Intervention de Jean-François Husson

Réunion du 16 décembre 2015 à 14h30
Loi de finances rectificative pour 2015 — Rejet d'un projet de loi en nouvelle lecture

Photo de Jean-François HussonJean-François Husson :

Dois-je d’ailleurs rappeler que ces dispositions reprennent largement la proposition de loi en faveur de la compétitivité de l’agriculture et de la filière agroalimentaire, déposée par Jean-Claude Lenoir et Jean Bizet, soutenue par le groupe Les Républicains, dont Daniel Gremillet était rapporteur, qui a été adoptée par le Sénat il y a tout juste une semaine, des mesures également adoptées en première lecture dans le projet de loi de finances pour 2016 ?

Oui, la majorité sénatoriale a inspiré – et je m’en réjouis – la majorité présidentielle. Vous le constatez, monsieur le secrétaire d'État, cela arrive !

Néanmoins, malgré ces points positifs, notre sentiment demeure mitigé, car sur le plus gros volet, celui de la fiscalité énergétique, la position du Sénat n’a été que peu entendue.

Certes, la suppression de l’article 30 ter, sur l’initiative, notamment, de la commission des affaires économiques de la Haute Assemblée, a été confirmée par les députés.

Cet article, qui prévoyait d’instaurer sur deux ans la déductibilité de la TVA pour les véhicules à moteur à essence concernait notamment les flottes de véhicules de société. Cet alignement sur la déductibilité bénéficiant déjà aux véhicules roulant au diesel devait s’inscrire dans le cadre de la convergence fiscale du gazole et de l’essence.

Cette mesure risquait cependant de favoriser l’achat en France par les entreprises de voitures de marques étrangères, les constructeurs français n’ayant pas encore eu le temps de réaménager leur chaîne de production de voitures de moyenne gamme ou haut de gamme, qui constituent l’essentiel des véhicules de société, vers le moteur à essence, a contrario des modèles d’entrée de gamme qui sont désormais produits avec des moteurs à essence, comme la nouvelle Renault Twingo, la Peugeot 108 et la Citroën C1.

J’avais proposé une solution intermédiaire, consistant à allonger de deux à quatre ans la mise en œuvre progressive de la déductibilité pour les véhicules à essence, solution soutenue en nouvelle lecture par Mme la rapporteure générale du budget de l’Assemblée nationale qui a finalement retiré son amendement. Au final, les députés ont donc confirmé la suppression de l’article, afin de préserver les constructeurs français et de leur laisser le temps de réorienter leur chaîne de production.

En dehors de cette mesure, d’autres propositions plus substantielles encore sur la fiscalité énergétique ont été repoussées par les députés.

Je pense au rétablissement de la diminution de un centime par litre de la TICPE, la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques, pour tous les types d’essence, tout en maintenant l’écart de fiscalité entre l’essence et le gaz naturel pour véhicule.

Je pense également à la diminution du tarif de la CSPE en compensation de la hausse de la contribution climat-énergie, ou encore à la suppression des modulations de tarif des carburants pour l’année 2017 pour se conformer au principe d’annualité budgétaire.

Ce ne sont là que quelques exemples des modifications apportées par le Sénat qui allaient pourtant toutes dans le sens d’une réduction de la fiscalité. Cela aurait permis au Président de la République de tenir enfin son engagement sur la fameuse pause fiscale !

Au lieu de cela, ce collectif budgétaire correspond une fois encore à une hausse importante de la fiscalité qui aura des conséquences pour tous les Français.

Il est une nouvelle illustration de l’incapacité du Gouvernement à tenir un cap, de cette politique du « pompier pyromane », qui allume l’incendie, promet de l’éteindre, l’éteint, mais le rallume un peu plus tard.

Cela fait deux ans que nous alertons le Gouvernement sur cette hausse disproportionnée de la fiscalité prévue dans un premier temps, puis reportée et finalement mise en œuvre en 2015, mais avec de nouvelles perspectives d’augmentation pour les années à venir. Or, en 2015, cette hausse a été quelquefois confiscatoire : pour un terrain de 1 000 mètres carrés, la taxe foncière a pu passer de quelques centaines d’euros à plus de 5 000 euros et pourrait s’élever à 10 000 euros en 2017. Certains Français propriétaires ont vu parfois cette taxe multipliée par cent.

Le Gouvernement fait désormais machine arrière toute en tentant d’éteindre l’incendie. Dont acte, mais il était temps !

Tout cela participe à la stigmatisation de certaines catégories de Français. Le candidat François Hollande, devenu depuis Président de la République, ne considérait-il pas, lorsqu’il était en campagne, que l’on était riche lorsque l’on gagnait plus de 4 000 euros par mois ? Ne suggérait-il pas de taxer le plus fortement possible cette catégorie de citoyens ?

Dans le même esprit, n’entendons-nous pas également trop souvent dire que lorsque l’on est chef d’entreprise, on est un spoliateur de richesses, et non un créateur de richesses et d’emplois ?

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion