Intervention de Daniel Reiner

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 25 novembre 2015 à 9h00
Loi de finances pour 2016 — Programme 146 - équipement des forces - mission « défense » - examen du rapport pour avis

Photo de Daniel ReinerDaniel Reiner, rapporteur :

Comme Jacques Gautier l'a indiqué, les conditions d'entrée dans l'exécution du budget 2016 de la défense, qui sera la première annuité de la LPM actualisée, dépendent des conditions de gestion de la fin de l'exécution 2015. Notre commission est particulièrement vigilante sur le respect de la LPM, notamment en ce qui concerne sa trajectoire financière. Cette vigilance se trouve aujourd'hui récompensée : le projet de loi de finances rectificative (PLFR) qui a été déposé à l'Assemblée nationale le 13 novembre dernier règle cette question, complété par le traditionnel décret d'avance de fin d'année, encore à venir. Notons d'ailleurs qu'il s'agira du troisième décret d'avance de cette année, et que les deux précédents n'ont pas amputé les crédits de la défense.

Les besoins de fin de gestion sont, au total, de 3,17 milliards d'euros. Ils se décomposent en quatre domaines.

Premièrement, la conversion en crédits budgétaires des ressources exceptionnelles (REX) initialement attendues de la cession de la bande de fréquences des 700 MHz, soit 2,15 milliards d'euros. Cette mesure, décidée dans la loi du 28 juillet 2015 d'actualisation de la programmation militaire, figure bien dans le PLFR. Je signale d'ailleurs que le ministère chargé de l'économie a fait état d'un produit de 2,8 milliards d'euros à l'issue du processus de cession d'une partie de la bande des 700 MHz aux opérateurs de téléphonie mobile qui s'est conclu le 18 novembre dernier.

Deuxièmement, la couverture des surcoûts nets d'opérations extérieures (OPEX), au-delà des 450 millions d'euros prévus dans la loi de finances initiale pour 2015 conformément à la règle fixée par la LPM. Ces surcoûts sont aujourd'hui évalués à 625 millions d'euros. Il convient de leur ajouter le surcoût induit par l'opération « Sentinelle », désormais évalué à 171 millions d'euros. Les crédits nécessaires seront ouverts à due concurrence par le décret d'avance annoncé.

Troisièmement, le remboursement au programme 146 du coût net de l'annulation de la vente des BPC de classe Mistral à la Russie, qui a été prélevé sur ce programme en août dernier. Il s'agit de près de 57 millions d'euros. Ils sont restitués, comme prévu, par le PLFR.

Quatrièmement et enfin, le financement des besoins de masse salariale, hors OPEX et opération « Sentinelle », résultant de l'actualisation de la manoeuvre « RH » par la loi du 28 juillet 2015 et des dysfonctionnements persistants du logiciel Louvois. Au total, ce besoin s'élève à environ 150 millions d'euros. Ils sont prévus par le décret d'avance.

Certes, ce décret d'avance et le PLFR comporteront aussi des annulations de crédits pour le ministère de la défense, à hauteur de 298 millions d'euros au total. Néanmoins, sur ce montant, seuls 200 millions d'euros relèvent du périmètre financier de la programmation militaire ; le reste sera imputé sur la mission « Anciens combattants » et le programme 191 « Recherche duale (civile et militaire) » de la mission « Recherche et enseignement supérieur ». En outre, pour ce qui concerne le périmètre « LPM », l'essentiel des annulations - un montant de 187 millions d'euros - tient aux intérêts générés par les versements français à l'Organisation conjointe de coopération en matière d'armement (OCCAr) et gardés en trésorerie dans les comptes de celle-ci.

J'ajoute que ces annulations représentent une baisse de la part prise par la défense dans l'ensemble des annulations prévues au sein du budget général de l'État, au titre de la régulation de fin d'exercice. En effet, les 298 millions d'euros en cause cette année correspondent à 14,3 % du total des annulations, alors que la ponction sur la défense, les années antérieures, était de l'ordre de 18 à 20 %. Enfin, l'enveloppe du programme 146 n'est pas affectée par ces annulations ; le programme d'équipement a ainsi été sanctuarisé.

En conclusion, les arbitrages de fin de gestion ont été parfaitement convenables pour le respect des besoins de notre outil défense. La seule difficulté sera d'ordre technique : elle consistera, pour la DGA, à dépenser 2,2 milliards d'euros en quelques heures, entre la publication de la loi de finances rectificative pour 2015 et la clôture de cet exercice.

