Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’actualité forestière a été très dense en 2015. Je me réjouis que nous débutions l’année 2016 en gardant cette thématique à l’esprit. Je me suis assez bien retrouvé dans les propos de notre collègue Philippe Leroy tout à l’heure.
En effet, comme cela a été rappelé, je travaille depuis maintenant plusieurs années sur cette question stratégique à plusieurs titres. La forêt française est le croisement d’impératifs écologiques, d’une part, et d’enjeux économiques, d’autre part. Elle est également partagée entre les sphères d’activité publique et privée.
À bien des égards, elle est révélatrice de la complexité de l’action publique que nous connaissons aujourd’hui. Il n’y a pas de solution simple et évidente. Mais il s’agit pour nous, qui sommes en responsabilité politique, de créer les conditions d’une bonne administration et d’une réorientation de cette filière au bénéfice de nos territoires, mais aussi de ceux qui travaillent dans ce secteur et l’exploitent au quotidien de manière responsable.
Après la publication de deux rapports d’information parlementaires en 2015, dont celui que j’ai eu le plaisir de cosigner avec mon collègue Alain Houpert, après la COP21, qui a aussi rappelé l’importance de la forêt à l’échelle de notre planète, après le plan gouvernemental en faveur de l’agroforesterie française, puis la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt, après le contrat de filière du Comité stratégique de la filière bois signé en décembre 2014, après la signature d’un nouveau contrat d’objectifs et de moyens entre l’État, l’ONF et les communes forestières, et dans le contexte d’une réorientation budgétaire significative engagée depuis 2012, il y a lieu d’exposer l’état de cette question et de nous interroger sur l’adéquation des politiques publiques menées aujourd’hui au regard des enjeux, notamment au vu des besoins et des usages de la ressource en bois, comme cela a été souligné.
En quelques minutes, il n’est pas possible de faire le tour d’un sujet aussi vaste. C’est pourquoi mon intervention se limitera à opérer une mise en perspective et à souligner deux sous-problématiques qui me paraissent importantes.
En préambule, je veux rappeler et saluer l’ambition du Gouvernement. Le programme « Forêt », pour reprendre la typologie de la loi organique relative aux lois de finances, la LOLF, a pour triple objet de faire participer les produits de la forêt au développement d’une économie plus sobre en carbone, de permettre une gestion durable des forêts et de développer les emplois induits en renforçant la compétitivité de la filière bois exposée à la concurrence internationale.
La stratégie gouvernementale porte sur trois axes prioritaires que j’estime, personnellement, correctement définis et calibrés : mobiliser plus la ressource bois et mieux la valoriser ; gérer durablement les forêts ; adapter les forêts françaises et anticiper le changement climatique. Ce dernier enjeu a été rappelé par plusieurs orateurs avant moi.
Tout n’est certainement pas parfait, comme nous l’avons souligné dans notre rapport d’information. Pour autant, il nous faut mesurer les progrès réalisés en matière d’action publique en direction de la forêt et, bien entendu, nous en réjouir. Certains points peuvent être sans aucun doute améliorés.
Ainsi, je m’interroge, par exemple, sur la bonne fiscalité applicable aux propriétés forestières privées. Nous sommes tous d’accord quant à l’insuffisance de la mobilisation de la ressource, tant d’ailleurs dans la forêt publique que dans la forêt privée. Dès lors, dans quelle mesure et à quel niveau faut-il réorienter la fiscalité pour la rendre moins patrimoniale et plus incitative en matière d’investissements et d’exploitations ?
Je suis personnellement favorable à une remise en question de certaines niches fiscales, telles que les exonérations existant en matière d’ISF, sous réserve que ces mesures soient compensées par le renforcement d’outils incitatifs comme les dispositifs d’encouragement fiscal à l’investissement en forêt, notamment en ce qui concerne le « DEFI travaux » et le « DEFI contrat », qui sont sans conteste les plus efficaces.
Dès lors, la question est de savoir où l'on pourrait placer le curseur de manière optimale pour inciter au mieux les propriétaires forestiers à gérer leurs biens.
À cet égard, j’aimerais connaître les intentions du Gouvernement : estime-t-il souhaitable d’aller plus loin en matière de fiscalité incitative et dans quelle mesure envisage-t-il de le faire ?
Je tiens à évoquer, en guise de conclusion, un autre point qui peut sembler de prime abord plus secondaire, mais dont il ne faut pas, j’en suis convaincu, sous-estimer l’importance. Il s’agit de la question sanitaire, qui intervient dans la mobilisation durable, cette fois, de la ressource, dans la mesure où elle conditionne et conditionnera la production et la commercialisation future de nos bois.
Plusieurs professionnels du secteur ont évoqué l’infestation du bois, notamment par des insectes tropicaux, qui tendrait à se propager.
Pour autant, je ne dispose pas d’éléments détaillés à ce stade, et je souhaiterais que vous nous indiquiez, monsieur le ministre, si vos services ont eu connaissance de tels éléments d’information. Si oui, quelle est l’ampleur du phénomène ?