Intervention de David Assouline

Commission de la culture, de l'éducation et de la communication — Réunion du 4 novembre 2015 à 14h20
Audition de Mme Delphine Ernotte-cunci présidente de france télévisions

Photo de David AssoulineDavid Assouline :

Vous êtes, madame la présidente, à la tête d'une entreprise « comme les autres », avez-vous dit, mais avec la définition que vous nous en avez donnée, pas tout à fait comme les autres, puisque vous considérez que l'ensemble des citoyens en sont les actionnaires. Un de nos collègues qui siégeait dans notre commission déclarait que la redevance s'apparentait à une sorte d'actionnariat populaire, un « tuyau » direct vers le service public dont le principe était vertueux. Si nous appliquions le système de la redevance tel qu'il existe en Allemagne, son bénéfice irait directement dans le budget de l'Etat et cette contribution ne serait pas sanctuarisée. L'objectif est d'élargir l'assiette et nous le soutiendrons.

Vous évoluez, madame la présidente, dans un environnement audiovisuel en profond mouvement et que je trouve inquiétant. La concentration, de plus en plus importante et avec d'énormes moyens, entre les mains d'actionnaires dont la préoccupation première n'est pas le monde des médias et de l'audiovisuel et qui, dans leur activité, du bâtiment et travaux publics ou autres, vivent de la commande publique, n'est pas très saine pour la démocratie. Notre rôle de législateur est non seulement de réfléchir au service public mais également de veiller à mettre de l'ordre dans ce nouvel environnement où France Télévisions face à la concurrence devra être défendue et se défendre elle-même en revendiquant sa mission de service public. En tant que socialistes, nous serons de tous les combats pour la défense du service public de l'audiovisuel quand il sera fragilisé.

Le projet de rachat de Newen par TF1 est scandaleux quand on sait l'énergie et l'investissement qu'a déployés France Télévisions dans sa collaboration avec ce producteur. Le fait de travailler avec des producteurs indépendants et non pas avec une société française de production (SFP) intégrée a certes posé quelques problèmes auxquels le rapport Plancade de 2013 sur la production audiovisuelle et un amendement adopté à mon initiative lors de l'examen du projet de loi sur l'indépendance de l'audiovisuel public ont tenté de remédier. Mais, aujourd'hui, le statu quo a explosé. Ne pensez-vous pas qu'il est urgent qu'un vrai débat s'organise sur ce sujet, en dehors des corporatismes diffuseurs/producteurs ? La réglementation ne devrait-elle pas évoluer pour protéger l'investissement de l'argent public dans la création ? Pour être défendue, la mission de service public doit être comprise par le public.

Le coeur de cible d'une audience vieillissante et qui continue de vieillir risque à terme d'atteindre son point de rupture. L'objectif de rajeunissement de l'audience par les contenus et les propositions d'adaptation aux nouveaux usages est un axe que nous soutiendrons.

S'agissant de la chaîne d'information, à une époque où les jeunes adhèrent à l'offre d'information en continu, à la télévision ou sur internet, il n'est plus possible que la mission fondamentale du service public d'information se limite à un journal télévisé à 20 heures s'inspirant de la une du matin même sur les chaînes d'information en continu. Le Figaro va, paraît-il, ouvrir une chaîne d'information sur le net. La concurrence profite à l'information, mais le service public se doit avant tout, avec environ 3 000 journalistes et une légitimité à l'international, de fournir une information de qualité, un pilotage et un décryptage sérieux de l'information. Je vous encourage donc, madame la présidente, à aller au-delà du net et à créer une chaîne d'information utile à notre pays.

Le financement de France Télévisions a été fragilisé par la loi à un moment où ce groupe ne connaissait pas de problème financier. Indépendamment du montant de l'assiette, un débat politique, toutes tendances confondues, devra se tenir sur le montant de la redevance audiovisuelle, actuellement de 137 euros en France, 186 euros au Royaume Uni, 216 euros en Allemagne, 320 euros au Danemark. Quelques euros de plus stabiliseraient complètement le fonctionnement de France Télévisions. C'est de cette manière que nous entendons défendre le service public.

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