Intervention de Claire Cheremetinski

Délégation sénatoriale à l'Outre-mer — Réunion du 26 novembre 2015 : 1ère réunion
Conséquences des accords commerciaux entre l'union européenne et les pays tiers -Audition de mmes claire cheremetinski sous-directrice de la politique commerciale et de l'investissement valérie liang-champrenault chef du bureau politique agricole commune et alexandra marie adjointe au chef de bureau à la direction générale du trésor

Claire Cheremetinski, sous-directrice de la politique commerciale et de l'investissement à la Direction générale du trésor :

Notre sous-direction, au sein de la direction générale du Trésor, est en charge de la politique commerciale et de l'investissement ; elle assure le suivi des négociations commerciales entre l'Union européenne et les États tiers ainsi qu'à l'OMC en étant rattachée au ministère des affaires étrangères, compétent en matière de commerce extérieur, et au ministère de l'économie. Dans les négociations à Bruxelles, nous préparons et portons la position française.

La négociation de l'accord de libre-échange avec le Vietnam a été lancée en octobre 2012 et conclu après seulement quatorze cycles. Un accord de principe est intervenu au cours de l'été, nécessitant encore un affinage de la rédaction. Globalement, cet accord est très satisfaisant pour les intérêts français car l'ouverture des marchés y est traitée de façon symétrique alors même que le Vietnam est classé dans la catégorie des pays à revenu intermédiaire inférieur. Or, la France a de nombreux intérêts offensifs dans cette négociation, dans les secteurs industriel, agricole et des services mais aussi en matière de marchés publics. L'offre tarifaire vietnamienne ne nous a pas encore été communiquée mais nous savons que le projet d'accord prévoit une ouverture très large et symétrique, avec des périodes de libéralisation qui pourront s'étaler sur une durée maximale de sept années, sauf pour onze produits agricoles sensibles français traités sous forme de contingents à droits nuls dont le sucre, l'éthanol, les produits amylacés, le riz, le maïs doux, les champignons, l'ail, le thon en conserve, le surimi, les produits à base d'oeuf. La Commission européenne a présenté, le 30 juillet 2015, le résultat de sa négociation sur le sucre et les produits à haute teneur en sucre, dans lesquels sont inclus les sucres spéciaux : a ainsi été octroyé au Vietnam un contingent de 20 000 tonnes. Nous avons fait part de notre déception puisque nous avions demandé l'exclusion des sucres spéciaux de l'accord ou, a minima, un contingent ciblé réduit. Une lettre signée de trois ministres, le secrétaire d'État au commerce extérieur, le ministre de l'agriculture et la ministre de l'outre-mer, a été adressée à la mi-septembre à la commissaire européenne au commerce réitérant la demande d'exclusion des sucres spéciaux, mais la Commission européenne a opposé un refus, expliquant qu'il n'y avait pas de danger d'exportation massive vietnamienne vers l'Union européenne et que l'accord comprenait une clause de sauvegarde permettant de suspendre les préférences tarifaires en cas d'afflux déstabilisateur du marché. Nous continuons cependant de plaider en faveur d'une exclusion ou, à défaut, d'un contingent réduit et espérons une solution en ce sens ; si aujourd'hui la Commission campe sur une fin de non-recevoir, le Gouvernement français est déterminé à faire valoir sa position.

Dans l'accord de libre-échange conclu avec l'Afrique du Sud, nous avions obtenu une exclusion couvrant trois des quatre lignes tarifaires mentionnant des sucres spéciaux ; la ligne non prise en compte est une ligne fourre-tout pour les produits qui n'entrent pas dans les trois autres rubriques.

La Commission nous objecte que dans les préférences accordées aux pays les moins avancés produisant des sucres spéciaux ou en ayant la capacité la France n'a exigé aucune protection et que, de facto, aucun afflux n'a été enregistré. Elle réfute le danger et une mise en perspective dynamique tenant compte des potentialités des pays producteurs ; or, le Vietnam, qui a d'ores et déjà la capacité de produire des sucres roux, pourrait saisir l'opportunité offerte par le contingent accordé pour réorienter sa production vers les sucres spéciaux à plus haute valeur ajoutée et investir le marché européen. La Commission a l'intention de conclure définitivement cet accord avant la fin de l'année.

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