Intervention de Philippe Duron

Commission mixte paritaire — Réunion du 10 novembre 2015 à 14h00
Commission mixte paritaire sur la proposition de loi tendant à consolider et clarifier l'organisation de la manutention dans les ports maritimes

Philippe Duron, rapporteur pour l'Assemblée nationale :

Je propose un retour à la rédaction de l'article 5 adopté par l'Assemblée nationale pour deux raisons.

Premièrement, la rédaction de l'article 5 telle qu'adoptée par l'Assemblée nationale permet de sécuriser le cadre dans lequel travaillent les dockers occasionnels. Il s'agit de travailleurs qui peuvent être considérés comme des travailleurs précaires.

Cette rédaction se veut donc protectrice et c'est pourquoi le premier alinéa de l'article L. 5343-6, qui a été supprimé au Sénat, fait explicitement référence à la notion de CDD d'usage constant. Elle inscrit dans la loi ce qui est déjà prévu par la convention collective nationale unifiée ports et manutention du 15 avril 2011.

C'est dans le même objectif de protection des travailleurs précaires que l'avant-dernier alinéa de l'article L. 5343-6 prévoit que les dockers occasionnels doivent être employés dans le respect : d'une part, de l'article L. 1242-1 du code du travail, qui prévoit qu'« un contrat de travail à durée déterminée, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise » ; d'autre part, du principe de mensualisation posé par l'article L. 5343-3 du code des transports.

Cela permet d'éviter que le recours aux CDD d'usage constant ne soit employé de manière abusive, pour pourvoir des postes qui relèvent en fait d'un CDI. Je remarque que cet avant-dernier alinéa n'a d'ailleurs pas été supprimé au Sénat.

Deuxième raison : la rédaction de l'article 5 a été modifiée par le Sénat au motif que la définition des ouvriers dockers occasionnels qu'elle introduit rend plus difficile le recours à l'intérim classique, tel qu'il est pratiqué dans certains ports grâce à la souplesse du cadre juridique actuel. L'article 5 ajouterait une strate supplémentaire de priorité d'emploi des dockers, en imposant une priorité d'emploi des dockers occasionnels.

Je rappelle que la priorité d'emploi des dockers occasionnels sur toute main-d'oeuvre non-docker est déjà prévue par le code des transports depuis 1992. En effet, l'article L. 5343-7, qui reprend l'article L. 511-2 du code des ports maritimes dispose que « Pour les travaux de manutention définis par voie réglementaire, les employeurs, lorsqu'ils n'utilisent pas uniquement des dockers professionnels mensualisés, ont recours en priorité aux dockers professionnels intermittents puis, à défaut, aux dockers occasionnels. »

Adopter la rédaction de l'article 5 proposée par le Sénat reviendrait donc à couvrir du voile de la loi des pratiques illégales qui vont à l'encontre d'un principe posé par le code des transports. C'est pourquoi j'appelle l'ensemble des membres composant cette commission à adopter le rétablissement de la rédaction de l'article 5 adoptée par l'Assemblée nationale.

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