Intervention de Patrick Kanner

Réunion du 3 février 2016 à 14h30
Laïcité : inscriptions des principes de la loi de 1905 dans la constitution — Rejet d'une proposition de loi constitutionnelle

Patrick Kanner, ministre de la ville, de la jeunesse et des sports :

Monsieur le président, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les présidents de groupe, mesdames, messieurs les sénateurs, avant tout, permettez-moi de vous présenter les excuses du garde des sceaux, ministre de la justice, Jean-Jacques Urvoas, qui, vous le savez, a été nommé il y a peu, et qui ne peut être présent ce soir dans cet hémicycle.

Je tiens à saluer l’initiative du groupe du RDSE et de son président, M. Mézard, qui est à l’origine de cette proposition de loi constitutionnelle visant à inscrire les principes fondamentaux de la loi du 9 décembre 1905 à l’article 1er de la Constitution.

En effet, nous le constatons depuis le début de cette discussion, le présent texte donne lieu à un débat utile et de très grande qualité, consacré à un sujet qui occupe souvent nos concitoyens et la représentation nationale tout entière. Il s’agit d’une question essentielle : le respect du principe de laïcité, non seulement dans sa construction juridique, laquelle a été précédemment évoquée, mais aussi et surtout dans sa mise en œuvre effective au service du vivre-ensemble, notion si souvent convoquée ces derniers temps.

Dans cette même logique, je salue le travail accompli par le rapporteur, M. Pillet, et par tous les membres de la commission des lois du Sénat. Cette dernière a conclu au rejet de la présente proposition de loi, mais la qualité de ses travaux n’en a pas moins permis d’apporter au débat collectif de nouveaux éclairages sur cette importante question. Je n’en doute pas, les interventions d’aujourd’hui prolongeront cette démarche.

Cette proposition de loi vise à inscrire les principes fondamentaux de la loi du 9 décembre 1905 à l’article 1er de notre Constitution. Pourtant, la référence à la laïcité, c’est-à-dire à la séparation des Églises et de l’État, figure déjà, et en plusieurs points, dans notre Constitution.

Tout d’abord, l’article X de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789, qui fait partie du bloc de constitutionnalité, dispose que « nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l’ordre public établi par la Loi. »

Ensuite – je le rappelle à mon tour –, en vertu de l’article 1er de la Constitution, « la France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race ou de religion. Elle respecte toutes les croyances. » Sur cette base, nous pouvons affirmer qu’aucune revendication de nature identitaire n’est conforme aux lois de la République. Cette précision répond en partie aux propos de M. le président de la commission des lois.

Par ailleurs, la liberté de conscience a été élevée au rang de principe fondamental reconnu par les lois de la République par le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 23 novembre 1977 portant sur la loi relative à la liberté de l’enseignement.

En réalité, le rappel constitutionnel de la liberté de conscience et du libre exercice du culte proposé à travers le présent texte n’apporte donc aucun changement au droit existant. Ces deux principes sont déjà inscrits dans la Constitution.

1 commentaire :

Le 10/12/2020 à 10:55, aristide a dit :

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"Elle assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race ou de religion. "

Justement, lorsque l'Etat fait des menus religieux distincts, ou lorsqu'il s'en prend à un foulard supposé religieux, il fait une distinction religieuse, il enfreint donc très clairement la constitution.

Vous trouvez ce commentaire constructif : non neutre oui

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