Intervention de Cédric Perrin

Réunion du 16 novembre 2015 à 21h30
Rôle déterminant des territoires pour la réussite d'un accord mondial ambitieux sur le climat — Discussion d'une proposition de résolution

Photo de Cédric PerrinCédric Perrin :

Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, je salue la mobilisation pour la réussite de la COP 21 du Sénat et du groupe de travail présidé par notre collègue Jérôme Bignon, auteur de la présente proposition de résolution. Je remercie le président Larcher d’avoir pris l’initiative d’organiser ce débat.

La mobilisation des territoires est essentielle pour la réussite de la négociation et pour la concrétisation des engagements qui seront pris.

La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées s’est naturellement intéressée aux conséquences géopolitiques du dérèglement climatique, au travers d’un rapport d’information que j’ai rédigé avec Leila Aïchi et Éliane Giraud, par-delà tout clivage partisan.

Ces conséquences géopolitiques tiennent, en premier lieu, aux effets de la montée du niveau de la mer. En 2035, 75 % des habitants de la planète vivront en zone côtière. En l’absence de mesures d’adaptation, les dommages aux biens pourraient atteindre 1 000 milliards de dollars par an. De nombreuses métropoles de pays pauvres, émergents ou industrialisés sont confrontées à ce danger. Les frontières maritimes pourraient être remises en cause ; c’est aussi un enjeu important pour la France, qui vient d’agrandir sa zone économique exclusive, la deuxième au monde avec 11, 5 millions de kilomètres carrés.

La question des déplacés environnementaux ne pourra être longtemps éludée. Leur nombre pourrait atteindre 200 millions d’ici à 2050.

Le changement climatique ne constitue pas, à lui seul, une menace géopolitique ; il est un multiplicateur de menaces, là où les gouvernements sont faibles, en proie à des tensions internes ou déjà confrontés à une pénurie de ressources.

Par ailleurs, nous avons examiné la situation de l’Arctique. Le réchauffement climatique pourrait modifier les routes du commerce maritime mondial. Or 95 % des échanges commerciaux internationaux se font par voie maritime. Les activités de pêche, d’agriculture, d’extraction de matières premières subiront, dans le grand Nord, l’impact du réchauffement. Les pays asiatiques se positionnent pour tirer parti de ces évolutions. Agissant là encore comme multiplicateur de menaces, le réchauffement pourrait amplifier les tensions existant avec la Russie, qui revendique une large part du territoire arctique, jusqu’au pôle Nord.

Sur l’ensemble de ces sujets, il existe toutefois aussi des raisons d’espérer, dans la mesure où la lutte contre le changement climatique fournit l’occasion de manifester une plus grande solidarité internationale.

La France a tardé à prendre en compte ces phénomènes dans sa réflexion stratégique, alors que les États-Unis y travaillent depuis plus d’une décennie. Le prochain Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale devra intégrer les évolutions stratégiques inhérentes au dérèglement climatique. La prise de conscience des enjeux s’affirme progressivement à l’échelle internationale, du moins dans l’analyse, sinon dans les actes.

Sans sombrer dans un catastrophisme anxiogène, nous avons le devoir d’expliquer à nos concitoyens la réalité des incidences possibles du dérèglement climatique. Anticiper, informer, planifier, telles sont nos missions. Parvenir à un accord à Paris est essentiel, mais nous devrons ensuite rester pleinement mobilisés, à tous les niveaux, pour imaginer des solutions nouvelles, mettre en place des modalités de coopération inédites, afin de limiter les effets de mutations devenues inéluctables, sinon dans leur ampleur, du moins dans leur principe.

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