Ma question s'adresse à Mme la ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative.
Madame la ministre, la récente et vive émotion suscitée par le cas douloureux de Chantal Sébire, qui s'est donné la mort après avoir vu sa demande d'euthanasie rejetée par la justice, relance le débat sur l'accompagnement en fin de vie dans notre pays.
On aurait pourtant pu croire que cette question avait été tranchée par la loi du 22 avril 2005, fruit d'une réflexion longue et approfondie menée par M. Jean Leonetti, et dans laquelle sont posés des principes clairs : interdiction de l'obstination déraisonnable dans la dispense des soins, droit du patient d'interrompre ou de refuser un traitement, accès aux soins palliatifs.
Elle vise, en quelque sorte, à autoriser le « laisser-mourir » dans des conditions décentes. Faut-il, aujourd'hui, aller plus loin, en légalisant « l'aide à mourir » ou le suicide assisté ?
On ne peut, sous le coup de l'émotion, adhérer à un tel projet, et ce pour deux raisons. D'abord, parce que la demande d'euthanasie est, en réalité, bien souvent liée à la peur de la souffrance et de la déchéance, au souci de ne pas peser trop longtemps sur ses proches, au manque de dialogue, parfois. Ensuite, parce que donner la mort ne saurait en aucun cas constituer un projet médical ; ce serait contraire au serment d'Hippocrate et source de dérives possibles.
Alors, que faire pour répondre aux situations les plus douloureuses ? Appliquons déjà la loi actuelle et menons une véritable politique de prise en charge de la douleur.
En effet, qu'en est-il aujourd'hui ?
La psychologue Marie de Hennezel, auteur d'un rapport sur l'état des soins palliatifs en France qui vous a été remis à la fin de 2007, madame la ministre, dresse un constat sévère : inégalités profondes dans l'accès aux soins palliatifs, hétérogénéité des pratiques, insuffisance de moyens, sous-effectifs et, surtout, déficit d'information. Selon elle, les possibilités ouvertes par la loi Leonetti sont, en particulier, mal connues et incomprises.
Finalement, la tentation de répondre au voeu de mort par un geste létal est révélatrice d'un défaut de formation et d'une solitude des soignants. Que comptez-vous faire pour remédier à cette situation, au-delà de la mission que vous avez confiée à M. Jean Leonetti ?
Il restera toujours des cas de détresse, ceux de malades dont l'espérance de vie n'est pas menacée, et auxquels il sera difficile de répondre.
Cependant, ce n'est pas une loi sur l'euthanasie qui amendera les consciences. En revanche, on peut craindre qu'elle ne vienne freiner les efforts des soignants pour améliorer leur pratique, pour la penser, pour inventer une manière d'être humble et humaine auprès de ceux qu'on ne peut plus guérir.