Intervention de Alain Anziani

Réunion du 27 octobre 2015 à 14h45
Charte européenne des langues régionales ou minoritaires — Question préalable

Photo de Alain AnzianiAlain Anziani :

Le Conseil constitutionnel n’aura plus à s’interroger sur la constitutionnalité du dispositif, puisqu’il ne lui appartient pas, en vertu de sa propre jurisprudence, de juger d’une loi constitutionnelle : le pouvoir constituant s’impose au juge constitutionnel.

Du reste, ce débat s’est tenu à de multiples reprises, par exemple au sujet de la parité entre les hommes et les femmes sur les listes électorales : après que le Conseil constitutionnel eut jugé ce principe contraire à la Constitution, une révision constitutionnelle est intervenue, dont le Conseil constitutionnel n’a pu que prendre acte.

S’agissant des incertitudes juridiques soulevées par le Conseil d’État, je soutiens que, la Constitution ayant été révisée, si un Basque, un Corse ou un Breton prétend plaider devant un tribunal dans sa langue régionale, la réponse du juge sera évidente : appliquant la Constitution, et la déclaration interprétative qui y sera mentionnée, il opposera à ce justiciable une fin de non-recevoir.

Quant au juge européen, il devra faire de même. Au demeurant, je rappelle que la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires ne fait pas partie des normes de référence de la Cour européenne des droits de l’homme, ce qui est une précision importante. Surtout, il n’appartient pas au juge européen de faire prévaloir une quelconque norme sur notre Constitution. Nous qui sommes le pouvoir constituant, comment pourrions-nous seulement concevoir qu’il le puisse ?

Mes chers collègues, que se passe-t-il donc dans les vingt-cinq pays qui ont ratifié la charte européenne des langues régionales ou minoritaires ? On n’assiste pas davantage à l’effacement de l’allemand en Allemagne qu’à celui de l’anglais au Royaume-Uni. À la vérité, on n’assiste à aucune révolution linguistique ni à aucun bouleversement. La raison en est simple, quoiqu’elle n’ait pas été suffisamment signalée : l’article 5 de la Charte – cette fois je parle bien, monsieur Mézard, d’une stipulation de la Charte elle-même – prévoit que rien dans la Charte ne pourra remettre en question le principe de la souveraineté et de l’intégrité territoriale des États.

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