Intervention de Jean-Claude Requier

Réunion du 15 décembre 2015 à 16h45
Débat préalable à la réunion du conseil européen des 17 et 18 décembre 2015

Photo de Jean-Claude RequierJean-Claude Requier :

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des affaires européennes, monsieur le rapporteur général de la commission des finances, mes chers collègues, une nouvelle fois, la crise migratoire sera à l’agenda du prochain Conseil européen avec, en toile de fond, le problème du contrôle des frontières, une préoccupation devenue encore plus aiguë depuis que l’on sait que deux des auteurs présumés des attentats du 13 novembre, à Paris, s’étaient mêlés au flot des réfugiés syriens pour gagner la France.

Si l’on ne doit pas faire d’amalgame entre réfugiés et terroristes, force est de constater que, depuis les attentats, les portes de l’Europe se ferment : au début du mois de décembre, la Suède a pris des mesures pour stopper l’arrivée des réfugiés sur son sol ; la Belgique a rétabli des contrôles d’identité pour l’accès à son territoire ; la Grèce pourrait être suspendue de l’espace Schengen ; et l’idée d’un « mini Schengen » est avancée par le président néerlandais.

Toutes les initiatives récentes convergent, on le voit, vers un retour au contrôle des frontières nationales.

L’espace Schengen est ainsi dépassé, pour ne pas dire menacé. La solidarité européenne est fortement mise à l’épreuve. Or je tiens à souligner que toute réponse nationale serait insuffisante face à l’ampleur du défi migratoire.

Mais tant que le conflit syrien ne sera pas réglé, les réfugiés continueront d’affluer aux portes de l’Europe, avec le risque de l’infiltration, via des chemins migratoires trop poreux, de quelques-uns des 5 000 citoyens européens embrigadés au sein des organisations terroristes.

Aussi, il est urgent que l’Europe se reprenne, d’une part, pour garantir sa cohésion et, d’autre part, pour conserver une tradition d’accueil conforme aux valeurs qui sont les siennes, tout en se protégeant.

L’espace Schengen s’est voulu une grande ambition au sein de l’Union européenne. Mais lui avons-nous donné les moyens de se réaliser dans les meilleures conditions ? Sans doute pas...

Il ne s’agit pas non plus de dire que rien n’a été fait. Cette année, pas moins de cinq sommets européens se sont emparés de la question migratoire et ont notamment abouti à la politique de relocalisations-réinstallations dont on peut certes contester le rythme, mais qui a le mérite d’exister.

Dans tous les cas, le mécanisme permanent de répartition des réfugiés est toujours apparu, aux yeux du RDSE, comme le moins mauvais des instruments.

L’accord qui vient d’être scellé avec la Turquie pour réduire le flux des réfugiés et des migrants va aussi dans le bon sens, même si Ankara ne s’est pas engagée sur des objectifs chiffrés.

Mes chers collègues, l’espace de Schengen est « partiellement comateux », pour reprendre les propos du président de la Commission, Jean-Claude Juncker. Cependant, nous ne devons pas renoncer à cette zone de libre circulation, car, selon le cabinet Control Risk, la principale menace pour l’économie européenne serait non pas le démantèlement de la zone euro, mais plutôt la fermeture des frontières intra-européennes.

Pour autant, je crois que nous sommes nombreux à partager l’idée qu’il faut revoir le fonctionnement de l’espace Schengen. Il semblerait, monsieur le secrétaire d’État, que plusieurs propositions, sous la pression coordonnée de Paris et de Berlin, pourraient être mises sur la table lors du prochain Conseil. Je pense en particulier à la création d’un corps de gardes-frontières européen ou encore à la refonte du mandat de FRONTEX pour développer ses capacités de contrôle, deux initiatives que le RDSE approuve.

Par ailleurs, pour lutter contre le terrorisme, nous soutenons aussi la demande française de modification de l’article 7, alinéa 2, du code frontières Schengen permettant des contrôles systématiques et coordonnés aux frontières extérieures, réaffirmée par le ministre de l’intérieur, cet après-midi même, à l’Assemblée nationale.

Toujours est-il qu’il faut réagir rapidement. Le Parlement européen ne doit pas s’enliser, comme il l’a fait trop longtemps sur la question du PNR – le fameux fichier des passagers aériens –, qui va enfin voir le jour après des années de tergiversations.

Mes chers collègues, si les enjeux de la crise migratoire sont multiples, c’est l’idée même de l’Union européenne qui serait encore davantage fragilisée si la solidarité et la responsabilité ne se conjuguaient pas très vite pour agir concrètement.

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