Intervention de Jean-Jacques Filleul

Réunion du 22 octobre 2015 à 14h30
Contrats territoriaux de développement rural — Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Jean-Jacques FilleulJean-Jacques Filleul :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je veux saluer le travail de Mme la rapporteur. Son implication méritait certainement mieux.

En commission, nous nous sommes étonnés : pourquoi ce texte ? Pourquoi à ce moment ? Il s’agit peut-être – sans doute – d’un texte d’affichage, à quelques semaines des élections régionales…

À une autre époque, la proposition de loi déposée par notre ancien collègue Pierre Jarlier contenait dix articles. Repêchée tardivement, elle est aujourd'hui réduite à six articles, qui, tous, surabondent des lois, des décrets et d’autres dispositifs existants pour la cible visée, la ruralité.

Pardon, mais cette proposition de loi enfonce des portes ouvertes ! C’est un texte réducteur, fondé sur des critères inadaptés, même si Mme la rapporteur souhaite améliorer les dispositions de l’article 2 – nous y reviendrons dans la suite du débat.

À vrai dire, le message est flou. D’ailleurs, en commission, à côté des membres du groupe socialiste et républicain, qui s’interrogeaient, nos collègues de la majorité sénatoriale n’étaient pas en reste et nous avons relevé, chez eux, une certaine forme de désappointement.

Toute vérité étant bonne à dire et à écouter, cela confirme bien que cette proposition de loi manque de sens, d’autant que les pôles d’équilibre territoriaux et ruraux, les PETR, existent et conviennent bien. Instaurer des contrats territoriaux de développement rural n’apporte rien de plus. Je l’exprime sans intention maligne, puisque la loi du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, dite « loi MAPTAM », répond, avec l’adoption des pôles d’équilibre territoriaux et ruraux, au besoin d’organisation des territoires concernés.

Ces pôles ont été adoptés sur ces travées comme sur les bancs de l’Assemblée nationale ; nos collègues ont bien compris qu’ils satisfaisaient à la nécessité de n’oublier aucun territoire. Rapporteur pour avis de la loi MAPTAM, je me suis ainsi exprimé à cette tribune au moment de son examen : « l’objectif des pôles est de prendre en compte les enjeux spécifiques du monde rural afin que celui-ci ne soit pas à la traîne du monde urbain. Ce sont des outils utiles, à condition de les articuler avec les pays, qui permettent à plusieurs EPCI à fiscalité propre d’élaborer des projets et de les conduire ensemble. L’idée n’était pas de créer un échelon de plus, mais les conditions d’un approfondissement des dynamiques territoriales. »

Le dispositif des PETR comprend un conseil syndical, un conseil de développement, une conférence des maires. Chaque PETR élabore un projet de territoire de développement durable. Le pôle peut conclure une convention territoriale avec les conseils départementaux et régionaux.

Comme cela a été dit, le monde rural, le monde urbain et le monde périurbain participent de ces évolutions. Chacun comprend bien qu’il ne faut pas opposer les territoires entre eux. Chaque territoire a ses problèmes. Dans certaines zones urbaines, les problèmes rencontrés peuvent être plus complexes à gérer que dans certaines zones rurales.

Je sais qu’il est de bon ton d’évoquer à tout bout de champ le déclin de notre pays, mais, avec ces dispositifs, la France avance ! Elle se dote d’instruments qui modernisent le territoire.

Dans la loi NOTRe, la ruralité a été prise en compte à de nombreux titres, notamment au travers des deux schémas régionaux prescriptifs qui ont été adoptés pour désenclaver les territoires ruraux.

Par ailleurs, cette loi prévoit une faculté de contractualisation entre la région et les intercommunalités sur une déclinaison locale de ces schémas.

Les deux comités interministériels aux ruralités qui se sont tenus en mars et septembre derniers, respectivement à Laon et à Vesoul, ont apporté leur lot de nouveaux engagements du Gouvernement pour la qualité de vie et l’attractivité des territoires. Les enveloppes financières mobilisées sont importantes : près de un milliard d’euros pour soixante-sept mesures nouvelles – pour beaucoup déjà engagées, comme Mme la ministre nous le rappelait ce matin en commission.

Sans viser à l’exhaustivité, nous pouvons y ajouter bien d’autres mesures visant à favoriser l’investissement ou des mesures fiscales. Je veux également rappeler que les péréquations horizontale et verticale ont progressé significativement. Il s’agit là d’efforts décisifs en direction du monde rural, pour un meilleur équilibre.

Nous savons tous ici que ces mesures urgentes et indispensables apportent des réponses à des situations parfois critiques. Elles viennent s’ajouter au remarquable travail réalisé par les régions, à l’instar de celle que je suis amené à citer tout naturellement, pour la connaître le mieux : la région Centre-Val de Loire. Les politiques conduites en direction des villages et des centres-bourgs ont été et demeurent exemplaires.

Réduire sans cesse le monde rural à des zones de fragilité ne reflète pas la réalité. Le monde rural n’est pas un tout uniforme – heureusement ! Il est des territoires ruraux fragiles et d’autres en expansion. Dès lors, ne les stigmatisons pas et soyons vigilants sur ce point. Les territoires ruraux ne sont pas tous à l’abandon, tant s'en faut ; on y vit parfois très bien.

La ruralité est une force – cela a été dit, je le répète à mon tour – et un atout considérable pour notre pays. Tout doit être fait pour vitaliser l’attractivité des territoires.

Nous l’avons vu, des moyens et des dispositifs existent aujourd’hui. Il n’est donc pas nécessaire d’en instaurer de nouveaux qui viendraient se superposer à l’existant. Les contrats territoriaux de développement rural, objet de cette proposition de loi, n’ont donc pas de raison d’être.

Dans ces conditions, le groupe socialiste et républicain votera contre ce texte.

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