Nous ne voyons aucune raison que cette région, qui n'était pas prête au moment du lancement des SATT, ne puisse à terme en bénéficier ! Nous avons également créé des instituts hospitalo-universitaires (IHU) qui, comme les IRT ou les ITE, sont implantés localement tout en ayant une vocation nationale. Ces instituts sont spécialisés dans des disciplines médicales spécifiques, à l'instar de celui implanté à Marseille, consacré aux maladies infectieuses, ou encore de celui installé à Strasbourg, qui travaille tout particulièrement sur la chirurgie interventionnelle. Puisque des disciplines médicales demeurent, pour le moment, absentes de ce dispositif, nous n'excluons pas de créer un ou deux, voire trois IHU supplémentaires. Voilà ce qu'il en est pour les institutions.
Nos domaines d'intervention devraient, quant à eux, demeurer inchangés et concerner la recherche et l'enseignement, la valorisation de la recherche et son transfert à l'entreprise, ainsi que la modernisation de notre économie. Ces trois grands champs seront aussi présents dans le troisième PIA autant qu'ils l'étaient dans les précédents. Nous avons proposé des enveloppes de crédits en ce sens au Gouvernement : sur les 10 milliards d'euros, 4 rentreraient en compte pour le calcul du déficit maastrichtien, et 4 seraient mobilisés sous forme de fonds propres, car avec le niveau des taux d'intérêts actuels, l'idée de mettre au budget de l'État les enveloppes de prêts ne me paraît pas pertinente. Une telle intervention en fonds propres est destinée à accompagner la croissance des sociétés innovantes en France, qui reste le pays d'Europe où l'on créée le plus grand nombre d'entreprises, mais où l'on en compte le plus faible nombre de taille intermédiaire. Nos entreprises connaissent un problème de croissance et notre rôle est essentiel dans l'apport de fonds propres. Il nous faut agir comme un bon investisseur, c'est-à-dire en soutenant celles qui présentent un réel potentiel de croissance, afin d'éviter qu'elles renoncent à leur développement ou qu'elles se délocalisent, à terme, dans des pays réputés plus ouverts au financement.
Cette enveloppe de 4 milliards d'euros de fonds propres représente, en proportion, plus du double de ce que contenaient les PIA 1 et 2 ; il y a là une évolution très significative. Les crédits maastrichtiens, au sens classique, sont au contraire moins importants. Nous avons également proposé un nouveau concept, à savoir les dotations décennales, destinées à remplacer les dotations non consommables. Les taux d'intérêt actuels des obligations du Trésor oscillent autour de 1 à 1,5 %. C'est pourquoi ouvrir un milliard d'euros de crédits pour verser 10 à 15 millions d'intérêt par an donne certes une idée de la pérennité de l'État, mais ne paraît guère raisonnable. Aussi proposons-nous de remplacer ces dotations non consommables par des dotations décennales, qui seraient destinées aux universités et aux organismes de recherche, et qui seraient versées, sur onze ou douze ans, avec un plafond de 10% par tranche annuelle. Ces deux milliards d'euros de dotations décennales correspondent à trois fois plus que l'effort réalisé précédemment pour les secteurs de l'université, de la recherche et de l'enseignement. Ils sont, en proportion, identiques aux dotations analogues des PIA 1 et 2 réunis. Nous proposons cependant un changement d'orientation. Alors que nous avions financé la recherche avec les PIA 1 et 2, il nous faut à présent mettre davantage l'accent sur l'enseignement et la formation, aux niveaux du secondaire et de l'université, jusque-là moins considérés. Cette évolution permettrait d'assurer le financement de projets de nature expérimentale de nature à améliorer la qualité et l'efficacité de la formation. À cet égard, l'innovation ne se limite pas au numérique, et l'on voit que les techniques d'enseignement et d'accompagnement des élèves et des étudiants, dans d'autres pays, sont plus avancées qu'en France. Notre stratégie de l'enseignement supérieur a mis au jour de réels problèmes et certaines enquêtes, comme celles conduites par l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), montrent que le niveau de formation des jeunes Français de quinze ans n'est pas celui que nous aimerions avoir, c'est à dire le meilleur du monde. Mais si nous souhaitons porter davantage l'accent sur l'enseignement et la formation, nous ne nous désengageons pas pour autant de la recherche fondamentale.
En ce qui concerne les enveloppes économiques, nous pensons que le numérique, auquel vous avez fait allusion, Monsieur le Président, devient transversal puisqu'il se retrouve dans toutes les activités et concerne la modernisation de l'appareil productif. Outre le numérique, qui devient omniprésent, le développement durable, auquel avaient été dédiés des crédits dans les PIA 1 et 2, est également essentiel. À cet égard, une règle selon laquelle 50 % des crédits investis devaient induire des effets bénéfiques sur l'environnement s'appliquait précédemment. Dans ce domaine également, transversalité et approche sectorielle se conjuguent.
