Intervention de Colette Mélot

Réunion du 27 octobre 2015 à 14h45
Charte européenne des langues régionales ou minoritaires — Rejet d'un projet de loi constitutionnelle

Photo de Colette MélotColette Mélot :

Monsieur le président, madame la garde des sceaux, monsieur le président de la commission des lois, mes chers collègues, la révision constitutionnelle de 2008 a permis d’introduire par la Constitution un article 75–1 qui dispose que « les langues régionales appartiennent au patrimoine de la France ».

De nombreuses initiatives parlementaires, plusieurs propositions de loi, des questions orales ou écrites posées sur le sujet témoignent de l’intérêt manifesté par l’ensemble du Sénat pour les questions de langues et cultures régionales.

Je suis pourtant convaincue, après avoir conduit de nombreuses auditions dans le cadre de la rédaction d’un rapport fait au nom de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication en 2011, que le temps des « guerres linguistiques » est révolu. Certes, il faut conserver un statut prééminent au français, qui est notre langue nationale commune, la langue de la vie publique et de la République, un des piliers de l’unification de notre pays, mais les langues régionales n’en constituent pas moins une des richesses culturelles qui honorent notre pays. Elles ne sont pas une menace pour le français, qui doit plutôt lutter sur le plan international pour conserver sa place.

L’appellation de « langues régionales », si elle constitue un terme générique commode d’emploi, a l’inconvénient de masquer la grande diversité des situations locales. Il y a peu en commun entre les situations des langues comme le basque, le breton, l’occitan et ses variétés, l’alsacien, le catalan, le corse, le flamand occidental – et je ne saurais oublier le picard ! –, les créoles, le tahitien, les langues kanakes et amérindiennes. Elles diffèrent par le nombre de locuteurs, dont l’estimation est d’ailleurs difficile, d’autant qu’il faudrait distinguer entre la compréhension passive et l’expression active, la maîtrise de l’oral et de l’écrit. Beaucoup d’entre elles, en outre-mer, connaissent encore une transmission naturelle dans les familles. En revanche, celle-ci s’est complètement étiolée en métropole où les langues régionales survivent grâce à l’école, contrairement à un préjugé répandu.

Je voudrais apporter un éclairage issu des travaux et des auditions que j’ai pu mener. Nous ne pouvons que nous féliciter du sérieux avec lequel l’éducation nationale aborde l’enseignement des langues régionales. L’article L. 121–1 du code de l’éducation prévoit que la formation dispensée au sein des écoles, des collèges, des lycées et des établissements d’enseignement supérieur « peut comprendre un enseignement, à tous les niveaux, de langues et cultures régionales ». Par ailleurs, le service public de l’enseignement supérieur, en application de l’article L. 123–6 du code de l’éducation, « veille à la promotion et à l’enrichissement de la langue française et des langues et cultures régionales ».

Dans sa rédaction issue de la loi du 8 juillet 2013 d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République, l’article L. 312–10 du code de l’éducation prévoit que « Les langues et cultures régionales appartenant au patrimoine de la France, leur enseignement est favorisé prioritairement dans les régions où elles sont en usage. Cet enseignement peut être dispensé tout au long de la scolarité selon des modalités définies par voie de convention entre l’État et les collectivités territoriales où ces langues sont en usage. »

Par ailleurs, l’enseignement de la langue régionale peut permettre de déroger aux règles normales d’affectation des élèves dans l’enseignement primaire. Il ressort des dispositions de l’article L. 212–8 du code de l’éducation, dans sa rédaction issue de la loi « NOTRe », que « le maire de la commune de résidence dont les écoles ne dispensent pas un enseignement de langue régionale ne peut s’opposer, y compris lorsque la capacité d’accueil de ces écoles permet de scolariser les enfants concernés, à la scolarisation d’enfants dans une école d’une autre commune proposant un enseignement de langue régionale et disposant de places disponibles. »

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