… et la question de la déchéance de nationalité qu’il aborde nous occupera pendant quelques heures d’ici peu, puisqu’une partie de la révision constitutionnelle porte sur ce sujet. Mais vous avez eu raison, mon cher collègue, de poser quelques petits jalons avant l’ouverture de cette discussion.
La proposition de loi que nous examinons ce soir est un texte de procédure pénale et de droit pénal. Or cet amendement vise à modifier le code civil, son article 25 ! D’un point de vue juridique, ce n’est pas parfait, mais j’ai bien compris que, ce soir, vous vouliez inventer.
En revanche, vous avez parfaitement raison lorsque vous soulignez qu’aucun texte international, qu’aucune convention, n’interdit aujourd’hui à la France de créer des apatrides, et ce pour une raison simple : la France a, certes, signé des conventions qui prévoient l’interdiction de l’apatridie, mais elle ne les a pas ratifiées. Il me semble avoir lu que le Premier ministre envisageait désormais de procéder à la ratification. Si on envisage de le faire, c’est qu’on ne l’a pas encore fait. Par conséquent, on ne peut pas nous opposer un quelconque principe de conventionnalité.
Vous avez également raison de souligner que seul l’article 25 du code civil – une disposition introduite dans notre droit interne à l’initiative de Mme Guigou et en anticipation d’une ratification prochaine par la France de la convention européenne visant à supprimer l’apatridie – concerne ce sujet. Nous n’avons que cela ; c’est déjà beaucoup, mais cela relève du droit interne.
Je souhaite profiter de la présence de M. le garde des sceaux pour lui rappeler que le code civil distingue astucieusement la perte de nationalité, qui est l’objet de ses articles 23 et suivants, de la déchéance de nationalité, laquelle, si j’en crois ce que l’on entend, pourrait devenir une peine complémentaire dans certains cas. N’anticipons pas avant de connaître la position qui sera prise par l’Assemblée nationale.
Monsieur Bizet, nous sommes donc dans un droit mouvant. Vous avez eu raison d’ouvrir un débat qui va nous occuper pendant plusieurs jours, jusqu’à une éventuelle révision constitutionnelle. Maintenant que c’est chose faite, et compte tenu de la nature civile des dispositions que vous entendez modifier, je vous demande de ne pas les introduire dans ce texte, qui est pénal.
Vous avez posé le problème, je vous propose donc de bien vouloir retirer votre amendement jusqu’à la discussion du texte de la révision constitutionnelle, durant laquelle vous pourrez développer les arguments fort justes que vous avez fait valoir ce soir devant le Sénat.