Nous souhaitons davantage soutenir la croissance des PME et des très petites entreprises (TPE) dans le PIA 3. Ainsi, dans le cadre du concours France Innovation, nous aidons une idée à se transformer en entreprise, via une subvention de 200 000 euros allouée dans un délai de moins de deux mois. Pour qu'elle puisse créer un prototype, nous pouvons lui attribuer une avance remboursable pouvant atteindre jusqu'à deux millions d'euros. Enfin, nous sommes en mesure de soutenir, à hauteur de vingt millions d'euros avec les fonds propres, le passage de ce prototype à l'échelle industrielle et commerciale. Cet accompagnement, à chacune des étapes de la croissance des entreprises innovantes, implique donc des outils financiers différents.
Monsieur le Président, vous avez fait allusion aux industries agricoles et alimentaires. Celles-ci ne sont pas exclues du PIA, mais reconnaissons qu'elles ne bénéficiaient pas de crédits spécifiques. Dans le cadre du redéploiement de crédits opéré au sein du PIA 2, et que je trouve, pour ma part, excellent, une enveloppe de 120 millions d'euros a été dégagée pour FranceAgriMer et les projets relatifs à l'agriculture et aux industries agroalimentaires. Nous avons de bons projets ; les deux premiers ont concerné, d'une part, des serres énergétiquement plus efficientes et, d'autre part, les abattoirs du futur. Nous souhaitons développer, par l'approche que j'ai évoquée concernant les PME, les jeunes entreprises ou les projets d'entreprises dans ce domaine agricole et alimentaire. L'échelle qui a été jusqu'à présent la nôtre est demeurée modeste, avec 120 millions d'euros sur les 47 milliards des PIA 1 et 2. Avec le PIA 3, nous souhaitons donc aller plus loin dans ce domaine, ainsi que dans celui du tourisme. Dans ce dernier secteur, il y a place, en effet, pour l'innovation et le développement du numérique afin d'éviter, par exemple, que des opérateurs d'outre-Atlantique ne perçoivent une rente de 20 % sur toute l'activité hôtelière française. C'est bel et bien un sujet majeur pour nous.
Vous aviez également évoqué, Monsieur le Président, deux autres sujets. Le PIA 2 consacre une enveloppe de 50 millions d'euros pour cinq régions qui ont été choisies. Chacune se voit affecter 10 millions d'euros, qu'elle se doit d'abonder avec 10 autres millions. Cette enveloppe globale de 20 millions d'euros serait instruite par la Banque publique d'investissement (BPIFrance) et cogérée par l'État et la région au niveau local, sous réserve de notre validation. Cette démarche a effectivement démarré dans quatre nouvelles régions, à savoir : Pays de la Loire, Nord-Pas-de-Calais Picardie, Provence-Alpes-Côte d'Azur (PACA) et Alsace-Champagne-Ardennes-Lorraine. L'Aquitaine, pourtant sélectionnée, ne s'est pas engagée. Ce mécanisme s'avère efficace, puisque les délais de décision se limitent à six semaines. Il assure le financement d'une diversité de projets allant de 100 000 à 500 000 euros. Comme j'ai pu le constater hier, lors d'un déplacement à Saint-Nazaire, nous avons pu financer des projets remarquables dans une grande variété de domaines, notamment technologiques et médicaux.
Au vu du succès de cette expérience, et compte tenu du rôle renforcé des régions en matière économique, nous ne pouvions pas demeurer à cette échelle de 50 millions d'euros sur 47 milliards d'euros. En conséquence, nous proposons de porter cette nouvelle enveloppe régionale à 500 millions d'euros dans le nouveau PIA, c'est-à-dire de passer de 1 pour 1 000 à 1 %. Il s'agit là d'une forte augmentation relative.
Sur l'Europe, le Gouvernement a chargé BPI France de coordonner la réalisation du « plan Juncker » pour la France, ce qui assure une bonne cohérence. Cependant, le territoire concerné par ce plan européen diffère de celui pris en compte par le PIA, et manifeste un appétit pour un niveau de risque plus faible. Il se situe davantage dans la diffusion que dans l'expérimentation. Par exemple, le PIA soutient la conception d'éoliennes marines de grande puissance, alors que le « plan Juncker » va financer des éoliennes terrestres dont le modèle économique est bien connu et la technologie maîtrisée. En outre, le « plan Juncker » finance des infrastructures, ce que ne fait pas le PIA. Il y a donc une complémentarité bien assurée ainsi qu'une certaine logique à ce que les idées développées dans le cadre du PIA trouvent leur extension dans le « plan Juncker ». Nous vérifierons, dans le PIA 3, que cette complémentarité est bien assurée. En outre, le fait que la structure CGI existe, et qu'il y ait en France une certaine acculturation aux investissements d'avenir, expliquent que notre pays soit bien traité et que de nombreux objets soient pris en compte par la Banque européenne d'investissement (BEI). Nous sommes ainsi parmi les plus actifs et porteurs au niveau européen.
Monsieur le Président, mon exposé était certes un peu long, mais vous m'aviez posé de nombreuses questions !