Intervention de Jacqueline Gourault

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 18 novembre 2015 à 8h35
Loi de finances 2016 — Mission « relations avec les collectivités territoriales » - examen du rapport pour avis

Photo de Jacqueline GouraultJacqueline Gourault, rapporteur pour avis :

La mission « Relations avec les collectivités territoriales » est dotée dans le projet de loi de finances pour 2016 de 3,83 milliards d'euros en autorisations d'engagement et de 3 milliards d'euros en crédits de paiement, ce qui ne représente que 3,8 % - c'est ce dernier chiffre qui est important - des transferts financiers de l'État en faveur des collectivités territoriales, qui s'élèveraient, au titre du budget 2016, à 99,7 milliards d'euros. Dans les crédits de la mission, figure la dotation supplémentaire de soutien à l'investissement des communes et de leurs groupements. En revanche, ne sont pas compris ceux de la dotation globale de fonctionnement (DGF).

Le budget 2016 s'inscrit dans un contexte très particulier, marqué par une nouvelle participation des collectivités territoriales à l'effort de redressement des finances publiques. Dans le cadre du plan d'économies de 50 milliards d'euros sur la période 2015-2017, les collectivités territoriales participent à cet effort à hauteur de 11 milliards d'euros, soit un abattement annuel de 3,67 milliards d'euros sur trois ans. La baisse de la DGF pour 2016 s'élèvera donc de nouveau à ce niveau-là.

Cette nouvelle baisse pose la question de ses conséquences sur l'investissement local et l'exercice des politiques publiques locales. La Cour des comptes et la Banque Postale se sont inquiétées d'une baisse durable de l'investissement des collectivités territoriales, la Cour des comptes estimant que « la baisse de la DGF risque d'affecter la capacité de financement des collectivités locales ». C'est une question sur laquelle nous devons être vigilants. C'est pourquoi je signale qu'un amendement, adopté par la commission des finances du Sénat, réduit de 1,6 milliard d'euros la baisse de la DGF.

Cette baisse s'inscrit par ailleurs dans le cadre d'une réforme de l'architecture de la DGF des communes et des intercommunalités, destinée à la rendre plus juste, plus équitable, plus lisible. La réforme proposée s'appuie sur les travaux de Mme Pires Beaune et de notre regretté collègue Jean Germain. Je ne veux pas entrer dans le détail de la réforme compte tenu du fait que nous en avons longuement débattu hier soir en séance publique.

On peut se féliciter du report de la mise en oeuvre de cette réforme au 1er janvier 2017, compte tenu de la révision actuelle des schémas départementaux de coopération intercommunale, qui entrera en vigueur à cette date, et de la réalisation de simulations précises pour permettre à nos collectivités d'avoir une vision à moyen terme de leurs ressources budgétaires. Cette réforme de la DGF me paraît nécessaire. On peut en revanche regretter qu'un projet de loi spécifique n'ait pas été privilégié par le Gouvernement pour permettre un débat serein et apaisé sur une réforme d'une telle ampleur.

Dans mon rapport pour avis, j'aborde également la création des communes nouvelles. La loi du 16 mars 2015 a prévu plusieurs incitations budgétaires qui s'appliquent aux communes nouvelles créées avant le 1er janvier 2016. Selon les informations que j'ai pu recueillir, au 28 octobre 2015, 54 arrêtés préfectoraux, portant sur 191 communes et une population de 253 000 habitants, ont été signés. Une centaine d'autres projets de communes nouvelles pourraient aboutir d'ici le 1er janvier 2016, les conseils municipaux concernés ayant déjà délibéré ou ayant prévu de le faire d'ici la fin de l'année. Enfin, 200 autres projets de communes nouvelles font actuellement l'objet d'une réflexion à un stade plus ou moins avancé.

Pour ne pas casser cette dynamique, l'Assemblée nationale a adopté un amendement reportant au 30 juin 2016 le bénéfice des avantages financiers, à condition que les communes souhaitant fusionner aient délibéré en ce sens avant le 31 mars 2016. Notre commission des finances est allée plus loin, en repoussant au 1er janvier 2017 la date limite de création des communes nouvelles pour bénéficier de l'ensemble des garanties prévues par la loi du 16 mars 2015. Quelle que soit la date qui sera finalement retenue, on ne peut que se féliciter de ce report. Mais il est vrai que ces avantages s'inscrivent dans une enveloppe normée. Un abondement de la DGF à due concurrence du « coût » des communes nouvelles mériterait à mon sens d'être prévu afin que la création de ces dernières ne pèse pas sur la DGF de l'ensemble des communes.

Enfin, j'aborde dans mon rapport la nouvelle répartition de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) en faveur des régions, mais au détriment des départements. Le projet de loi de finances pour 2016 propose, qu'à compter du 1er janvier 2017, les régions bénéficient de 50 % de CVAE, contre 25 % aujourd'hui, la différence étant prélevée sur la part dont bénéficient aujourd'hui les départements (48,5 %). Si on peut saluer la volonté du Gouvernement d'assurer aux régions des ressources suffisantes pour leur permettre d'exercer leurs nouvelles compétences, je ne suis pas totalement convaincue par le dispositif proposé qui ponctionne une part de fiscalité importante des départements, alors que la situation financière de ces derniers est difficile, certains d'entre eux pouvant se trouver dans une situation de quasi-faillite d'ici quelques mois. D'autre part, les transferts de compétences que nous avons finalement votés ne justifient que partiellement ce transfert de CVAE.

À titre personnel, je considère qu'il conviendrait de mener une réforme plus ambitieuse de répartition des ressources entre chaque niveau de collectivités, afin de leur permettre d'assumer les compétences que la loi leur attribue, tout en veillant à préserver la soutenabilité des finances publiques.

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