Intervention de Dominique Lenoir

Commission de l'aménagement du territoire et du développement durable — Réunion du 27 janvier 2016 à 9h00
Prévention des risques en matière phytosanitaire — Table ronde

Dominique Lenoir, médecin chef, directeur de la santé sécurité au travail de la MSA :

S'agissant du domaine de compétence en matière de santé et de sécurité au travail, la MSA regroupe les médecins du travail et les conseillers en prévention des risques professionnels. Cela nous permet tout à la fois d'avoir une vision individuelle et d'être en mesure de conduire des actions collectives en matière de prévention professionnelle, vis-à-vis des professionnels salariés et non-salariés.

Notre échelon national nous permet de participer à une veille et à certaines enquêtes, avec plusieurs structures comme l'Anses. Concernant la prévalence de certaines maladies, je n'ai peut-être pas été clair dans mes conclusions. En tant qu'organisme de protection sociale, il nous faut nous baser sur des éléments sûrs et consolidés. Actuellement, la seule étude de cohorte à partir de laquelle nous pouvons comparer les populations agricoles et non-agricoles, c'est l'étude Agrican que j'ai évoquée précédemment. Les premiers résultats de 2010 ont été quelque peu polémiques puisqu'ils mettaient en évidence une espérance de vie supérieure à la population générale. De tels résultats s'expliquent notamment par une moindre consommation de tabac au sein de la population agricole et, par conséquent, une moindre mortalité par cancer du poumon et une plus grande espérance de vie. Cela ne présageait en rien de l'exposition ou non à des produits.

Les résultats de 2015 sont plus fins mais ne fournissent, pour l'heure, que des éléments de tendance. Ils confirment ce constat en matière de cancers du poumon et mettent en lumière une augmentation des mélanomes de la peau, des lymphomes et des cancers de la lèvre. Ces premiers résultats sont en phase avec l'étude américaine de cohorte évoquée précédemment. Aujourd'hui, il s'agit de rechercher un lien entre le produit phytosanitaire et l'apparition de la pathologie. Une étude complémentaire est en train d'être conduite à partir de questionnaires, en ciblant une quinzaine de produits utilisés pour voir s'il existe un lien entre l'utilisation de produits et l'apparition de certaines pathologies. C'est un processus qui prend du temps. Scientifiquement, il faut prouver un tel lien au-delà d'une série d'études, qui peuvent se contredire les unes à la suite des autres ; d'où l'intérêt des méta-analyses, c'est-à-dire d'une synthèse de plusieurs analyses qui permet de pondérer scientifiquement le lien éventuel entre agent et pathologie.

En début d'audition a été évoquée une omerta, puis nous avons été considérés comme timides, ce qui témoigne de notre progression dans le débat ! Je rappellerai que nous avons réalisé une étude en 2011 qui a conduit à l'interdiction de l'arsenic de sodium pour la vigne. C'est un excellent produit contre l'esca, mais les risques pour les utilisateurs, même bien protégés, étaient tels qu'il n'était plus possible de l'utiliser ! Preuve en est que nos contributions sont bénéfiques à la santé des utilisateurs !

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