu économique qui s’appauvrit. C’est pourquoi je me réjouis aujourd’hui que cette proposition de loi visant à instaurer des contrats territoriaux de développement rural permette d’aborder un débat important pour l’avenir de nos campagnes et de nos montagnes

En effet, chez nous, si la menace d’un désordre public ne plane pas, le malaise existe. Il suffit d’échanger avec les maires, comme je le fais à la fin de chaque semaine dans mon département des Hautes-Alpes, pour se rendre compte à quel point le sentiment d’abandon est réel. Il faut dire que tout devient plus compliqué lorsque l’on est loin de tout...

Nous voyons régulièrement de grandes manifestations organisées autour de la cause rurale, assorties d’annonces et de bonnes intentions. Mais, concrètement, sur le terrain, quelles sont les perspectives d’avenir ? Quels sont les axes pour aménager nos territoires ? Quelles sont les actions engagées pour gommer les inégalités entre territoire rural et territoire urbain ?

La loi NOTRe bouleverse notre organisation territoriale et la répartition des compétences des collectivités. Désormais, de nouveaux équilibres sont à trouver entre les partenaires que sont l’État, la région, le département, l’intercommunalité, la commune et l’Europe.

Élue d’un « très petit département », je ne fais pas partie de ceux qui opposent urbain et rural, mais je ne pense pas que ce qui marche en zone urbaine fonctionne forcément en zone rurale. Les besoins ne sont pas les mêmes, non plus que les attentes. §Il faut donc adapter le champ d’interventions aux besoins réels des territoires. Nous devons imaginer une complémentarité entre le rural et l’urbain, et les contrats territoriaux peuvent nous permettre d’avancer dans cette direction.

Je crois beaucoup au développement économique, à la création d’entreprises et à l’accès à l’emploi, en valorisant notamment les filières locales.

Je suis convaincue que la qualité de vie peut être un élément déterminant dans le choix de vie de nouvelles populations plus jeunes. Encore faut-il que les territoires ruraux soient attractifs et assurent une égalité d’accès à l’éducation, à la culture, aux services, aux équipements publics et à la santé.

La mobilité est aussi un point important pour nos territoires. La plupart sont situés à distance des lignes à grande vitesse, sans desserte autoroutière, à plusieurs heures d’un aéroport. Il faut donc contribuer à améliorer la mobilité, ce qui nous conduit à pallier les défaillances de l’État.

De ce point de vue, le bien-fondé des contrats territoriaux est louable et nous ne pouvons que nous féliciter des instruments mis en œuvre.

Pour autant, les conditions de financement de ces contrats vont conduire les régions, les départements ou toute autre personne publique ou privée à mettre la main à la poche. C’est là que les choses vont se compliquer.

Au congrès de l’Assemblée des départements de France, l’ADF, qui s’est tenu la semaine dernière dans le département de nos collègues Philippe Adnot et François Baroin, il a notamment été question du RSA et de son financement, sans que des réponses soient apportées. Il paraît difficile d’envisager, demain, une nouvelle politique contractuelle pour les départements alors que ceux-ci ne peuvent garantir le financement des compétences transférées par l’État.

Pour autant, je voterai en faveur de ce texte, qui vise à apporter une bouffée d’oxygène à nos territoires ruraux et de montagne, et je pense que mes collègues du groupe y seront également favorables.

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