Intervention de Albéric de Montgolfier

Réunion du 16 décembre 2015 à 14h30
Loi de finances pour 2016 — Rejet d'un projet de loi en nouvelle lecture

Photo de Albéric de MontgolfierAlbéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances :

Dans son rapport sur le budget de l’État en 2014, la Cour des comptes avait d’ailleurs pointé la hausse de ces effectifs.

En tous les cas, cette hausse des effectifs, hors missions de sécurité, traduit selon nous l’incapacité du Gouvernement à arbitrer entre les missions de l’État. Rappelez-vous, mes chers collègues, que nous avons eu ce débat en séance.

En outre, nous estimons que l’augmentation des effectifs liée aux nouvelles mesures de sécurité devrait être compensée par une réduction équivalente des effectifs dans d’autres domaines d’activité.

Quatrième divergence de fond : aucun effort significatif n’a été observé sur le temps de travail et la masse salariale de l’État, contrairement aux souhaits exprimés par le Sénat. La commission des finances a pourtant réalisé un travail approfondi sur cette question dans le cadre de l’enquête demandée à la Cour des comptes sur la gestion de la fonction publique de l'État. Je rappelle que cette masse salariale représente 40 % des dépenses de l’État. Nous devrions donc nous interdire toute mesure nouvelle en la matière, afin de contenir le dynamisme de la dépense publique. C’était l’objet d’un certain nombre d’amendements du Sénat.

Cinquièmement, le Sénat avait adopté une position très raisonnable et responsable par rapport à la nouvelle diminution des dotations aux collectivités territoriales qui est prévue dans le projet de loi de finances. La Haute Assemblée avait en effet accepté une telle baisse, à condition qu’en soient exclues l’ensemble des mesures nouvelles qui ont été imposées au Sénat en vertu des fameuses « normes ». Pour le calcul des sommes à retrancher, le Sénat s’est appuyé sur les chiffres de la CCEN, la Commission consultative d'évaluation des normes.

Toutes les études montrent que la nouvelle baisse des dotations aux collectivités sera dangereuse pour l’investissement public local. Selon les dernières statistiques de l’emploi, la baisse significative de la dépense publique locale a ainsi engendré une dégradation de l’emploi, en particulier dans le secteur du bâtiment et des travaux publics.

Enfin, le projet de loi de finances ne comprend aucune mesure de nature à remédier à la hausse de la fiscalité qui pèse sur les ménages et les familles depuis 2012, notamment au travers du quotient familial. Selon les termes mêmes du Premier ministre, cette hausse des impôts a créé « une forme de rupture entre les Français et l’impôt ». §Je précise que la formule n’est pas de moi !

Pour toutes ces raisons de fond, la commission mixte paritaire a échoué. Cela étant, il faut reconnaître que l’Assemblée nationale a tout de même conservé certains apports du Sénat. Cela montre tout l’intérêt pour notre assemblée d’aller jusqu’au bout de la discussion des projets de loi de finances et de ne pas s’arrêter à l’examen de leur première partie.

Pour revenir sur les dispositions du texte de manière plus détaillée, j’indique que, sur les cent quarante-deux articles encore en discussion en nouvelle lecture, l’Assemblée nationale a adopté dans les mêmes termes trente-huit articles modifiés ou introduits par le Sénat. Elle a également confirmé la suppression de six articles et modifié vingt-six articles en conservant une partie des apports de notre assemblée. Je ne pourrai pas mentionner tous les articles concernés ; je vous renvoie donc à mon rapport écrit, qui est très détaillé. En revanche, je peux citer quelques exemples.

L’Assemblée nationale a ainsi repris l’article 3 bis A relatif au taux de TVA applicable à la vente de certains produits de protection hygiénique, introduit notamment sur l’initiative de nos collègues du groupe RDSE, qui recentre la baisse du taux de TVA à 5, 5 % sur les seuls produits de protection hygiénique féminine.

Elle a également confirmé l’extension de l’article 7 bis relatif au suramortissement des coopératives, tout en précisant le mode de répartition entre les associés coopérateurs.

À l’article 11, l’Assemblée nationale a repris une mesure adoptée sur l’initiative de la commission des finances visant à rendre éligibles au FCTVA les dépenses d’investissement réalisées dans le cadre du plan France très haut débit, tout en prévoyant son application dès 2015, ainsi que nous l’avions initialement prévu dans le cadre du collectif budgétaire.

À l’article 14, elle a conservé certains apports du Sénat. Je pense en particulier aux taxes affectées aux chambres d’agriculture et à l’Office national de la chasse et de la faune sauvage.

Fait significatif, elle a également conservé l’article 37 bis, qui a été introduit à la suite d’un travail très approfondi de la commission des finances et qui instaure une déclaration automatique des revenus des particuliers par les plateformes en ligne, tout en la transformant en obligation de remise aux utilisateurs d’un récapitulatif annuel de leurs revenus. À nos yeux, ce n’est sans doute pas suffisant, mais il s’agit là d’un premier pas vers la déclaration effective de revenus, qui, sous couvert de petits compléments de revenu, cachent parfois une activité professionnelle à part entière. Mes chers collègues, je me dois de préciser que cette mesure nous réunit très au-delà de la majorité sénatoriale et suis heureux que nous commencions à avancer sur le sujet.

L’Assemblée nationale a confirmé l’essentiel des modifications apportées par le Sénat à l’article 43 sur les aides fiscales en faveur des départements d’outre-mer et notamment la prolongation jusqu’en 2025 des dispositifs fiscaux pour les collectivités d’outre-mer.

Elle a aussi adopté l’article 34 sur le prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu, tel qu’il a été modifié sur l’initiative de la commission des finances.

À l’article 47, l’Assemblée nationale a confirmé le rétablissement de l’exonération de taxe foncière sur les propriétés non bâties en faveur des terrains Natura 2000.

Elle a par ailleurs confirmé la suppression de plusieurs articles, notamment l’article 46 ter relatif au mécanisme de livraison à soi-même dans le logement social, l’article 47 septies interdisant la revente de tabac et l’article 58 quinquies qui exclut du bénéfice de la péréquation des communes faisant l’objet d’un arrêté de carence.

Enfin, elle a adopté conformes plusieurs articles introduits par le Sénat, dont l’article 3 quater sur le renforcement des amendes pour les importations illégales de produits du tabac et l’article 34 quinquies étalant sur quatre années l’imposition des primes versées par l’État aux sportifs médaillés des jeux Olympiques.

Évidemment, sur d’autres points – ils sont nombreux –, nos divergences persistent, y compris avec vous, monsieur le secrétaire d’État. Nous avons une réelle différence d’approche sur la réforme de l’impôt sur le revenu. L’Assemblée nationale est d’ailleurs revenue aux intentions initiales du Gouvernement en la matière. Contrairement aux engagements du Gouvernement, elle a également augmenté la fiscalité, en particulier les impôts sur les opérateurs de télécommunications pour financer l’audiovisuel public.

L’Assemblée nationale a également maintenu la taxe sur les transactions financières intrajournalières à l’article 8 quater, ou encore l’article 34 bis créant une réduction dégressive de CSG. Introduit à la suite du fameux amendement Ayrault, cet article, dont le financement est incertain, n’a manifestement pas fait l’objet d’une opposition de la part du Gouvernement, puisqu’il a été rétabli par l’Assemblée nationale.

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