Intervention de Louis Schweitzer

Commission des affaires économiques — Réunion du 28 octobre 2015 à 9h30
Contenu des différentes actions du programme d'investissements d'avenir et leur avancement — Audition de M. Louis Schweitzer commissaire général à l'investissement

Louis Schweitzer, Commissaire général à l'investissement :

Certaines questions, qui m'ont été adressées, se recoupent. Nous finançons certes la recherche universitaire, mais également, de manière conséquente, le transfert de la recherche vers l'économie. Ainsi, le financement des SATT, qui ont pour vocation de faire passer une invention à l'échelle industrielle, et celui des différents organismes que j'ai précédemment évoqués, s'inscrit dans cette priorité. Ces derniers sont toujours cofinancés avec les entreprises, et notre volonté est constante de faire tomber la barrière entre elles et la recherche, fût-elle fondamentale. Ce que j'évoque d'ailleurs pour la recherche universitaire vaut également pour les grands organismes de recherche !

Les ETI représentent un vrai sujet européen. Nous sommes favorables à cette catégorie d'entreprises, et nous y investissons des fonds propres de manière avisée, c'est-à-dire dans une logique analogue à celle d'un entrepreneur, et non comme une forme de subvention déguisée. Mais l'Europe fixe des limites pour les aides aux entreprises et certaines de ces règles peuvent s'avérer de réelles contraintes et augmenter des délais qui demeurent incompressibles.

Nous souhaitons faire plus pour les IAA. Le recyclage des dossiers, qui a malheureusement été évoqué, est, je l'espère, une exception. Il n'est pas de procédure qui soit parfaite et ce genre d'impondérable peut malheureusement survenir.

S'agissant de la formation et de l'enseignement, nous avons financé un grand nombre de centres d'apprentissage avec les régions. Partout, leur taux de remplissage ne dépasse pas les deux-tiers de leur capacité, ce qui me désole ! Ce n'est plus un problème incombant au PIA.

Nous sommes ainsi toujours tournés vers le développement et l'application effective. Sur les usages du numérique, un appel à projets est en cours.

Nous sélectionnons nos projets de trois manières. Nous émettons soit des appels à manifestation d'intérêts, soit des appels à projets, ou encore nous organisons des concours, à l'instar du concours mondial pour l'innovation, au terme duquel nous avons sélectionné 110 lauréats sur 1 100 candidats. Je tiens à rappeler que le nombre de lauréats n'est nullement défini a priori et qu'il procède de l'examen des projets qui nous sont soumis. Les appels à projets, qui sont des objets juridiques, sont désormais l'objet d'un résumé d'une page accessible à la fois sur notre site et dans l'ensemble des institutions partenaires, afin d'en favoriser l'accès.

Je partage votre constat quant aux contraintes qui pèsent sur la commande publique. Les contraintes juridiques européennes nous empêchent de l'utiliser autant qu'aux États-Unis, où elle est un outil d'aide directe, comme le permet le « Small Business Act ». Néanmoins, nous encourageons vivement les partenariats d'innovation à travers certaines de nos actions, notamment dans le domaine du numérique éducatif. Mais des efforts restent à faire afin de se prémunir contre une certaine forme de conservatisme et d'assumer le risque d'innovation dans l'achat.

Sur l'innovation en agriculture, je préside le comité d'éthique de l'Institut national de la recherche agronomique (INRA). Je trouve, au contraire de ce qui a pu être dit, que de nombreuses innovations s'inscrivent dans une perspective de développement durable et ne se soldent pas par une forme de massification et d'industrialisation de ce secteur.

Je le répète, notre souci constant est d'améliorer la fluidité du transfert entre la recherche et l'industrie. De nombreux progrès ont déjà été enregistrés depuis le temps où j'étais moi-même industriel, mais il reste beaucoup à faire et c'est là l'une de nos priorités. Lorsque nous intervenons dans le soutien, par nos fonds propres, aux projets innovants, nous facilitons ce transfert. D'ailleurs, parmi les lauréats des concours d'innovation que nous lançons se trouvent des candidats issus de structures universitaires.

S'agissant de la recherche sur le médicament, j'ai présidé le conseil d'administration d'une grande entreprise pharmaceutique pendant sept ans. Disons-le, ces entreprises sont loin de manquer d'argent et leur recherche vise avant tout à maximiser la rentabilité de leurs produits. Or, les antibiotiques ne sont pas rentables puisqu'ils ne sont pas destinés à être pris sur une longue durée. Nous n'allons pas financer ces grands groupes pharmaceutiques, mais nous tentons d'encourager le développement de nouvelles approches. Ainsi, l'IHU de Marseille, qui est à la pointe sur les maladies infectieuses, réalise des tests et contribue à l'innovation dans ce domaine, tout comme d'ailleurs l'IHU de Lyon. Ces projets ne sont toutefois pas soutenus au même niveau que les programmes que conduisent les grands groupes du secteur.

Nous acceptons une certaine prise de risques car il faut que nous adoptions l'esprit de ceux qui, aux États-Unis notamment, investissent dans le capital-risque, où les échecs sont compensés par les réussites. Il nous faut trouver un équilibre et éviter de paraître économiquement conservateurs.

Quels sont les problèmes si le porteur du projet n'est pas solide ? Ce point nous préoccupe ; nous essayons de susciter des partenariats entre entreprises pour soutenir les projets avec des appuis réels.

Quelle est l'indépendance de notre Commissariat général ? C'est un service du Premier ministre, au nom duquel je signe des décisions par délégation. Nous ne sommes donc pas une autorité administrative indépendante (AAI). Dans le même temps, nous faisons en sorte d'échapper aux procédures administratives les plus traditionnelles. D'une part, nous disposons dans toutes nos actions d'un mécanisme d'évaluation qui est provisionné. D'autre part, celles-ci font l'objet d'un suivi structurel, à l'instar de l'expertise indépendante dont fait l'objet le fonctionnement des SATT sur une base triennale, ainsi que les autres organismes que nous avons mis en place selon des périodicités différentes. Ces expertises ne sont pas des formalités se caractérisant par leur légèreté. Nous déléguons le suivi de nos 2 500 projets aux différents opérateurs dont c'est le métier. Ainsi, BPI, qui dispose des mêmes moyens qu'une banque pour ce faire, suit la plupart des projets s'inscrivant dans le champ de l'économie concurrentielle.

Quelles relations avons-nous avec le Parlement ? Nous essayons de retenir son avis dans le cadre de la procédure budgétaire et si, à l'occasion de l'examen du PIA 3, les orientations que nous proposons n'étaient pas confirmées, il faudrait nous soumettre sans nous démettre !

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