« La France n’est pas schismatique, elle est révolutionnaire. » : c’est par ces mots que Jaurès introduit son propos à la Chambre des députés le 15 avril 1905, alors qu’est discutée la loi de séparation des Églises et de l’État, « la plus grande réforme qui ait été tentée depuis la Révolution » selon lui. Dans une synthèse de l’histoire religieuse de la France, Jean Jaurès persiste et signe : la France, fille aînée de l’Église, était devenue la fille aînée de la Révolution.
N’en déplaise aux obscurantistes, il s’agit là des seules racines de la laïcité et, par essence, de la seule définition qui puisse exister et perdurer. Sa fâcheuse réappropriation pour servir des idéaux qui n’ont rien à envier à ceux des extrémistes religieux est parfaitement incompatible avec notre République laïque.
La laïcité est un pilier du socle de notre communauté nationale, par opposition à une multiplication des communautés dans la nation.
Il ne s’agit pas de taire les dérives idéologiques ni les stratégies de radicalisation se prévalant de l’islam, mais de veiller à l’écueil dangereux d’une laïcité qui serait synonyme de sauvegarde d’une identité nationale refermée sur elle-même, exclusive de toute influence qui viendrait la pervertir, hostile à toute immigration ou à toute singularité culturelle ou cultuelle.
La tâche n’est pas aisée, mais l’issue est bien connue : elle réside dans la même stratégie émancipatrice que s’employait à défendre Jules Ferry en 1880, avec son projet de loi sur l’instruction primaire obligatoire, premier texte affranchisseur en matière de religion au Parlement, qui s’est attaché à laïciser l’école, avant même la séparation des Églises et de l’État. Affirmer la laïcité, c’est aussi agir pour le renforcement de l’éducation nationale. Ne pas le faire est une contradiction majeure !
En parallèle, trop longtemps négligée, et encore trop souvent oubliée aujourd’hui, l’égalité entre les femmes et les hommes est une conquête, certes tardive, mais essentielle, du combat laïc et républicain pour l’égalité entre les citoyens.
École laïque et égalité hommes-femmes traduisent concrètement la laïcité, tout comme le principe de neutralité des services publics, corollaire du principe d’égalité qui régit le fonctionnement des services publics, implique une conception exigeante de l’égalité de tous les citoyens devant la loi.
Menus dans les cantines scolaires, port du voile dans l’espace public ou à l’université, relations entre personnes publiques et personnes privées : au regard des débats dont nous abreuve quotidiennement la sphère politico-médiatique, force est de constater qu’aucune de ces problématiques ne sera résolue par la constitutionnalisation des principes de la loi du 9 décembre 1905 visée par la présente proposition de loi.