Intervention de Roland Courteau

Réunion du 27 octobre 2015 à 14h45
Charte européenne des langues régionales ou minoritaires — Rejet d'un projet de loi constitutionnelle

Photo de Roland CourteauRoland Courteau :

Monsieur le président, madame la garde des sceaux, mes chers collègues, il n'y a point d’ambiguïté pour Claude Bérit-Débat, Henri Cabanel, d’autres collègues ou moi-même, qui défendons l’occitan : la pluralité des langues régionales et la diversité culturelle sont une richesse, qu’il nous faut conforter, accroître, protéger et promouvoir, c’est-à-dire faire vivre. Parce que, trop longtemps, nos langues régionales ont été négligées, voire combattues, malmenées ou reléguées au rang de patois, nous soutiendrons ce texte visant à autoriser la ratification de la Charte européenne.

Des élus municipaux ou des parents d’élèves vous diront les obstacles trouvés sur leur route, comme tel maire rencontrant des problèmes pour avoir installé des panneaux de signalisation en occitan et en français à l’entrée de sa ville. J’avais même été amené à présenter ici et à faire adopter une proposition de loi en 2010, afin d’offrir, sur ce point, un cadre juridique sûr.

Soyons cohérents ! Si nous voulons soutenir la diversité des langues dans le monde, donc la position du français dans certains pays où il est minoritaire, peut-être faudrait-il, alors, ne pas hésiter à reconnaître cette diversité linguistique et culturelle chez nous, en France.

Je formulerai une autre remarque : s’il est vrai que c’est en français qu’a été proclamée la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, c’est tout de même en occitan qu’a été créé en 1792 le personnage de Marianne, symbole de la République.

Protéger et valoriser les langues régionales, patrimoine indivis de la nation, n’a aucunement pour objet de diminuer la place que le français occupe dans notre sphère publique, ni de méconnaître son rôle dans la construction de la nation. Il s’agit non pas de diviser, mais d’unir.

La République est une et indivisible, mais elle est aussi diverse, mes chers collègues, par ses cultures et par ses langues. C’est ce qui fait l’attractivité de nos territoires et qui les rend uniques. Compte tenu de la richesse et du poids des langues régionales dans notre pays, la charte apparaît comme le préalable nécessaire à l’élaboration d’un cadre législatif positif, au sein duquel nos langues régionales trouveraient à s’épanouir.

Certains, de tous bords, dont je respecte la position, mais ne partage ni l’analyse ni les arguments, trouvent nombre d’arguments pour s’opposer à la charte.

Rien n’y fait ! Ni que vingt-cinq pays comme l’Allemagne, l’Espagne ou le Royaume-Uni l’aient ratifiée. Ni que des juristes éminents l’aient soutenue. Ni que le Parlement européen ait invité tous les États, avec une majorité écrasante, à la ratifier. Ni que la convention de l’UNESCO de 2005 aille dans le même sens.

Rien n’y fait ! Même le préambule qui affirme que la protection et l’encouragement des langues régionales ne doivent pas se faire au détriment des langues officielles.

J’entends aussi certains, ici ou là, nous dire que ces langues seraient mortes, arriérées, surannées, vieillies, inadaptées à transmettre la moindre pensée.

La vérité est qu’elles comptent encore beaucoup de locuteurs, même si, malheureusement, leur nombre est en constante et rapide régression.

La vérité est qu’elles sont d’une grande richesse de vocabulaire, syntaxique et sémantique.

La vérité est qu’elles constituent un patrimoine humain et culturel exceptionnel.

N’ayez crainte, mes chers collègues ! Le pacte républicain n’est pas menacé par les langues régionales.

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