Le programme 144 « Environnement et prospective de la politique de défense » représente 1,28 milliard d'euros dans le projet de loi de finances pour 2016, soit 3,2 % des crédits de paiement prévus pour la mission « Défense » l'année prochaine. Ce programme est en effet modeste par le volume financier, mais il constitue le coeur de la fonction « connaissance et anticipation » de notre outil de défense.
Par rapport à la prévision pour 2015, les crédits de paiement sont en baisse de 3,7 %. Cette évolution est liée, pour l'essentiel, au redéploiement, en faveur des opérations d'armement du programme 146, des économies engendrées, sur le programme 144, par l'évolution des indices économiques, donc du coût des facteurs, depuis décembre 2013. Cela est conforme à la loi de programmation militaire (LPM) actualisée.
Ces crédits devront bien sûr couvrir le report de charges du programme issu de l'exécution budgétaire 2015. Ce report est estimé à 128 millions d'euros. Par rapport à l'année dernière, c'est une amélioration : le report de charges est moindre de 27 %.
Les priorités du programme 144 sont, conformément au Livre blanc de 2013 et à la LPM actualisée, d'une part, la réaffirmation du rôle central du renseignement - dont parlera tout à l'heure Jeanny Lorgeoux - et, d'autre part, la consolidation des efforts de recherche de défense et le maintien de la capacité d'influence de la France.
Je commencerai par ce qui concerne la recherche de défense. Les études amont font l'objet pour 2016 d'une prévision de 706 millions d'euros de crédits de paiement ; c'est là plus de la moitié des crédits du programme 144. Par rapport à 2015, il s'agit d'une diminution de 4,5%. Cependant, comme l'a confirmé le délégué général pour l'armement, lors de son audition par notre commission le 21 octobre dernier, cela ne remet pas en cause l'objectif fixé en matière d'études amont par la LPM, soit 730 millions d'euros en moyenne annuelle sur la période 2014-2019. Nous resterons bien sûr vigilants quant au respect de cet objectif !
L'analyse stratégique, de son côté, doit bénéficier de 6 millions d'euros en crédits de paiement - montant quasiment stable par rapport à 2015 -, mais de 9,7 millions d'euros en autorisations d'engagement, soit une forte augmentation : + 59 %. Il s'agit d'une conséquence de la réforme du soutien à la recherche stratégique actuellement mise en oeuvre. Le ministère de la défense, en effet, pour donner plus de prévisibilité et ainsi améliorer le pilotage des études, met en place des contrats-cadres, augmente les études de type « observatoire », et entend développer de nouvelles relations avec l'université. Ce sont des évolutions positives.
Tous programmes confondus, le budget total consacré à la recherche et développement (R&D) de la défense sera, l'année prochaine, de 3,78 milliards d'euros. C'est une augmentation de près de 10 % en deux ans et de 25 % en trois ans, et un tel niveau, en la matière, n'avait pas été atteint depuis 2009. Il faut bien sûr s'en réjouir : malgré les contraintes financières, la France est ainsi le pays d'Europe qui consacre le plus gros effort budgétaire à sa R&D de défense.
Dans ce contexte, nous sommes préoccupés par les difficultés de l'ONERA - l'Office national d'études et de recherches aérospatiales, opérateur du programme 144. La Cour des comptes a mis en lumière des problèmes, à la fois, de gouvernance, de ressources et d'infrastructures. La situation appelle des solutions de moyen terme, pour assurer l'avenir de l'établissement, en commençant par la production d'un contrat d'objectifs et de performance, dont l'élaboration est en cours. Mais il faut aussi apporter des réponses d'urgence, car la soufflerie de Modane s'avère mise en danger par un affaissement des sols et l'immeuble de Châtillon n'est pas aux normes de sécurité. Afin de traiter ces urgences, nous proposons un amendement, rédigé en concertation avec nos collègues rapporteurs du programme 146. Cet amendement majore, de 15 millions d'euros, la subvention prévue pour l'ONERA à hauteur de 105 millions d'euros par le projet de loi de finances, montant qui n'est pas suffisant pour équilibrer le budget de l'Office. Ces 15 millions d'euros supplémentaires seront pris sur le programme 146, sans remettre en cause d'opérations d'armement. Il s'agit de préserver cet outil d'excellence qu'est l'ONERA, car il est essentiel pour la filière aéronautique.
J'en viens à la capacité d'influence internationale de la France. À cet égard, le programme 144 est marqué par la création, en janvier dernier, de la direction générale des relations internationales et de la stratégie (DGRIS), qui tend à rationalisation la fonction « relations internationales » du ministère de la défense. Je rappelle que la DGRIS est née de la fusion de l'ancienne délégation aux affaires stratégiques (DAS) et d'éléments de l'état-major des armées et de la direction générale de l'armement (DGA). Elle dispose de 213 agents, et sa création permet l'économie de 57 équivalents temps plein sur le périmètre « relations internationales » de la défense. La mise en place s'est bien déroulée.
Pour les actions de coopération et de diplomatie de défense pilotées par la DGRIS, près de 41 millions d'euros sont prévus en 2016. Mais plus des deux tiers de cette somme - 27 millions d'euros - tiennent à l'aide versée à la République de Djibouti, au titre de l'implantation des forces françaises, en application du traité international entre nos deux pays. Le reste des crédits est destiné à financer, notamment, le fonctionnement du réseau des attachés de défense en ambassade.