S'agissant de l'état d'avancement des programmes, en complément de ce qu'a exposé Jacques Gautier, je détaillerai d'abord ce qui est prévu, l'année prochaine, pour le système de forces « Engagement et combat ».

En ce domaine, seront d'abord livrés 9 avions Rafale, dont 3 Rafale Marine F1 rétrofités au standard F3. Un mot ici s'impose, pour se réjouir que se trouve à présent levée l'hypothèque budgétaire liée au « pari » de l'exportation du Rafale, qui pesait sur la programmation militaire à hauteur d'environ 4 milliards d'euros pour la période 2016-2019, l'État s'étant engagé à maintenir un rythme d'acquisition de onze appareils par an en cas de non réalisation des objectifs d'export. Les marchés conclus au profit de l'Égypte - 24 appareils, en février dernier - et du Qatar - 24 appareils encore, au mois de mai - garantissent la charge de la chaîne industrielle Rafale. On attend la confirmation de la commande indienne - une première tranche de 36 appareils a été annoncée en avril 2015 - et le prochain aboutissement d'autres prospects. Pour tout dire, on attend aussi le versement du premier acompte du Qatar, sans lequel le contrat n'est toujours pas en vigueur...

L'année prochaine verra également la livraison, entre autres, d'une frégate multi-missions (FREMM), de 5 hélicoptères Tigre et de 25 véhicules poids lourds pour les forces spéciales. Seront commandés, par ailleurs : la régénération de véhicules blindés légers (VBL) ; la rénovation du Mirage 2000D ; un prototype du futur système de drone de lutte anti-mines marines (SLAMF) ; des roquettes à précision métrique pour l'hélicoptère Tigre, qui ont été prévues par l'actualisation de la LPM ; enfin, la réalisation de la future arme individuelle du fantassin (AIF).

Nous suivons avec beaucoup d'attention cette dernière opération, qui vise à remplacer le FAMAS, en service dans l'armée française depuis 1979. L'arme future sera au standard OTAN et s'intégrera dans le système FÉLIN (« fantassin à équipements et liaisons intégrés »). Dans le cadre d'un appel d'offres, cinq industriels ont été retenus par la DGA et ont fourni à celle-ci, au mois d'août 2015, le matériel qu'ils proposent. Les essais et les évaluations sont en cours. La section technique de l'armée de terre (STAT) a défini un plan d'essais et d'évaluations qui court de septembre 2015 à mars 2016 ; son objectif est de remettre à la DGA un rapport d'évaluation fin mars 2016, classant les fusils selon les critères technico-opérationnels issus de l'expression du besoin militaire. Le marché devrait ainsi être notifié à la fin de l'année 2016. Il n'y a pas d'offre française, mais il est possible que des entreprises françaises, indirectement, participent à cette opération.

Toujours dans le domaine des équipements relevant du système « Engagement et combat », nous exprimons le souhait que les améliorations techniques qui sont en train d'être apportées par Airbus Helicopters au système de filtre du moteur de l'hélicoptère Caracal, et qui doivent être disponibles pour l'exportation, bénéficient également aux appareils en service dans les armées françaises. Ces ajustements sont réalisés, je le rappelle, à la suite des difficultés de maintien en condition opérationnelle rencontrées pour le Caracal dans la bande sahélo-saharienne, du fait des spécificités du sable, particulièrement abrasif, sur lequel l'hélicoptère doit évoluer.

Par ailleurs, nous préconisons d'anticiper, autant que possible, la commande des premiers véhicules blindés multi-rôles (VBMR) - baptisés « Griffon » -, compte tenu de l'importance de ces véhicules pour les opérations de l'armée de terre. Cette commande, à passer dans le cadre du programme SCORPION, est actuellement prévue en 2017, pour de premières livraisons en 2018.

Pour finir, je signale que le système de forces « Protection et sauvegarde » fera l'objet, l'année prochaine, des livraisons, notamment, de 2 bâtiments multi-missions (B2M) et d'un patrouilleur léger guyanais. Les commandes concerneront, entre autres, 2 bâtiments de soutien et d'assistance hauturiers (BSAH) et un bâtiment multi-missions (B2M). Tout cela est conforme à la LPM actualisée.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion